Avec Georges Banu…

Hommage

Avec Georges Banu…

Le 3 Fév 2023
L'Homme de dos_Georges Banu
L'Homme de dos_Georges Banu

Georges Banu était une mémoire vivante du théâtre, que nous per­dons avec lui. Il nous reste ses essais, ses arti­cles, et les nom­breux sou­venirs d’échanges pas­sion­nants. Il avouait avoir eu une expéri­ence désas­treuse du plateau en tant qu’acteur. « Je ne suis pas l’homme du re-faire », dis­ait-il. C’est fort de cette con­stata­tion qu’il a con­stru­it son devenir de cri­tique, à la juste place de celui qui pense dans l’admiration des créa­teurs, auprès d’eux. Une leçon pour les cri­tiques. Lorsque je me lançais dans ma thèse sur l’œuvre de Wla­dys­law Znorko, c’est pré­cisé­ment Znorko qui m’a con­seil­lé de m’adresser à lui pour la diriger. Ceci n’est pas anodin : l’artiste faisant l’éloge du cri­tique. Et ils ont été tant à faire son éloge. Très tôt Antoine Vitez ou Jerzy Gro­tows­ki, mais encore Peter Brook, Krzysztof War­likows­ki, Stanis­las Nordey, Thomas Oster­meier, Waj­di Mouawad……………   

Auprès de Georges Banu, j’ai fait l’apprentissage d’une recherche dans une con­fi­ance respectueuse avec nos « sujets » d’étude, une sym­pa­thie qui n’empiétait pas sur la dis­tance cri­tique. Cette juste place, Georges Banu l’a tenue de façon exem­plaire, ne se préoc­cu­pant pas des rati­o­ci­na­tions théorici­ennes pour puis­er au plus près des bâtis­seurs du théâtre la vital­ité de sa pen­sée. Il aura voy­agé par le monde, passé d’innombrables soirées dans les salles de spec­ta­cle, des heures à con­vers­er… J’aimais chez lui la vision qu’il por­tait sur le tra­vail des autres, la per­ti­nence avec laque­lle il dis­cer­nait les enjeux en jeu. J’aimais sa fidél­ité, son goût pour l’amitié.

Grand péd­a­gogue, c’était un passeur qui aura con­nu des généra­tions sans nég­liger les nou­velles. Il devait dans quelques jours aller par­ler aux étu­di­ants de l’école de théâtre La Salle Blanche à Paris, il avait choisi pour cette ren­con­tre le thème orig­i­nal et stim­u­lant de l’acteur de dos. Cer­tains avaient déjà acheté son beaux-livre L’Homme de dos. Ces jeunes artistes échangent désor­mais entre eux sur ce qu’il aurait pu leur appren­dre, sur ce que tourn­er le dos au pub­lic veut dire.

Aujourd’hui qu’il nous a quit­tés, manque déjà son regard sur le théâtre, sur l’art, sur les gens. Au sein du comité de rédac­tion d’Alter­na­tives Théâ­trales, il nous fau­dra appren­dre à faire sans lui. Il était de tous les som­maires, ou presque. Il nous fau­dra imag­in­er des numéros sans lui, écrire sans lui… Il a con­sacré son dernier ouvrage aux « objets blessés » qu’il col­lec­tion­nait. Il dis­ait dis­cuter en silence avec eux, la nuit ou dans la clarté de l’aube qu’il chéris­sait. Nous qui sommes intime­ment blessés aujourd’hui, écou­tons le silence car Georges est cer­taine­ment par-là, le sourire aux lèvres, avec une énième anec­dote inspi­rante à nous racon­ter.

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Georges Banu
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Chantal Hurault
Docteure en études théâtrales, Chantal Hurault a publié un livre d’entretiens avec Dominique Bruguière, Penser...Plus d'info
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