Avancer
Non classé

Avancer

Entretien avec Marek Kalita

Le 16 Oct 2011
 Marek Kalita dans Fin d'après Franz Kafka, Bernard-Marie Koltès, J. M. Coetzee. Nowy Teatr, Varsovie, 2010. Photo Magda Hueckel.
 Marek Kalita dans Fin d'après Franz Kafka, Bernard-Marie Koltès, J. M. Coetzee. Nowy Teatr, Varsovie, 2010. Photo Magda Hueckel.
 Marek Kalita dans Fin d'après Franz Kafka, Bernard-Marie Koltès, J. M. Coetzee. Nowy Teatr, Varsovie, 2010. Photo Magda Hueckel.
 Marek Kalita dans Fin d'après Franz Kafka, Bernard-Marie Koltès, J. M. Coetzee. Nowy Teatr, Varsovie, 2010. Photo Magda Hueckel.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 110-111 - Krzysztof Warlikowski - Fuir le théâtre
110 – 111
Article fraîchement numérisée
Cet article rejoint tout juste nos archives. Notre équipe le relit actuellement pour vous offrir la même qualité que nos éditions papier. Pour soutenir ce travail minutieux, offrez-nous un café ☕

Ewa Hevelke : Être acteur chez War­likows­ki est-ce sans dan­ger ?

Marek Kali­ta : Le théâtre de War­likows­ki n’est pas la vie : on puise dans la vie mais on ne la trans­porte pas sur scène. Sans doute, de l’ex­térieur a‑t-on l’im­pres­sion d’un mélange de ces deux mon­des, mais en réal­ité c’est com­plète­ment dif­férent. War­likows­ki respecte les acteurs comme indi­vidus. Il respecte leur vie per­son­nelle, leur temps, leur human­ité. Ce qui nous lie, je l’ap­pellerai plutôt une ami­tié artis­tique. Bien que ce soit plutôt une voie com­mune qu’une ami­tié. Je ne ressens pas de men­ace dans ma rela­tion avec Krzysztof. Ce n’est pas un met­teur en scène qui dis­pose de moi. C’est moi qui dois inven­ter quelque chose, c’est moi qui dois me créer un per­son­nage.

E.H.: Et lui l’ac­cepte.…

M.K.: Ou non, mais c’est une sorte de con­ver­sa­tion. Il me sem­ble qu’il a l’in­tu­ition qui lui per­met de trou­ver le ton adéquat du per­son­nage, il en extrait l’in­di­vidu.

E.H.: Et que se passe-t-il alors ?

M.K.: Rien. Il reste ce qui reste : l’essence.

E.H.: Et la folie dans le théâtre de War­likows­ki ?

M.K.: Krzysztof est très émo­tion­nel et il par­ticipe à égal­ité avec les acteurs au proces­sus de créa­tion. Ce n’est pas un met­teur en scène capa­ble d’être méchant, désagréable, qui stresse les acteurs en s’ap­puyant sur leurs émo­tions per­son­nelles ; bien au con­traire, il est très sen­si­ble et déli­cat pour les acteurs, par­fois trop déli­cat. Il devrait être plus exigeant — moi tout au moins, je souhait­erais qu’il le soit. Et la folie est inscrite dans les per­son­nages. Il faut seule­ment savoir l’en extraire — c’est ça le tra­vail ; quand je ren­tre à la mai­son, je fais le fou avec ma fille mais d’une autre manière.

E.H.: Vous êtes l’in­stru­ment de quelqu’un qui racon­te son autobiographie?On pour­ra, un jour, regarder les spec­ta­cles de War­likows­ki et écrire un por­trait de l’artiste, faire sa psy­ch­analyse ?

M.K.: Je n’i­rai pas jusqu’à une telle affir­ma­tion. C’est tout sim­ple­ment une per­son­nal­ité qui regroupe autour d’elle beau­coup de gens. Et le tra­vail est une sorte de parte­nar­i­at. Je pense que c’est la déf­i­ni­tion la plus com­plète de son théâtre. Quelque chose qui éveille, qui ne ferme pas. La car­ac­téris­tique de War­likows­ki, c’est l’ou­ver­ture. Ce n’est pas un met­teur en scène qui « tout sim­ple­ment, sait ». Krzysztof accepte les idées des autres. Tous pren­nent la respon­s­abil­ité pour ce qui est mon­tré sur la scène, même si War­likows­ki prend la déci­sion finale.

E.H.: Les gens lui don­nent-ils le droit à l’er­reur ou War­likows­ki n’a-t-il plus le droit de se tromper ? Vous lui don­nez un tel droit ?

M.K.: Oui, bien évidem­ment. On erre tou­jours au théâtre, on touche des choses com­plète­ment immatérielles. Ce sont des règles insai­siss­ables et dépen­dantes de nom­breux fac­teurs. Si le spec­ta­cle com­porte beau­coup de per­son­nages où jouent de fortes per­son­nal­ités, obtenir une énergie com­mune demande un énorme effort. C’est autre chose dans des formes théâ­trales plus fer­mées, mais Krzysztof ne les pra­tique pas.

E.H.: Y at-il un rôle dont vous ne partagiez pas la vision ?

M.K.: Cela ne con­siste pas à être d’ac­cord ou pas. Le tra­vail au théâtre, con­traire­ment au ciné­ma, reste ouvert. Au cours des répéti­tions, nous par­venons à une cer­taine con­clu­sion et ensuite. Je tente de ne pas me sou­venir de ce qui a été, afin d’être ouvert à ce qui va se pro­duire. C’est là-dessus que je me con­cen­tre, évidem­ment en me ten­ant à cer­tains principes.

E.H.: Et dans quelle direc­tion tend le théâtre de War­likows­ki ?

M.K.: « L’im­por­tant, c’est d’a­vancer » a dit un jour Krzysztof Kies­lows­ki, mais dans quelle direc­tion ? Je pense qu’il faut observ­er ce qui se passe, la vie vous pro­pose les thèmes. Nowy Teatr est au début de ses recherch­es.

Traduit par Marie-Thérèse Vido-Rzewus­ka.

Ce texte a été pub­lié en polon­ais dans la revue Notat­nik Teatral­ny.

Non classé
2
Partager
auteur
Écrit par Ewa Hevelke
Ewa Hevelke a étudié au département d’études théâtrales de l’Académie théâtrale de Varso­vie. Elle à tra­vaillé à l’In­sti­tut...Plus d'info
Partagez vos réflexions...

Vous aimez nous lire ?

Aidez-nous à continuer l’aventure.

Votre soutien nous permet de poursuivre notre mission : financer nos auteur·ices, numériser nos archives, développer notre plateforme et maintenir notre indépendance éditoriale.
Chaque don compte pour faire vivre cette passion commune du théâtre.
Nous soutenir
Précédent
Suivant
Article publié
dans le numéro
Couverture du numéro 110-111 - Krzysztof Warlikowski - Fuir le théâtre
#110 – 111
mai 2025

Krzysztof Warlikowski, Fuir le théâtre

17 Oct 2011 — Aneta Glowacka: Comment les acteurs se débrouillent-ils avec le metteur en scène? Vous arrive-t-il de vous révolter ou de demander…

Ane­ta Glowac­ka : Com­ment les acteurs se débrouil­lent-ils avec le met­teur en scène ? Vous arrive-t-il de vous révolter ou…

Par Aneta Glowacka
Précédent
15 Oct 2011 — Alicja Binder: En 2006, Krzysztof Warlikowski a mis en scène à l'Opéra national de Paris Iphigénie en Tauride de Christophe…

Alic­ja Binder : En 2006, Krzysztof War­likows­ki a mis en scène à l’Opéra nation­al de Paris Iphigénie en Tau­ride de Christophe Willibald Gluck où tu chan­tais le rôle-titre. La par­tic­i­pa­tion de War­likows­ki à ce pro­jet était…

Par Alicja Binder
La rédaction vous propose

Bonjour

Vous n'avez pas de compte?
Découvrez nos
formules d'abonnements

Mot de passe oublié ?
Mon panier
0
Ajouter un code promo
Sous-total