Les bancs de poissons du Théâtre de la Bastille

Entretien
Théâtre

Les bancs de poissons du Théâtre de la Bastille

Le 23 Nov 2019
Clément Goupille, Sabrina Delarue, Anne Reymann, Etienne Fague et Erik Gerken dans Roses. Conception, mise en scène et scénographie Nathalie Béasse. Théâtre de la Bastille, 2015. Photo Wilfied Thierry.

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Clément Goupille, Sabrina Delarue, Anne Reymann, Etienne Fague et Erik Gerken dans Roses. Conception, mise en scène et scénographie Nathalie Béasse. Théâtre de la Bastille, 2015. Photo Wilfied Thierry.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 139 - Nos alternatives
139

Dans les bancs de pois­sons, il n’y a pas de sar­dine en chef ! Depuis une dizaine d’années, des physi­ciens inter­ro­gent ce phénomène de com­porte­ment col­lec­tif. Qu’en est-il des col­lec­tifs artis­tiques ? Qu’est-ce qui pousse des artistes à penser, imag­in­er, créer col­lec­tive­ment ?

Les hypothès­es de réponse sont mul­ti­ples :
– Remise en cause de la hiérar­chie au sein même du proces­sus créatif.
– Abo­li­tion des fron­tières entre la place de l’interprète et la place du metteur(se) en scène.
– Inven­tion de sa « place » et non pas assig­na­tion à une place.
– Désir d’un engage­ment artis­tique et poli­tique autre.
Quelque chose s’invente là.1
        Géral­dine Chail­lou

SML
On a cou­tume de voir des créa­tions pro­posées par des col­lec­tifs, français et belges notam­ment, fla­mands sou­vent, ici même au Théâtre de la Bastille. Dans ce numéro con­sacré aux alter­na­tives théâ­trales depuis quar­ante ans, nous for­mu­lons l’hypothèse que la fab­rique de spec­ta­cles en col­lec­tif est une des grandes formes d’alternatives théâ­trales con­tem­po­raines… Quelles sont les vôtres ?

JEAN-MARIE HORDÉ Sur cette ques­tion, je com­mencerai par écouter le mot. Dans alter­na­tive, il y a alter, c’est-à-dire l’autre. Si l’on pré­tend représen­ter une alter­na­tive, il faut être sûr que nous sommes vrai­ment un ou une autre, par rap­port au con­texte dans lequel on tra­vaille. Pour nous, c’est un con­texte parisien. Est-on sûrs de faire une autre propo­si­tion, au sens ontologique du terme ? De temps en temps, on y parvient…

GÉRALDINE CHAILLOU  Cette ques­tion est com­pliquée. On ne peut pas se définir comme un théâtre alter­natif. Ce serait faux, ou alors cela sig­ni­fie que nous sommes un théâtre alter­natif insti­tu­tion­nal­isé ? Je pense plutôt qu’on pro­pose des alter­na­tives théâ­trales, dans un paysage parisien, très vaste et très var­ié, dans un con­texte où il y a une homogénéi­sa­tion des propo­si­tions. De ce point de vue-là en effet, nous ten­tons une alter­na­tive artis­tique, nous ouvrons des chemins moins bal­isés et moins aisés…

JMH En tout cas, on essaie d’être alter­nat­ifs sur tous les plans, poli­tique, économique – artis­tique sou­vent. Comme le dit Géral­dine, nous sommes « alter­nat­ifs à l’intérieur de l’institution », puisque l’on reçoit des sub­ven­tions de l’État et de la Ville.

SML
Vous vous souciez autant des formes artis­tiques que des modal­ités d’accueil, de finance­ment et de ren­con­tre avec le pub­lic ?

JMH Absol­u­ment. Con­traire­ment à la plu­part des théâtres parisiens, notre poli­tique économique est au ser­vice des com­pag­nies : nous faisons des con­trats de copro­duc­tion ou de ces­sion, et pas un sim­ple partage de recettes. Sur le ter­rain poli­tique, le Théâtre de la Bastille reste un théâtre indépen­dant, à savoir une société privée qui reçoit des sub­ven­tions, tout en réal­isant un tra­vail de théâtre pub­lic avec une grande atten­tion à la rela­tion aux publics, à l’action cul­turelle… Nous sommes indépen­dants. Sur le plan artis­tique, nous faisons atten­tion à ne pas être dans la répéti­tion.

GC Il est dif­fi­cile de définir une ligne artis­tique, mais je peux dire que tous les objets sin­guliers que nous invi­tons, inter­ro­gent à leur manière la représen­ta­tion. Cela car­ac­térise notre ancrage artis­tique.

SML
Vous accueillez toutes sortes de formes théâ­trales, choré­graphiques, textuelles, visuelles…, des poèmes scéniques poly­mor­phes ?

GC Oui, il y a autant de textes de réper­toire revis­ités que de textes d’auteures et d’auteurs con­tem­po­rains (Tia­go Rodrigues, Céline Champinot, Flo­rence Min­der, David Gesel­son Bap­tiste Amann…), des écri­t­ures de plateau – d’ailleurs explorées par toute une vague de col­lec­tifs –, et puis évidem­ment la danse con­tem­po­raine et d’autre propo­si­tions qui emprun­tent aux arts plas­tiques (Pierre Meu­nier, Nathalie Béasse…).

SML
J’entends bien que vous n’êtes pas à pro­pre­ment par­ler un lieu alter­natif mais plutôt un théâtre indépen­dant, ouvert aux alter­na­tives théâ­trales. Quelles sont les vôtres ? Je pense aux chocs esthé­tiques mar­quants, aux trem­ble­ments de terre artis­tiques qui ont fait évoluer les codes de la représen­ta­tion, aux « sin­gulières méta­mor­phoses » évo­quées par Jacques Nichet dans sa Leçon inau­gu­rale au Col­lège de France.

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Géraldine Chaillou
Jean-Marie Hordé
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Sylvie Martin-Lahmani
Professeure associée à la Sorbonne Nouvelle, Sylvie Martin-Lahmani s’intéresse à toutes les formes scéniques contemporaines....Plus d'info
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