Des racines, des langues et des ailes !

Compte rendu
Opéra

Des racines, des langues et des ailes !

Petites formes écolyriques européennes

Le 21 Sep 2021
Orchestre interculturel du département de l’éducation, Opéra National de Grèce. Photo Valeria Isaeva.
Orchestre interculturel du département de l’éducation, Opéra National de Grèce. Photo Valeria Isaeva.

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Orchestre interculturel du département de l’éducation, Opéra National de Grèce. Photo Valeria Isaeva.
Orchestre interculturel du département de l’éducation, Opéra National de Grèce. Photo Valeria Isaeva.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 144-145 - Opéra et écologie(s)
144 – 145

Les restric­tions imposées par la pandémie aux déplace­ments physiques et aux rassem­ble­ments, la prise en compte de l’empreinte car­bone des spec­ta­cles, les inquié­tudes face à la chute de la bio­di­ver­sité et à l’avenir de nos écosys­tèmes ont déjà boulever­sé le monde de l’opéra. Des modes de con­cep­tion dif­férents se font jour, dans des cir­cuits plus courts et ménageant des liens qui se veu­lent plus étroits avec les spec­ta­teurs. Des voix s’élèvent qui prédis­ent une révo­lu­tion scénique dont les con­séquences seront aus­si impor­tantes pour l’opéra que la mise en scène l’a été pen­dant les deux siè­cles passés. Des pro­jets émer­gent, qui rompent avec les usages, dépla­cent les pra­tiques et induisent de nou­velles formes. Des thé­ma­tiques écologiques sur­gis­sent et s’imposent en moins de temps qu’il n’en faut pour mon­ter une sai­son dans une grande mai­son d’opéra. Que reste-t-il du genre lyrique dans ces muta­tions ? Quelles en sont les con­séquences sur la créa­tion opéra­tique ? Il est dif­fi­cile de répon­dre, mais ce reportage à plusieurs voix sur des expéri­ences menées à dif­férents endroits d’Europe (Grèce, Fin­lande, Mon­téné­gro, Roumanie, Russie, Irlande, Let­tonie) hors de la vis­i­bil­ité des grandes maisons lyriques, per­me­t­tent d’appréhender le phénomène sur dif­férent plans. L’opéra essaime, se déplace, s’hybride et per­siste.

Participation, tradition et durabilité. 
Vers de nouveaux territoires

Celia Grau

Deux îles des Cyclades seront les heureuses élues pour le futur pro­jet conçu par le départe­ment péd­a­gogique de l’Opéra Nation­al de Grèce, qui plac­era la dura­bil­ité au cœur de la pro­duc­tion artis­tique. Au fil des mois, a pris forme l’idée d’un opéra par­tic­i­patif, invi­tant les habi­tants des deux îles à créer et jouer une œuvre musi­cale. Ce n’est pas la pre­mière fois que l’équipe sort de la cap­i­tale pour inclure des com­mu­nautés de la périphérie dans un proces­sus créatif et lyrique, mais c’est son pro­jet insu­laire le plus ambitieux à ce jour. En effet, le pro­jet aspire à une dimen­sion durable à tous les niveaux : « Notre point de départ était de réfléchir à com­ment la dura­bil­ité pou­vait devenir une com­posante de nos pro­jets d’un point de vue pra­tique et tech­nique (déplace­ment des per­son­nes, pro­duc­tion zéro déchet…), mais égale­ment d’un point de vue artis­tique et en rela­tion avec le con­texte local », explique Kristin Sofro­niou, qui coor­don­nera le pro­jet. 

Depuis Athènes, Kristin et ses col­lègues Christi­na Spanou, Kallir­roi Papadopoulou et Eva Karter­ou ont choisi de tra­vailler sur deux îles pour inclure deux com­mu­nautés dif­férentes à la réal­i­sa­tion du pro­jet mais égale­ment pour val­oris­er des tra­di­tions par­ti­c­ulières pro­pres à chaque île. À la com­mu­nauté de l’île de Tinos, con­nue pour ses tra­di­tions de la van­ner­ie et du tra­vail du mar­bre, sera con­fiée le tra­vail de con­cep­tion et pro­duc­tion des décors. L’approche durable et par­tic­i­pa­tive ren­versera le mode de pro­duc­tion scéno­graphique tra­di­tion­nel puisque les décors seront fab­riqués selon les besoins de la com­mu­nauté pour que tous les objets créés aient une vie après la représen­ta­tion. L’autre île n’a pas encore été définie mais per­me­t­tra le recrute­ment des acteurs et musi­ciens, futurs créa­teurs et pro­tag­o­nistes de l’opéra, au sein de com­mu­nautés avec une forte tra­di­tion musi­cale et de danse. 

Si la sit­u­a­tion le per­met, la phase d’étude sur le ter­rain débutera en automne prochain pour définir les par­tic­i­pants au pro­jet et dès 2022 les work­shops créat­ifs pour­ront com­mencer, avec l’objectif d’un résul­tat final pour l’hiver 2022 – 2023. À terme, l’équipe espère qu’au-delà d’un résul­tat artis­tique « ce pro­jet mène à une prise de con­science écologique au sein de la com­mu­nauté et de notre équipe, pour adapter notre méthodolo­gie et notre mode de tra­vail ».

Finnish National Opera & Ballet, 2020. Photo Heikki Tuuli.
Finnish Nation­al Opera & Bal­let, 2020. Pho­to Heik­ki Tuuli.

Helsinki toujours plus vert

Celia Grau

À l’Opéra nation­al fin­landais, en revanche, la prise de con­science écologique sem­ble faire par­tie inté­grante du mode de tra­vail depuis déjà bien longtemps. Active­ment engagé dans le sys­tème de cer­ti­fi­ca­tion envi­ron­nemen­tale « Ekokom­pas­si » depuis 2011, le théâtre suit une stratégie de dura­bil­ité avec des objec­tifs mesurables. Il a ain­si entamé une tran­si­tion vers une ali­men­ta­tion en éner­gies vertes grâce à des pan­neaux solaires sur son toit et l’utilisation d’énergie hydraulique plutôt que fos­sile ou nucléaire. Du côté de la pro­duc­tion, l’argument écologique a pris une place crois­sante et guide le choix des matières et méth­odes util­isées pour la fab­ri­ca­tion des décors. 

Mais pour Tapio Säkki­nen, respon­s­able des ate­liers de décors et de la dura­bil­ité, des pro­grès sont encore à faire. Il vise la neu­tral­ité car­bone du théâtre et a com­mencé les cal­culs de l’empreinte de CO2 pro­duite par les activ­ités de ses dif­férents départe­ments. « Ce n’est que le début de cette grande tâche qui con­nectera notre tra­vail envi­ron­nemen­tal avec les façons de faire de chaque départe­ment. » Con­cen­tr­er des efforts tech­niques sur le bâti­ment et la pro­duc­tion de décors n’est pas suff­isant, l’élaboration d’une stratégie écologique trans­ver­sale inclu­ant chaque départe­ment, chaque employé mais aus­si le pub­lic est néces­saire. Dans cette per­spec­tive, Tapio rêve d’une future pro­duc­tion zéro déchet, encore jamais réal­isée à Helsin­ki, peut-être sur une île de la mer du Nord, qui sait ? 

La Passion selon Stella,
Festival KotorArt, Place
de la cathédrale Saint-Tryphon, Kotor, le 13 juillet 2018,
Photo KotorArt, Duško Miljani.
La Pas­sion selon Stel­la, Fes­ti­val KotorArt, Place de la cathé­drale Saint-Tryphon, Kotor, le 13 juil­let 2018, Pho­to KotorArt, Duško Mil­jani.

La Passion selon Stella, un éco-opéra au fond de la mer

Sofija Perovic

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Isabelle Moindrot est Professeure d'Études théâtrales à l'Université Paris 8, membre senior de l'Institut universitaire...Plus d'info
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Sofija Perovic est doctorante en études théâtrales à l’Université Paris 8, docteure en arts musicaux...Plus d'info
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Lauma Mellēna-Bartkeviča, docteure en musique et études théâtrales, est critique et chercheuse à la Jāzeps...Plus d'info
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