L’imagerie quantique : impressions et réflexions autour de COPENHAGEN

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Réflexion

L’imagerie quantique : impressions et réflexions autour de COPENHAGEN

Le 15 Déc 2009
Sarah Kestelman, David Burke et Mathew Marsh dans COPENHAGEN de Michael Frayn, mise en scène de Michael Blakemore, National Theatre, Londres, 1998. Photo Conrad Blakemore.
Sarah Kestelman, David Burke et Mathew Marsh dans COPENHAGEN de Michael Frayn, mise en scène de Michael Blakemore, National Theatre, Londres, 1998. Photo Conrad Blakemore.

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Sarah Kestelman, David Burke et Mathew Marsh dans COPENHAGEN de Michael Frayn, mise en scène de Michael Blakemore, National Theatre, Londres, 1998. Photo Conrad Blakemore.
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Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 102-103 - Côté Sciences
102 – 103

LE TRAVAIL de Michael Frayn me fascine depuis fort longtemps. Aus­si, lorsque la coor­di­na­trice m’a demandé de lui faire part de mes impres­sions de spé­cial­iste de la physique quan­tique sur sa pièce COPENHAGEN, j’ai aus­sitôt accep­té. Ma vision de la pièce se fonde sur le texte et sa pre­mière mise en scène au Nation­al The­atre en 1998, ain­si que sur ma lec­ture de CONSTRUCTIONS (1974) et de THE HUMAN TOUCH (2006), deux ouvrages méta­physiques éton­nants dans lesquels Michael Frayn explore en détail cer­taines des ques­tions soulevées dans la pièce et por­tant sur les réc­its, le savoir, les moti­va­tions des hommes et leurs liens éventuels avec la physique fon­da­men­tale.

On s’est beau­coup inter­rogé pour savoir si COPENHAGEN respec­tait les faits his­toriques. N’étant pas com­pé­tent pour en juger, mon appré­ci­a­tion de la pièce repose sur des critères moins stricts : est-ce que les per­son­nages de Frayn, leurs dia­logues et les moti­va­tions qu’on leur prête étab­lis­sent des cor­réla­tions intéres­santes — un adepte de la physique quan­tique par­lerait de pro­duit interne sig­ni­fi­catif — avec la réal­ité his­torique et psy­chologique. De ce point de vue, la pièce est une par­faite réus­site. Frayn ne se trompe jamais sur les détails tech­niques, il repro­duit à mer­veille la façon de penser et de par­ler des physi­ciens et nous présente des ver­sions tout à fait crédi­bles de Heisen­berg et de Niels et Mar­grethe Bohr.

Frayn nous racon­te son his­toire comme une série d’«ébauches », de réc­its hypothé­tiques et apparem­ment incom­pat­i­bles. Au cœur et autour de ces ébauch­es, évolu­ent de nom­breuses images et métaphores tirées de la physique quan­tique – en par­ti­c­uli­er le principe de com­plé­men­tar­ité de Bohr et le principe d’incertitude de Heisen­berg. Il s’agit là d’analogies ludiques, qui font allu­sion à des spécu­la­tions sur des con­nex­ions plus pro­fondes, et cer­tains pour­raient même y voir un mes­sage de la sci­ence nous enseignant que les par­tic­ules élé­men­taires comme les êtres humains résis­tent néces­saire­ment à toute analyse plus poussée.

Mais je pense qu’il faut résis­ter à cette dernière lec­ture. Les post­mod­ernistes et les rel­a­tivistes his­toriques ont, il est vrai, sou­vent fait appel aux théories quan­tiques pour étay­er leur dis­cours. Car il ne faut pas oubli­er que l’une des for­mu­la­tions les plus belles et les plus pro­fondes de la physique quan­tique con­siste à décrire l’évolution des états dans le temps comme le résul­tat col­lec­tif d’une somme sur toutes les his­toires pos­si­bles. Il faut rap­pel­er égale­ment que la déf­i­ni­tion et la jus­ti­fi­ca­tion du con­cept de passé non ambigu reste un prob­lème pro­fond non résolu dans la cos­molo­gie quan­tique mod­erne. Pour­tant, les physi­ciens se deman­dent com­ment on peut raisonnable­ment utilis­er — et cer­tains diront même extrapol­er sauvage­ment — les principes d’une théorie sci­en­tifique pour défendre une vision du monde rad­i­cale­ment anti-sci­en­tifique.

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Michael Frayn
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Adrian Kent
Adrian Kent est maître de conférence en physique quantique au département de mathématique appliquée et...Plus d'info
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