PAUL EMOND,
démon oui,
dément, sûrement — Emond — nous les uns les autres, prêche fameux dans un fameux désert.
Première lecture à la Fabrique du Théâtre :
Ça commence — assez normalement — puis on sent monter en soi une caricature monstrueuse — vais-je la laisser faire ? — c’est tellement jouissif « qu’on se la fait » — comme un enfant, on patauge dans les flaques d’eau, en sachant qu’on va recevoir une « raclée » — ici administrée par notre metteur en scène Michel Tanner — tant pis. On passe tous les personnages de terroirs connus : la Suissesse avec les « chéris » façon Zouc ; la Bruxelloise avec les Vffes, Yffan Yvette ; la Parisienne de salon en Skaï avec les « tout de mêéêmehein ! », « ça a du bon hein ! », « c’est bien hein ! » — on rit beaucoup à voir ses camarades de jeu se démonter, à se sentir démonté soi-même.
Et l’on finit exténué par ce tourbillon, sans savoir ce qui s’est passé. S’est-il vraiment passé quelque chose ?
Aujourd’hui, au mi-temps des répétitions : Après trois semaines à la table — entendez travail à la table — nous rions toujours autant — si cela pouvait présager le rire du public.
Le comédien rit, mais son personnage s’implique de plus en plus sincèrement dans l’obsession qui l’habite — la caricature a disparu — des humains — comme vous et moi — se débattent dans leurs sentiments pour se sentir vivre. Pour s’animer — animus-animaux — mais nul écho dans leur âme : ils sont creux, « là, à l’intérieur » — le son d’une boite en fer blanc quand on met le pied dessus — grincements et autres bruits — et nous, comédiens, prenons un plaisir fou à cette chevauchée fantastique dans les méandres du grand précipice intérieur de l’homo-sapiens — déchirant — désopilant.

