C’est un hasard, une coïncidence. Mais, pendant plusieurs jours, je ne suis pas parvenu à penser à autre chose.
Il y a quelques semaines, après la représentation du spectacle Dehors, que j’ai mis en scène il y a quatre ans, créé au sein de ma compagnie, en complicité étroite avec six acteurs, un auteur, un régisseur, et quelques autres fidèles qui se dépensent sans compter, j’ai écouté un spectateur parler de ce que nous venions de montrer.
C’était dans une rencontre publique d’après spectacle comme nous en vivons souvent, plusieurs personnes avaient pris la parole, posé des questions à l’équipe, formulé des impressions. J’étais assis sur scène, entouré par les six acteurs, et Hedi a pris la parole. Les projecteurs m’éblouissaient un peu et ma mémoire des visages n’est jamais très bonne mais, tel que je me le représente quelques semaines plus tard, Hedi a dix-sept ans. Il porte des vêtements de sport clairs, une casquette avec une marque internationale brodée dessus, et parle le français avec un accent marseillais prononcé, mâtiné d’intonations maghrébines.
Hedi affirme que notre spectacle montre que c’est la misère sociale qui pousse certains individus à se mettre en marge de la société, à devenir des clochards. Hedi affirme que c’est le partage de l’argent qui explique tout et que notre spectacle le montre bien.
Je l’écoute.
Il développe son propos en prenant appui sur les signes dramaturgiques du spectacle, certains très évidents (liés à la fable), d’autres plus subtils (sa perception du sens de notre dispositif scénique, des éléments qui nous semblaient moins faciles à déceler).