Pierre Laroche est metteur en scène et comédien. Il a monté COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS au Rideau de Bruxelles en 1984 puis deux ans après, en néerlandais. au Théâtre Royal Flamand. Il va interpréter le rôle d’Adrien dans la pièce LE RETOUR A DÉSERT qui sera montée au Rideau de Bruxelles en 1991.
Serge Saada : Dans quelles circonstances avez-vous monté COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS ?
Pierre Laroche : En 1984 Claude Etienne m’a fait lire la pièce. j’ai eu le coup de foudre et Claude a été d’accord pour que je la monte au Rideau de Bruxelles. Deux ans après je l’ai montée en néerlandais au Théâtre Royal Flamand à Bruxelles.
La première fois que j’ai monté COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS j’ai cru percevoir qu’il ne fallait pas donner la première ou seule importance à la situation, au contexte qui présente des Noirs et des Blancs dans un chantier au coeur de l’Afrique.
La pièce a d’autres ambitions que d’être une restitution réaliste des choses même si les observations de Koltès sont très subtiles et très concrètes. D’ailleurs Mircéa Marosin, le décorateur roumain avec qui je travaillais, avait déjà la volonté de symboliser le lieu, de le traiter comme un lieu dont les éléments réalistes se meuvent. Mon premier pas vers l’univers de Koltès allait dans ce sens mais je n’avais fait qu’une partie du chemin et cela a doublé mon envie de dire oui quand on m’a à nouveau proposé de monter la pièce ; entre temps j’avais fait la connaissance de Koltès et l’ayant écouté je me devais de refaire le chemin.
À présent en relisant la pièce, je me souviens que Koltès parlait volontiers de métaphore quand il parlait de son théâtre. Dès lors, si j’avais un jour à remonter la pièce, je ne suis pas sûr que j’y mettrais un décor. Je me demande si ces soliloques désespérés, où les velléités de dialogues s’avèrent très vite des utopies, ne se suffisent pas sur le plan de la force dramatique. Les mots de ces personnages — qui cherchent désespérément une porte de sortie et qui croient de manière utopique la trouver — sont si forts que l’espace vide dont parle Peter Brook devrait suffire.
S.SA. : Les mots seraient une présence suffisante, investis d’une puissance évocatrice ?
P.L. : Oui, d’ailleurs l’idée à laquelle Koltès revenait volontiers, celle d’une écriture métaphorique, est demeurée essentielle dans ses autres pièces.