Arts de la marionnette et cabaret en France

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Arts de la marionnette et cabaret en France

Le 14 Nov 2023
Lucile Beaune et Johanny Bert (manipulation et voix) dans HEN – cabaret dégenré, création de Johanny Bert, Clermont-Ferrand, 2019. Photo Christophe Raynaud-Delage.
Lucile Beaune et Johanny Bert (manipulation et voix) dans HEN – cabaret dégenré, création de Johanny Bert, Clermont-Ferrand, 2019. Photo Christophe Raynaud-Delage.
Lucile Beaune et Johanny Bert (manipulation et voix) dans HEN – cabaret dégenré, création de Johanny Bert, Clermont-Ferrand, 2019. Photo Christophe Raynaud-Delage.
Lucile Beaune et Johanny Bert (manipulation et voix) dans HEN – cabaret dégenré, création de Johanny Bert, Clermont-Ferrand, 2019. Photo Christophe Raynaud-Delage.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 143 Cabaret - Althernatives Théâtrales
150 – 151

À la fin du xixe siè­cle, les ombres du cabaret du Chat noir, à Mont­martre, atteignent une renom­mée inter­na­tionale. Fruit des tal­ents con­jugués d’Henri Riv­ière, Caran d’Ache, Steinlen, Hen­ri Somm et Rodolphe Salis – l’extravagant pro­prié­taire des lieux –, ce théâtre d’ombres man­i­feste une rare inven­tiv­ité tech­nique. Quar­ante-cinq spec­ta­cles, dont l’Épopée ou La Marche à l’Étoile, ponctuent de 1887 à 1897 l’aventure d’une équipe auto­di­dacte en matière d’animation, qui restera un mod­èle pour des généra­tions d’artistes de l’ombre. Des traces – décors, sil­hou­ettes, textes, dessins – des représen­ta­tions du Chat noir sont préservées aujourd’hui dans des musées, des col­lec­tions privées ou sur Inter­net.

Après la Sec­onde Guerre mon­di­ale, les cabarets parisiens offrent une scène étroite mais expéri­men­tale à des artistes attirés par le champ ouvert des arts de la mar­i­on­nette. Le con­texte se révélera fructueux : avides de lib­ertés formelles, ces créa­teurs issus d’horizons var­iés peu­vent tester devant un pub­lic réac­t­if, friand de nou­veautés, de cour­tes per­for­mances pour adultes, essen­tielle­ment visuelles.
La Rose rouge puis L’Écluse présen­tent les numéros à mains nues ou gan­tées de la com­pag­nie Yves Joly (Ivress­es, Jeux de cartes, Les Mains seules), ses objets-per­son­nages pio­nniers (Ombrelles et para­pluies) et ses fig­ures dont la matière est un élé­ment dra­maturgique (Bris­tol et La Tragédie de papi­er). La Fontaine des Qua­tre-Saisons de Pierre Prévert per­met à Georges Lafaye d’inventer le castelet de lumière du théâtre noir avec la ren­con­tre amoureuse d’un cha­peau haut-de- forme et d’un boa en plume (John et Mar­sha). Peu à peu, les cabarets sont les ports d’attache de mar­i­on­net­tistes rarement pro­gram­més sur les scènes des théâtres français, mais en tournées cycliques à l’étranger : André Tahon et ses marottes ; Jean-Paul Hubert dans son castelet chi­nois ; Philippe Gen­ty et ses autruch­es, entre autres. Louis Valdès, manip­u­la­teur à vue vir­tu­ose de mar­i­on­nettes à fils, est attaché au cabaret trans­formiste Madame Arthur dans les années 1950, puis au Crazy Horse. Son célèbre Pier­rot, dés­espéré de décou­vrir qu’il dépend d’une volon­té extérieure, a inspiré celui de Philippe Gen­ty. La numéri­sa­tion des émis­sions télévisées con­serve le tal­ent de cet artiste dis­paru pré­maturé­ment en 1965.
Au cabaret de l’Écluse passent aus­si Alain Reco­ing avec la com­pag­nie des Trois, les Tour­naire, les Dougnac. Beau­coup de ceux qui ont mar­qué les arts de la mar­i­on­nette en France ont tra­vail­lé dans les cabarets.

Yaël Rasooly et sa marionnette d’Edith Piaf, dans un extrait de Chante !, Lapin Agile, 2023. Photo Michal Heiman.
Yaël Rasooly et sa marionnette d’Edith Piaf, dans un extrait de Chante !, Lapin Agile, 2023. Photo Michal Heiman.
Yaël Rasooly et sa mar­i­on­nette d’Edith Piaf, dans un extrait de Chante !, Lapin Agile, 2023. Pho­to Michal Heiman.

Lorsque, dans les décen­nies suiv­antes, les mar­i­on­net­tistes ont inté­gré les pro­gram­ma­tions insti­tu­tion­nelles, agran­di leurs scéno­gra­phies ou acquis des espaces dédiés, seuls les ven­tril­o­ques, au dis­posi­tif suc­cinct, ont con­voité le cabaret. Par­mi eux, Jacques Cour­tois, Michel Dejen­effe, Philippe Bossard, Chris­t­ian Gabriel, Jeff Pana­cloc.
Et demain ? Le mou­ve­ment sem­ble s’inverser, le cabaret entre sur la scène mar­i­on­net­tique. Pour abor­der les sujets socié­taux, les artistes savent que la mar­i­on­nette peut être un medi­um inso­lent et par­o­dique, mais, pour être à la fois sub­ver­sifs et recev­ables par un large pub­lic, cer­tains de leurs spec­ta­cles impor­tent les codes du cabaret, recon­naiss­ables et diver­tis­sants.

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Évelyne Lecucq
Évelyne Lecucq est journaliste et dirige Mû, publication consacrée à l’art de la marionnette.Plus d'info
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