A
Aban-garudo : voir shô-gekijô.
Ankoku-butô : voir butô.
B
Bangaku : voir shugen-nô.
Biwa-hôshi : voir shin-sarugaku.
Bon-odori : voir furyû.
Bugaku : « danse-musique » : les danses et pantomimes masquées accompagnant la « musique élégante » gagaku. Collectées dés le début de l’ère classique aux quatre coins de l’Extrême-Orient (et jusqu’en Inde), ces danses ont été adoptées et codifiées dés avant l’an mille par la cour impériale et conservées sous le sceau du secret jusqu’à nos jours. Malgré cette occultation, le bugaku, danse noble et hiératique, a sans doute influencé en ce sens nombre de styles vulgaires, dont les kagura et lé nô.
Bunraku : « musique des lettres » : le théâtre classique de marionnettes apparu vers 1685 à Osaka lorsque le musicien et chanteur Takemoto Gidayû (fondateur de l’art vocal encore appelé gidayû) s’associa au dramaturge Chikamatsu Monzaemon, le « Shakespeare japonais », pour donner une impulsion nouvelle au genre ningyô-jûruri, formé par l’adjonction de marionnettes (ningyô) au jôruri (déclamation chantée de la geste pseudo-épique consacrée à la princesse Jôruri), deux disciplines issues du shin-sarugaku. Les grandes poupées d’aujourd’hui, actionnées chacune par trois manipulateurs, datent de 1730, malgré quoi Le bunraku, bientôt éclipsé par le grand kabuki, s’est fossilisé depuis dans un unique théâtre de sa ville natale.
Butô ou ankoku-butô : « danse des ténèbres » : le nom donné par Hijikata Tatsumi à la danse d’avant-garde inventée par lui-même et Oono Kazuo (voir l’article de Gôda Nario et notre entretien avec Ogino Suichiro).
Buyô : voir Kabuki-mai.
C
Cha-no-yû : la Cérémonie du thé, ancien passe-temps aristocratique formalisé vers 1550 par Sen no Rikyû sous l’influence de la philosophie zen, et devenu un type de « performance » esthétique particulièrement raffiné (voir l’article de Yamaguchi Masao).
D
Daigashira-mai : voir kusemai.
Dengaku : « musique des champs » : divers types de danses liées aux rites agricoles shinto : danses pures ta-mai, danses imitant le travail des rizières O‑ta-ue, cérémonies dansées pour assurer la récolte à venir ta-asobi.
Dengaku-no-nô : « art du dengaku » : version sophistiquée du dengaku paysan (ta-asobi surtout), cette danse accompagnée de chants, très suivie par la classe cultivée avant 1400, fut évincée par le sarugaku-no-nô lorsque celui-ci devint le nô classique, non sans avoir transmis à ce nouveau style le yûgen, le « charme subtil » qui caractérisait le dengaku-no-nô.
E
Ennen ou Ennen-nû : « longue vie » : dérivé des banquets rituels des moines bouddhistes, un type de danses masquées et costumées, accompagnées de Chants et de dialogues. Empruntant à tous les styles de danse en vogue à l’époque (jusqu’au furyû), l’ennen-nô a influencé le nô sous plusieurs aspects.
F
Furyû : divers types de danses, souvent collectives, très animées, pratiquées — dans le cadre du shinto à l’origine — pour attirer les influences néfastes à l’écart des villages. 1en subsiste de nombreux types, généralement fort spectaculaires : taiko-odori (danse au tambour) dans l’ouest du Japon, shishi-mai (danse du lion) à l’est, bon-odori (les farandoles de la fête bouddhiste des morts), nembutsu-odori (danse d’adoration au Bouddha, parfois paroxystique) et furyû-odori frénétique des citadins peu avant 1600 — le terme odori dénotant à chaque fois une danse vive et plutôt sautillante par opposition au mai raffiné et lent.
G
Gagaku : voir bugaku.
Geinô : le terme générique pour tout spectacle lié (au moins à son origine) au culte shinto. Honda Yasuji y distingue trois groupes : kagura pour les spectacles d’invocation aux kami en général et les prières de longue-vie ; dengaku pour les danses liées à la récolte : furyû pour celles destinées à effrayer les esprits néfastes.
Gidayû : voir bunraku.
Gigaku : les danses processionnelles, d’origine chinoise et bouddhiste, introduites au Japon dès 612. Masquées et accompagnées de musique, voire incorporant de petits spectacles édifiants ou rituels (exorcismes), elles ont influencé tous les types de spectacles dansés nés vers cette époque, des kagura au bugaku, avant de tomber an désuétude — c’est même le seul type de spectacle qui ait jamais disparu au Japon !
J
Ji-Shibai : voir kabuki.
Jôruri : voir bunraku.
Jûshi : voir shin-sarugaku.
K
Kabuki : « mascarade » ou « gesticulations », plus tard « art des chants et des danses » : après des débuts scandaleux dans la danse pure (voir onna-no-kabuki), le kabuki a trouvé sa voie vers 1670 en empruntant une bonne part de son répertoire au bunraku, son ton au kyôgen, son style gestuel au kusemai, etc. le tout assimilé au sein de l’esthétique sensuelle et excessive de la culture bourgeoise d’Edo. Le second grand théâtre classique du Japon, le kabuki a connu au fil de ses trois siècles d’existence de nombreuses modes et mutations, tantôt plus violentes (le spectaculaire style aragoto ou l’œuvre fantastique du dramaturge Nambaku), tantôt plus raffinées (dont le shin-kabuki inspiré par la psychologie réaliste du théâtre occidental), ainsi que des variantes sans nombre, rurales (te-odori, ji-shibai, etc.) ou citadines (kengeki mélodramatique et rocambolesque, voire le shimpa décadent). Plus généralement, on peut dire que, comme le Kabuki s’est inspiré de tous les genres qui l’ont précédé, il a énormément influencé tous ceux qui l’ont côtoyé où suivi, y compris le cinéma populaire, les revues de music-hall « à l’occidentale » et mème les strip-teases apparus après 1945.
Kabuki-mai : « danse kabuki » : la danse du théâtre kabuki est devenue la danse classique japonaise par excellence, se jouant également en dehors des théâtres sous mille formes locales ou historiques, avec ou sans costumes, accompagnée de divers types de musique (nagauta, airs folkloriques, etc.), au point de s’identifier au buyô
(la danse par excellence, également appelée nihon-buyô, nichibu en abrégé). Elle s’est légèrement détachée de l’emprise des danseurs de théâtre depuis que l’influence occidentale a donné naissance au shin-buyô rélormiste mais reste extrêmement soucieuse de sa tradition historique.
Kagura : « divertissement des dieux » : les danses et pantomimes religieuses offertes aux kami lors des cérémonies shinto. Remontant à la préhistoire du Japon, les kagura (on distingue mi-kagura de cour, sato-kagura villagaoises, miko-mai ou danses des vestales, des variantes pour poupées, etc.) se sont cependant toujours montrées fort sensibles à l’influence des styles dramatiques en vogue, qu’elles imitaient ou adoptaient carrément au détriment de leur nature archétypique : le bugaku et lé nô surtout ont une part importante dans le style des kagura qui se jouent aujourd’hui encore dans las paroisses.
Kamigata-mai : la danse classique japonaise telle qu’elle se pratique dans la région de Kyôto, où elle atteint son plus grand raffinement. Elle constitue, avec le kabuki-mai et la danse classique d’Okinawa, le nihon-buyô, la « danse japonaises au sens large.
Kengeki : voir kabuki.
Ko-mai, Ko-uta : voir kyôgen.
Kôüwaka-mai : voir kusemai.
Kugutsu-mawash : voir shin-sarugaku.
Kusemai : le style de danse noble, au son de l’épopée récitée ou chantée, prisé par les jeunes guerriers à partir de 1350 environ. Rapidement développé en plusieurs styles (kôwaka-mai masculin, mai-mai féminin et, plus tard, daigashira-mai dansé par des couples), il sera pratiquement éliminé par le kabuki plus brillant des années 1600, non sans que sa façon de « joindre le geste à la paroles, imitée par le sarugaku-no-nô, ait permis à celui-ci de supplanter le dengaku-no-nô (où danse et chant alternaient) lors de l’émergence du nô classique, également fort influencé par l’élégance sévère du kusemai.
Kyôgen : « folles paroles » : les farces stylisées qui occupent l’entracte des spectacles nô (les pièces elles-mêmes comportant un intermède léger dérivé du kyôgen), mais de loin antérieures à leur « complément. sérieux » : le kyôgen, encore improvisé, figurait déjà au programme du dengaku-no-nô et présente de nombreux rapports avec le sarugaku-no-nô de la même époque. Encore que dénuë aujourd’hui d’accompagnement musical, le kyôgen serait dérivé des « petites danses » ko-mai illustrant les « petites chansons » populaires ko-uta du Moyen-Age, et a marqué de son empreinte, dans le ton comme dans une partie du répertoire, l’onna-no-kabuki et le kabuki, à la création desquels ses acteurs (et actrices, à l’époque) ont participé. (Voir notre entretien avec Don Kenny)
M
Mai : voir nô.
Mi-kagura, Miko-mai : voir kagura.
Modern dance : voir sôsaku-buyô.
N
Nembutsu-odori : voir furyû.
Nichibu, nihon-buyô : voir kabuki-mai.
Ningyô-jôruri : voir bunraku.
Nô : « art » : la forme classique élaborée par Kannami (un danseur de Sarugaku-no-nd) et son fils Zeami (acteur, dramaturge abondant et théoricien génial du théâtre métaphysique) à partir de diverses formes de théâtre dansé du Moyen-Age (dengaku-no-nô, ennen‑n, certaines pièces kagura, les danses primitives des sorciers-exorciseurs bouddhistes jûshi, le kusemai, etc.). Intégrant dés son origine le théâtre comique kyôgen (ils constituent ensemble le nôgaku), le nô n’a plus guère changé par rapport à la forme que lui avaient donné sas deux fondateurs dès 1400, variant en popularité sans jamais cesser d’être le théâtre le plus prestigieux de la tradition japonaise et le prototype de la danse noble mai. Grâce à Zeami, féru d’archaïsmes de tous ordres (la langue était déjà désuète de son temps), le nô a conservé intact plus d’un élément gestuel, scénographique, musical ou spirituel relevant de la plus haute antiquité du théâtre sacré au Japon.
Nôgaku : voir ci-dessus.
Nô-mai : voir shugen-nô.
O
Odori : voir furyû.
Ookina : le personnage principal du shiki-samba, le cycle de danses rituelles des « trois vieillards », probablement lié à l’origine aux kagura et qu’on retrouve sous des formes locales très nombreuses et toutes archaïques, ainsi qu’au répertoire des théâtres artistiques : ookina, le vieillard bénéfique, est une des poupées du bunraku (où elle exécute une danse votive avant l’entrée du public dans la salle) at ouvre les représentations cérémonielles de nô, accompagné de samba-sô, l’«ookina noir », confié aux acteurs du kyôgen.
Onna-no-kabuki : « kabuki de femmes » : la danse lancée vers 1600 à Kyôto par la vestale défroquée O‑kuni, qui mélait le nembutsu-odori paroxystique, l’humour kyôgen, les danses fluryû populaires à l’époque et la prostitution. Interdit par édit en 1629, ce type de spectacle réapparait bientôt, danse par des éphèbes interdits de scène à leur tour en 1652, Le chainon manquant entre le sarugaku bouffon et le kabuki classique.
O‑ta-ue : voir dengaku.
R
Rakugo : voir yose.
S
Samba-sô : voir ookina.
Sangaku : « spectacles variés » ou sarugaku, « singeries » :divers types de divertissements populaires venus de Chine à partir de 800 et associés au culte bouddhiste. Les sangaku comportaient de petits spectacles grossiers, mais aussi des jongleries et acrobaties en tous genres, des rites d’exorcisme, du mime sacré ou profane, etc.
Sarugaku : voir ci-dessus et shin-sarugaku.
Sarugaku-no-nô : voir shin-sarugaku.
Sato-kagura : voir kagura.
Shiki-samba : voir ookina.
Shimpa : « nouvelle école » : la première « dissidence » occidentalisante du kabuki dans les dernières années du XIXème siècle. Révolutionnaire à ses débuts, le shimpa a vite été récupéré par le kabuki dont iln’est plus guère aujourd’hui qu’une province bâtarde, mélodramatique à souhait, petite-bourgeoise en tout — encore que moins décadent par rapport au kabuki que ces autres styles populistes (et aujourd’hui en voie d’extinction) que sont le shin-kokugeki et le taishû-engeki, entre autres formes faubouriennes, grossières et larmoyantes.
Shin-buyô : voir Kabuki-mai.
Shingeki : « nouveau théâtres » : le théâtre occidental (réalisme russe d’abord, méthode Stanislavsky, puis distanciation brechtienne, nette influence de Beckett et lonesco plus récemment) acclimaté
presque tel quel par des acteurs de gauche, férocement auto-gestionnaires et souvent en butte à la répression plus ou moins ouverte. Lancé dans les premières années du XXème siècle, le shingeki a connu une nouvelle jeunesse immédiatement après la guerre mais souffre aujourd’hui de ses Choix « artifciels » face à la mode de l’authenticité japonaise incarnée, au théâtre, par le shô-gekijô. (Voir la fin de notre entretien avec Oida Yoshio)
Shin-kabuki : voir kabuki.
Shin-kokugeki : voir Shimpa.
Shin-sarugaku : « Nouveau Sarugakus », Où Simplement sarugaku : le sangaku tel qu’il refleurit, peu après l’an 1000, en ayant tout oublié ou presque de ses origines : s’y côtoient les acteurs comiques qui donneront plus tard le Sarugaku-no-nû (l’ancêtre direct du né), les jûshi (moines, exorciseurs, charlatans et danseurs), les biwa-hôshi (souvent faux moines mais vrais aveugles, Chantant en s’accompagnant au luth biwa la geste épique des Heike, dont naitra plus tard le genre jôruri) et les kugutsu-mawashi (montreurs de poupées, ancêtres des grands marionnettistes du bunraku), parmi toute une faune de jongleurs, funambules, herboristes st autres montreurs d’animaux.
Shishi-mai : voir furyû, shugen-nô.
Shô-gekijô : « petit théâtres » : le théâtre expérimental (on dit aussi aban-garudo :avant-garde) né en réaction contre le shingeki sous l’impulsion de la contestation étudiante des années ‘60 (voir le texte de Donald Ritchie).
Shugen-nô : « art du shugen, le culte des montagnes » : les drames dansés (pièces comiques ou guerrières) des ascètes des montagnes, signalés dès les années 1350 dans le sillage des styles liés au bouddhisme (sarugaku-no-nô, ennen, etc). L’apogée du nû repoussera ces yama-bushi dans les provinces reculées, où leur art périclite à mesure que la secte vire vers la sorcellerie profane. Ce sont surtout les paysans, leurs voisins, qui dansent aujourd’hui les vestiges de leur art sacré (sous les noms de yamabushi kagura, bangaku, shishi-mai ou nô-mai selon les localités) progressivement assimilé aux kagura.
Sôsaku-buyô ou sôsaku nichibu : la danse expressionniste allemande, acclimatée au Japon d’avant-guerre par des danseurs dont la plupart ont ensuite viré vers la modern dance à l’américaine, voire (c’est le cas d’Oono Kazuo, le fondateur du but) vers d’autres formes de danse peu ou prou inspirées par l’Occident.
T
Taishü-engeki : voir shimpa.
Ta-asobi, ta-mai : voir dengaku.
Taiko-odori : voir furyû.
Te-odori : voir kabuki.
W
Wakashû-kabuki : le kabuki des éphèbes, brève résurgence de l’onna-no-kabuki avant la seconde interdiction du genre en 1652.
Y
Yamabushi-kagura : voir shugen-nô.
Yose : le music-hall typique de l’ère Edo à Tokyo, regroupant diverses disciplines artistiques populaires, dont l’étonnant rakugo, l’art des conteurs comiques qui, tout en reprenant certains canevas au kyôgen, ont poussé depuis les années 1800 la technique du calembour à un sommet que seule la langue japonaise pouvait permettre. Le dernier avatar des antiques « spectacles divers », revus par l’esthétique sensuelle et flamboyante du kabuki.