Ce zoo imaginaire qui nous grignote le crâne…

Ce zoo imaginaire qui nous grignote le crâne…

Le 10 Juil 1982
Le zoo imaginaire - Jean-Vincent Lombard dans son "zoo" - Nouveau théâtre de Bourgogne - Photo Gérard Cerles
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Article publié pour le numéro
Scénographie images et lieux-Couverture du Numéro 12 d'Alternatives ThéâtralesScénographie images et lieux-Couverture du Numéro 12 d'Alternatives Théâtrales
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Le pein­tre a 35 ans. Son nom : Jean-Vin­cent Lom­bard. Après des études aux Beaux-Arts de Macon, il com­mence à traduire sa façon d’être au monde, aujour­d’hui, en 1970, aujour­d’hui en 1977, aujour­d’hui en 1982. Etre de ce monde, l’in­ter­roger comme un damné, met­tre à nu le réel, tra­quer l’in­ten­sité à vivre jusque dans l’in­stant ultime, saisir le pre­mier souf­fle, le dernier peut-être, au fin fond, celui qui vous pro­jette à nou­veau dans une puis­sance à vivre, une con­science à vivre…

Par­al­lèle­ment à sa démarche de pein­tre, J.V.L. conçoit les décors et les cos­tumes des spec­ta­cles du théâtre de Bour­gogne à Dijon, ceux de Dimanche et de L’en­traîne­ment du cham­pi­on avant la course de Michel Deutsch ; Flaubert (L’Aquar­i­um); Loin d’Hagon­dan­ge de J.P. Wen­zel par le Théâtre du Graf­fi­ti ; Dou­blages de J.P. Wen­zel. En décem­bre 80, il réalise Le Zoo imag­i­naire, une créa­tion plas­tique mon­u­men­tale qu’il pro­longe en 82 par Le Zoo Urbain : (Stu­dio Théâtre-image), une expéri­ence un peu « hors du com­mun », des­tinée à inté­gr­er au « zoo », matière morte, une « matière vivarte », un groupe de gens et leurs images, leurs bribes de mémoires, leurs débor­de­ments écrits, impro­visés, visu­al­isés. Une mise en scène et en mou­ve­ment d’un tra­vail de pein­tre. Une ren­con­tre pos­si­ble entre la dynamique du théâtre et celle de la pein­ture.

Jean-Vin­cent Lom­bard : « La dif­férence s’im­pose immé­di­ate­ment. La pein­ture est une pra­tique soli­taire alors que la scéno­gra­phie est une aven­ture avec des gens, leur vécu ; cette con­fronta­tion-là me plaît. Dans le tra­vail de théâtre, il y a plus de don­nées qui entrent en jeu. Le pein­tre pro­pose alors un matéri­au-image qui doit s’in­scrire dans une pra­tique col­lec­tive. La scéno­gra­phie est un traite­ment par­ti­c­uli­er de l’im­age, pro­pre à l’e­space, qui doit fonc­tion­ner avec le dis­cours d’une mise en scène. De plus en plus la dra­maturgie de la scéno­gra­phie rem­place l’im­age unique. Pour un pein­tre qui tra­vaille au théâtre, il n’y a rien à per­dre ou à gag­n­er mais des inter­ac­tions con­stantes entre les deux pra­tiques. Quand on tra­vaille sur un espace intéres­sant, il y a des pro­longe­ments, des ren­vois sur la pra­tique de pein­tre. Je ne conçois pas la pein­ture comme un objet ter­miné, un état final, mais une série d’é­tapes, même s’il y a chaque fois des choses très fouil­lées. C’est la même chose pour le théâtre. On a besoin de por­tions de flou sur lesquelles on peut inve­stir son pro­pre instan­ta­né. Ce qui est impor­tant pour moi c’est de pou­voir retrou­ver une démarche per­son­nelle de pein­tre dans un tra­vail de scéno­gra­phie. Je n’ai pas de vérités, de mes­sages mais des inter­ro­ga­tions sen­si­bles. Ça déter­mine une cer­taine façon de voir les choses. C’est pourquoi je procède par ellipses, par énigmes, par frag­ments. Ce qui me préoc­cupe c’est le bord des choses, des instants, partout où il y a une taille. Ça se traduit dans le thème ou dans la fac­ture de la pein­ture. Des parts de non-dits. Eviter les états de faits, c’est un fonc­tion­nement for­cé­ment mobile. La con­stante c’est ce qui con­cerne le monde d’au­jour­d’hui, les moments de vio­lence blanche, d’ex­trême inten­sité. Dans le tra­vail de la pein­ture il y a un rap­port à l’in­time qui se perd dans le tra­vail scéno­graphique. Ce qui m’in­téresse, ce sont les images qui ont des échap­pées, la latence des choses. Le théâtre est une matière ouverte, con­stam­ment en pro­jec­tions sen­si­bles. La pein­ture exige que le spec­ta­teur existe ou pas. Mon tra­vail sur les frag­ments est soit un thème soit une con­stante qui se retrou­ve dans mon tra­vail scéno­graphique. »

La pein­ture : les séries sur 10 ans

Les dernières et avant-dernière ban­des (1976/1977)

Recherche à par­tir de la lec­ture de faits divers lus dans Détec­tive. « 12 énigmes irra­tionnelles. Un dés­espoir du vide, une logique du vide ». Comme une série de ban­des dess­inées où le rouge sang domine. Mor­celle­ment des images, des gros-plans. La vio­lence est directe, immé­di­ate, « la mort lente de chaque jour » bribes de vie « mon­tées » les unes à côté des autres sans lien appar­ent.

Les titres ou plutôt les inter-titres de Détec­tive devien­dront les titres des toiles : Devant la télévi­sion, Tar­dive décou­verte, Cou­ple à la dérive, Etranges absences, Argu­ment infail­li­ble, Prom­e­nade cham­pêtre, Dans le piège, cette recherche se traduit aus­si sur le plan du théâtre par un immense pan­neau mur­al ser­vant de décor à La dernière décade, spec­ta­cle du Théâtre de Bour­gogne mis en scène pas Alain Mergnat (Juin 77).

Dix-sept heures trente et après...

Jean-Vin­cent Lom­bard aboutit sa recherche sur la « bande dess­inée » il s’en dégage et arrive à l’im­age unique, une mise en scène des signes raré­fiés jusqu’à laver l’im­age de « ce four­mille­ment de choses que con­stitue le réel » (JVL) « une manière d’oblig­er le regard », de le capter, de le « puri­fi­er » en choi­sis­sant des « images dérisoires, sim­ples, sim­plistes ».

Sur fond de car­relages de salle de bains, cette « série » pro­pose un autre rap­port à la vio­lence, plus indi­rect, moins lis­i­ble. La vio­lence est dans l’imag­i­naire pro­jeté sur l’im­age et pas l’im­age elle-même. L’im­age sug­gère un drame pos­si­ble mais sans le dévoil­er, sans le « représen­ter ».

Dix-sept heures trente…
(Jeune femme)

Elle dort le corps ren­ver­sé sur le car­relage froid, les jambes entrou­vertes… c’est l’été.. avant l’or­age peut-être ; on cherche un con­tact froid… le linge blanc, peut être anec­do­tique, tout peut ici représen­ter un apaise­ment et pour­tant en forçant un moment le regard, un malaise… on ne peut pas s’empêcher de penser que le linge cache une plaie, un drame… dessous… sous ce som­meil, ce calme appar­ent, une ago­nie peut-être, la mort.. mais ce n’est pas sûr…

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