Kitt Johnson. À en perdre le Nord.
Danse
Théâtre
Parole d’artiste

Kitt Johnson. À en perdre le Nord.

Nicole Mossoux

Le 18 Juin 2010
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 105 - Théâtre-danse : la fusion ou rien !
105
Article fraîchement numérisée
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KITT SUR UN PLATEAU, c’est un vrai mir­a­cle. Ce n’est plus un corps, une per­son­ne, ce sont des paysages, des odeurs, des ani­maux étranges et fam­i­liers qui sem­blent pren­dre vie à par­tir de presque rien, d’un effleure­ment d’é­paule, d’un regard détourné, d’un froisse­ment de robe qui imper­cep­ti­ble­ment crée une béance, un gouf­fre réper­cuté à l’in­fi­ni dans le plisse­ment de nos yeux. Car ses lumières sont chich­es, à l’in­star des longues veil­lées de son pays, le Dane­mark, ses spec­ta­cles sont des nuits sans fin qui voilent plus que dévoilent le vivant, cet intime infra-der­mique, cette con­so­la­tion des ténèbres qui gît dans les ténèbres, une petite flamme de geste, un glisse­ment plus qu’une marche, de longs guets avant l’é­clat, l’ébloui, le déboulis. Elle con­naît la fix­a­tion tenace qui nous donne l’il­lu­sion de voir, comme quand on plonge le regard, longue­ment, dans le négatif du moulage d’un vis­age, et que, subite­ment, le posi­tif, le rond de bosse appa­raît, plein de vie, les joues qui rebondis­sent depuis le creux, la bouche qui s’ourle alors qu’elle n’é­tait qu’un sil­lon.
Dif­fi­cile de sépar­er le choré­graphique du poé­tique, quand ce petit corps tout de nerfs et d’aguets grandit sous nos yeux, quand la sor­cière gémit dans le silence des mains, qui se par­ent d’on­gles courbes, démesurés, pour rede­venir menottes graciles l’in­stant d’après.
Kitt ne doit pas dépass­er le mètre soix­ante dans le civ­il, sur scène c’est une géante, elle impres­sionne les con­tours, sa vibra­tion la démesure.

Kitt John­son pour RANKEFOD, choré­gra­phie Kitt John­son,
Fes­ti­val inter­na­tion­aldes Brigit­tines 2009.
Pho­to Per Morten Abra­ham­sen.

Et c’est dans la rareté des moyens qu’on doit, spec­ta­teur, apporter le super­flu, la redon­dance de notre pro­pre imag­i­naire : un trait don­né, et à nous les fon­dus, le colo­riage, les ren­fle­ments de la couleur, ou le rem­plis­sage des mots. Si son trait est ferme, tran­chant sou­vent, d’une pré­ci­sion red­outable, à nous les rêver­ies cré­pus­cu­laires, les déhanche­ments de la pen­sée. Un trait, un geste, presque rien et ça bas­cule, pour le plus grand plaisir de l’être.

Kitt dans la vie, c’est un ravisse­ment : douceur atten­tive, un peu appliquée, envers celle ou celui qu’elle écoute, qu’elle entend. Sourire à bras le corps, déter­mi­na­tion dans le gant, jusqu’au bout de ses pro­jets elle ira. Il en faut de la ténac­ité pour réveiller une cul­ture danoise peu encline à la mar­gin­al­ité, ni telle­ment curieuse des méan­dres, de la recherche par­al­lèle. Elle tient un axe, le tient bien, à quand sa prochaine appari­tion sur la scène des Brigit­tines ?

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Écrit par Nicole Mossoux
Danseuse et chorégraphe, Nicole Mossoux collabore depuis une dizaine d’années avec le metteur en scène Patrick Bonté. Ensemble,...Plus d'info
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