Mettre en scène Paul Emond
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Mettre en scène Paul Emond

Le 25 Juin 2004
Article publié pour le numéro
Paul Emond-Couverture du Numéro 60 d'Alternatives ThéâtralesPaul Emond-Couverture du Numéro 60 d'Alternatives Théâtrales
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METTRE EN SCÈNE une pièce de Paul Emond, c’est pren­dre en charge son humour et son univers tout à fait par­ti­c­uliers. Ses per­son­nages se con­fron­tent dans des sit­u­a­tions loufo­ques qui ont sou­vent pour point de départ une pul­sion, un mou­ve­ment, une pas­sion incon­trôlée. Chaque créa­ture de Paul Emond a quelque chose à cacher, sait que son vis-à-vis a lui aus­si quelque chose de dis­simulé et essaie de le décou­vrir. Pour y par­venir, tous les moyens ver­baux sont bons. Les affron­te­ments entre les hommes et les femmes char­ri­ent d’incroyables morceaux de haine, sou­vent soudaine et brève qu’il con­vient ensuite d’enfouir aux côtés de tout ce qui « ne peut être mon­tré ».
Paul Emond cul­tive la tau­tolo­gie, il fait dire à tous ses per­son­nages leur inquié­tude face à l’ex­is­tence, l’amour, le retard des trains, les canards domes­tiques, le prix de la viande, les traites impayées, les vacances aux Baléares, et surtout face à papa et maman.
Paul Emond décrit des êtres humains totale­ment inté­grés dans une exis­tence petite bour­geoise dont per­son­ne ne veut chang­er le fonc­tion­nement ou mod­i­fi­er ce qui l’en­toure. Ils ne peu­vent rien faire, ils sont comme ça. Lorsque l’on place ces créa­tures sur une scène de théâtre, les rôles pren­nent très rapi­de­ment de l’ampleur et de l’au­tonomie, ils com­men­cent à échap­per aux créa­teurs (comé­di­ens, met­teur en scène, auteur…). Dès lors, nous vivons dans une immense inquié­tude : qui sont ces petits bon­hommes qui nous ressem­blent telle­ment qu’ils nous font peur ?qui sont ces miroirs, ces alter ego que nous refu­sons de recon­naître ?qui sont les fan­tômes aux­quels nous avons tou­jours refusé de croire ? Les hommes et les femmes de Paul Emond cherchent une rai­son d’être, de vivre, à don­ner un but à leur exis­tence et en appel­lent au per­son­nage absent. Ils vont tou­jours s’adress­er à l’autre en rap­pelant l’ex­is­tence d’un troisième per­son­nage qu’eux seuls con­nais­sent. Leur vie se situe par rap­port à un spec­tre qui con­tin­ue à hanter leurs jours. Comme cha­cun sait que fan­tôme et fan­tasme ont la même orig­ine, il est per­mis de dire que tous les per­son­nages emon­di­ens cherchent la réal­ité du présent dans le passé, la force du verbe dans la parole per­due.
Toutes les sit­u­a­tions du théâtre de Paul Emond sont drôles, sou­vent matière à « grince­ments » mais par­fois red­outable­ment inquié­tantes quand les pro­tag­o­nistes font émerg­er leur pro­pre « autre », le dou­ble enfoui au plus pro­fond, ecto­plasme soudain sur­gi pour rap­pel­er la van­ité de l’ex­is­tence, la vacuité de l’e­spoir de laiss­er der­rière soi autre chose qu’UNE FORME DU BONHEUR. Les per­son­nages emon­di­ens ne seront jamais libres, jamais libérés ni de la société qui les aliène, ni d’eux-mêmes. et c’est ça qui est le plus drôle. 

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Écrit par Michel Tanner
Michel Tan­ner est met­teur en scène et directeur du Cen­tre Dra­ma­tique Hain­uy­er. Il a mis en scène le...Plus d'info
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Paul Emond

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