En Belgique, comme dans les pays du nord de l’Europe, saint Nicolas est plus populaire que le père Noël. Il est souvent accompagné de Zwarte Piet (le père Fouettard), un homme noir qui punit les enfants turbulents. Mue par l’urgence de proposer une alternative à cette tradition empreinte d’un imaginaire colonial, Laura Nsengiyumva, artiste et militante, a imaginé Queen Nikkolah. La Queen est désormais célébrée dans toute la Belgique et aux Pays-Bas depuis peu.
Laura Nsengiyumva est une artiste, architecte et chercheuse basée à Bruxelles. À travers sa pratique interdisciplinaire, elle explore des thèmes tels que l’expérience diasporique, les histoires cachées, les relations Nord-Sud et l’empathie. Ses performances artistiques, comme PeoPL (la fonte d’une statue de Léopold II) et Queen Nikkolah, font partie de son projet de recherche Shaping the presence of the African diaspora in Belgium.
Aujourd’hui, Queen Nikkolah a cinq auxiliaires et nous avons rencontré l’une d’entre elles, Aurélie Mulowa, également fondatrice de Belgian Entreprenoires.
Aurélie, quelle est la genèse de Queen Nikkolah ?
Depuis 1850, dans la tradition de saint Nicolas, le mal est incarné par un jeune page noir, tandis que le bien est incarné par un vieil homme blanc. Pour expliquer cela, il est communément admis que Zwarte Piet est une personne recouverte de suie, une sorte de ramoneur, mais il est flagrant qu’il s’agit d’un black face.
Qui a déjà vu quelqu’un passer par une cheminée et se transformer soudainement en une personne aux cheveux frisés, avec une bouche rouge et une peau uniformément noire ? Très clairement, le père Fouettard représente un esclave dans le cadre d’une société coloniale, arrêtons les faux-semblants !
La genèse de ce projet, c’est donc la colère suscitée par des représentations qui ne valorisent pas l’ensemble des citoyens belges, et la volonté d’offrir de nouveaux narratifs à la société.
Queen Nikkolah débarque d’un pays imaginaire nommé Alkebulan. Cela permet de garder une part de mystère et de miracle, mais aussi au plus grand nombre de s’y reconnaître. Enfin, pour les personnes qui l’incarnent, l’aspect fictif permet de garder une distance avec le personnage.