POUR UNE ARTISTE qui habite et crée en Israël — pays complexe et plein de forces discordantes — mettre en scène une pièce de Howard Barker impliquait d’être à la fois capable de raconter mon histoire, et de faire une déclaration.

Barker n’est pas simplement un auteur de renom, mais également un peintre de grand calent. A mes yeux, il a la capacité extraordinaire de construire une structure dramatique forte et, en même temps, d’avoir un impact énorme grâce à l’aspect visuel contenu dans la pièce.
De ce fait, j’ai l’impression qu’il m’emmène en voyage vers des destinations lointaines — que ce soit dans l’unité de lieu ou de temps.
Habituellement l’histoire se déroule dans un autre siècle et un autre endroit ; ce qui me permet de créer l’image théâtrale, fascinante, colorée et la plus « adaptée » à la pièce en question.
Howard Barker est, en fait, un allégoriste.
Pour moi, l’allégorie — dans l’art en général et plus particulièrement au théâtre — est toujours plus par intéressante que l’analogie. Dans un siècle où la « popularité » règne (dans la vie en général et plus particulièrement dans la culture), il semblerait que ceux qui prennent les décisions aient tendance à penser que le grand public n’a pas besoin de « filtres » : qu’il faut leur servir des choses déjà mâchées et faciles à avaler, de l’analogie coute faite — et ainsi ils créent un siècle de « fast-culture »… Dans un tel siècle, les pièces de Barker sont d’autant plus stimulantes, sans parler de leur importance capitale ! Elles me permettent de me fier à nouveau à l’imagination libre, qu’il s’agisse d’esprit ou de pensée. Elles me donnent la possibilité de créer une perspective juste, ce qui, pour moi, est une donnée fondamentale pour que les choses soient significatives.
Les pièces de Barker sont loin d’être faciles à traduire en hébreu : il s’agit d’un travail difficile, laborieux et minutieux. On ne peut entamer la traduction d’une pièce qu’une fois compris son esprit, sa profondeur et ses propres objectifs.
Dans mon expérience, le processus de traduction a continué cout au long de la période de travail des répétitions ; sans cesse nous ressentions le besoin de peaufiner la traduction, afin de la rapprocher le plus possible du texte original.
Barker est comme un jongleur — utilisant les mots et les phrases comme des quilles… il passe en douceur d’une poésie véritable à l’argot de tous les jours. Le résultat est un style d’écriture complètement unique, son propre langage.
Avec une telle richesse le travail d’acteur exige, d’une part, une connaissance profonde du texte, et d’autre part, une excellente technique. Par conséquent, comme c’était le cas avec les membres de la compagnie du Khan Theatre — les comédiens l’ont considéré comme un grand défi.
Je constate avec bonheur que l’écriture de Barker se rapproche de trois auteurs dramatiques israéliens que j’aime beaucoup : Nissim Aloni, Hanoch Levin et Gil-ad Evron.
La première de « TABLEAU D’UNE EXÉCUTION » a eu lieu en Israël au début du mois de décembre 1996. C’était la première fois qu’une des pièces de Barker était montée dans un théâtre israélien, ec le public ainsi que les critiques de théâtre one très bien réagi. Nous, au Khan Theatre, espérons présenter une autre pièce de Howard Barker au cours de notre prochaine saison.

