Un secret ne doit pas être dit

Un secret ne doit pas être dit

Entretien avec Simon Werle

Le 10 Sep 1995
COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, mise en scène Miguel Narros, Madrid, avril 1990
COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, mise en scène Miguel Narros, Madrid, avril 1990

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COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, mise en scène Miguel Narros, Madrid, avril 1990
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Simon Wer­le est écrivain et tra­duc­teur. Il a traduit en alle­mand L’HERITAGE, DES VOIX SOURDES, LA NUIT JUSTE AVANT LES FORÊTS, COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, DANS LA SOLITUDE DES CHAMPS DE COTON, LE RETOUR AU DÉSERT ET ROBERTO ZUCCO.

Il est égale­ment l’au­teur de tra­duc­tions ver­si­fiées de qua­tre tragédies de Racine et du TARTUFFE. Sa ver­sion de PHÈDRE a été créée dans une mise en scène de Peter Stein en 1987.

Anne-Françoise Ben­hamou : Com­ment avez-vous été amené à traduire en alle­mand, après PHÈDRE de Racine, le théâtre de Koltés ?

Simon Wer­le : La pre­mière pièce que j’aie traduite, c’est DANS LA SOLITUDE DES CHAMPS DE COTON. C’é­taient mes débuts de tra­duc­teur de théâtre. PHÈDRE n’avait pas eu encore de reten­tisse­ment. Je n’é­tais pas spé­cial­isé en théâtre — avant, j’avais traduit Vic­tor Segalen et Michel Leiris — mais j’avais envie de con­tin­uer. Et j’ai vu, dans un tout petit théâtre de Munich, par hasard, une représen­ta­tion de COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, mis en scène par Gun­nar Klat­ten­hoff. Quelques années après, j’ai fait une nou­velle tra­duc­tion de la pièce. Mais j’avais été frap­pé, dès cette pre­mière ren­con­tre, par la force sin­gulière du texte.

Ce qui m’at­ti­rait, dans COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, C’est juste­ment ce prob­lème de l’in­traduis­i­ble, avec la présence de la langue ouolof ; c’est cette façon d’amen­er en scène un univers vrai­ment incon­nu, tout à fait incom­préhen­si­ble pour des Européens — un monde qui tourne autour d’une force secrète, comme, dans COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS, ce nom secret du mort qui est tou­jours présent sans être jamais révélé.

Je voy­ais là une mytholo­gie qui ne rel­e­vait pas d’un « compte ren­du » de la part de l’au­teur, mais qui avait une effi­cac­ité et offrait des per­spec­tives véri­ta­ble­ment dif­férentes de celles des Blancs.

Dans cette pièce, il y a déjà un découpage assez net entre des pas­sages plutôt « nat­u­ral­istes » — Léone par­lant de ses chaus­sures — et une parole dont le statut est autre, comme cette tirade d’Al­boury sur les gens séparés du soleil par un petit nuage — avec ce mythe de la cohé­sion de la race noire.

A.F. B. : Com­ment ren­dez-vous compte de ce partage en traduisant ?

S. W. : Je tente avant tout de saisir le rythme des phras­es ; la phrase est mon unité de tra­duc­tion, au risque par­fois de per­dre de vue la pièce dans son ensem­ble, ou même une scène… Mais c’est un moyen de rester très près des microstruc­tures ; j’é­coute les réso­nances des mots français et celles des mots alle­mands pour voir si elles ne « jurent » pas — ce qui arrive sou­vent. Je fais beau­coup de ver­sions, puis j’opère un tri. Mon tra­vail con­cerne moins une com­préhen­sion dra­maturgique que ces choix qui visent à élim­in­er les inter­férences et à recréer une cer­taine musique que je crois enten­dre. Et il y a là le risque de sen­tir un rythme par­ti­c­uli­er là où il n’ex­iste pas, un rythme qui pour­rait être naturel à la langue française, bien que moi, je le croie exo­tique.

A.F. B. : DANS LA SOLITUDE DES CHAMPS DE COTON est un texte plus « homogène » que COMBAT DE NÈGRE.

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Anne-Françoise Benhamou
Anne-Françoise Benhamou est professeure en Études théâtrales à l’ENS-PSL et dramaturge.Plus d'info
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