Fluff — Emmilou Rößling au Beursschouwburg le 31 janvier 2020

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Danse

Fluff — Emmilou Rößling au Beursschouwburg le 31 janvier 2020

Le 13 Fév 2020

Com­ment dire la douceur d’une plume ? C’est en cette ques­tion en apparence triv­iale que Fluff, le nou­veau seule-en-scène de la jeune artiste Berli­noise Emmilou Rößling, trou­ve son élan et sa pro­fonde vital­ité.

Présen­té le 31 jan­vi­er 2020 dans la Gouden­za­al du Beurss­chouw­burg de Brux­elles dans le cadre du Bâtard fes­ti­val, cet objet choré­graphique sur­prenant et énig­ma­tique voit son auteure déploy­er un micro­cosme autonome et sculp­tur­al avec, tour à tour, la pré­ci­sion désen­chan­tée d’une tra­vailleuse à la chaîne, la dévo­tion d’une vestale, la can­deur d’une enfant.

Sur fond d’une imposante toile blanche peinte de formes col­orées épars­es et abstraites, Emmilou Rößling tisse une choré­gra­phie pré­cise, con­tem­pla­tive, déli­cate, faisant fi du spec­tac­u­laire sans jamais cess­er d’être envoû­tante.

En guise d’introduction, la jeune artiste invite sans fard le pub­lic à s’approcher. Il est ques­tion ici d’intimité, de douceur, de la con­struc­tion d’un monde sen­si­ble duquel nous sommes invités à être les témoins.

La pre­mière des trois séquences qui com­pose cette pièce voit l’artiste se mou­voir lente­ment, dessi­nant dans l’espace une tra­jec­toire courbe et sen­suelle, s’appropriant la scène dans un mou­ve­ment de glisse­ment con­tinu, comme un éveil : prélude à la nais­sance d’un monde. Un monde que l’artiste s’attache à con­stru­ire, geste par geste, s’appuyant sur la poly­sémie de son titre pour com­pos­er une poé­tique incar­née de la douceur et du futile, comme un man­i­feste : Fluff ! En effet, ce terme anglais se réfère, dans le monde matériel, au duvet d’une plume d’oie autant qu’aux mou­tons de pous­sières qui jonchent par­fois le sol des maisons nég­ligées, recou­vrant aus­si des notions plus abstraites : la triv­i­al­ité, le diver­tisse­ment, ou encore, l’échec.

Con­stru­ire, donc. Déli­cate­ment. Com­pos­er, invo­quer, pren­dre… Pren­dre soin. Un mode opéra­toire que révèle la deux­ième séquence de la pièce, qui voit l’artiste se saisir du tas de branch­es gisant en fond de scène pour échafaud­er une sorte de nid sus­pendu, un mobile que l’artiste, une fois con­stru­it, fait tourn­er avec soin en toisant douce­ment le pub­lic du regard.

En écho à cette archi­tec­ture éphémère et aéri­enne, la troisième et ultime par­tie de la pièce voit l’artiste exé­cuter en boucle une séquence choré­graphique com­posée de gestes en apparence fam­i­liers qui ne se lais­sent jamais toute­fois pleine­ment iden­ti­fiés – une tâche ménagère ? une prière ? une caresse ? Cette phrase en forme de glos­so­lalie gestuelle opère comme un mantra kinésique, répété en boucle, longue­ment, alors que la lumière décline pro­gres­sive­ment pour plonger la scène dans une nuit déli­cate­ment rétroé­clairée jusqu’à ce que soudain, l’artiste rompe le rit­uel en plein vol, s’immobilisant tout à coup pour adress­er au pub­lic un mer­ci aus­si inat­ten­du que timide.

Ultime image qui en dit long sur la vir­tu­osité avec laque­lle Emmilou Rößling s’approprie l’exercice périlleux du seule-en scène et qui évoque le célèbre « Auto­por­trait en allé­gorie de la pein­ture » (1638) de la pein­tre ital­i­enne Artemisia Gen­tileschi : une jeune femme artiste qui s’approprie pleine­ment son médi­um, imposant libre­ment sa vision d’elle-même et de son art, loin de tout cliché.

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