L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE Scènes de mémoire pour un temps d’oubli
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L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE Scènes de mémoire pour un temps d’oubli

Le 22 Jan 2001
L'HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, mise en scène Philippe Sireuil. Photo Katina Avgouloupis.
L'HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, mise en scène Philippe Sireuil. Photo Katina Avgouloupis.

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L'HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, mise en scène Philippe Sireuil. Photo Katina Avgouloupis.
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Jean Louvet-Couverture du Numéro 69 d'Alternatives ThéâtralesJean Louvet-Couverture du Numéro 69 d'Alternatives Théâtrales
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LE TITRE à l’imparfait, L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, annonce l’en­trée en scène d’une fig­ure de per­fec­tion, d’un homme qui fut bien davan­tage qu’un fils du soleil — comme on le prê­tait à cer­tains héros mythiques de la Grèce antique —, puisque ce soleil, il l’avait dans sa poche, donc à son entière dis­po­si­tion. Qui plus est : non seule­ment cet homme avait le soleil dans sa poche, mais encore, nous appren­don, il en don­nait un morceau à cha­cun. 

Son appari­tion qua­si mag­ique a ceci de frap­pant qu’elle se pro­duisit non en un lieu de rêve, mais en un lieu d’horreur trop réel : c’é­tait à Mau­thausen, un des sin­istres camps de la mort qui ont mar­qué l’ex­plo­sion de la bar­barie dans l’Europe dite mod­erne du vingtième siè­cle. Et Jules Lahaut, héros de con­te ou de légende, lumineux autant que généreux, dis­tribuant le feu de la vie autour de lui, a bien existé. Né à Seraing en 1884, ce Belge par­tic­i­pa aux grandes luttes sociales et poli­tiques de la pre­mière moitié du siè­cle, jusqu’à devenir dans son pays une fig­ure charis­ma­tique du mou­ve­ment ouvri­er ain­si que du par­ti com­mu­niste. Son surnom n’est pas davan­tage une inven­tion de l’auteur, Jean Lou­vet. Au con­traire, ce surnom lui fut attribué par ses cama­rades de dépor­ta­tion, les meilleurs témoins de ce qu’il a été dans les pires épreuves. Un per­son­nage de la pièce, Léonce, men­tionne briève­ment que 4 450 Belges, hommes et femmes, sont « entrés » à Mau­thausen pen­dant la Sec­onde Guerre mon­di­ale, qu’ils con­nurent là « l’en­fer des baraque­ments », et que la plu­part n’en ressor­tirent pas. Lui-même, Léonce, par­lant pour beau­coup d’autres, rap­pelle Les coups de « gou­mi » reçus parce qu’il ne gravis­sait pas assez vite « les 186 march­es de la mort », ce chemin grossière­ment tail­lé dans la pente, par où les déportés devaient remon­ter les blocs d’une car­rière en con­tre­bas. Il n’y a pas de meilleure mémoire, dirait-on, que celle infligée, en quelque sorte, par la vio­lence subie. Mais ce type de mémoire aus­si com­porte ses lim­ites, atteintes avec ce qu’on a pu appel­er « la mort de l’âme ». 

La mort de l’âme se pré­parait, entre autres, dans cette « zone grise », décrite par Pri­mo Levi (cf. LES NAUFRAGÉS ET LES RESCAPÉS), où les bour­reaux du camp réus­sis­saient à com­pro­met­tre et abaiss­er morale­ment leurs vic­times. Plus générale­ment, le sen­ti­ment d’anéantissement pou­vait cul­min­er avec la honte devant le tort irrémé­di­a­ble causé à l’espèce humaine au plus pro­fond de sa sub­stance. Cette honte n’a pas man­qué de hanter les sur­vivants, chez qui elle a pu pren­dre sou­vent la forme per­ni­cieuse d’une cul­pa­bil­ité liée au fait d’avoir survécu, comme s’ils avaient, eux les sur­vivants, usurpé leur exis­tence aux dépens des dis­parus.

On se trou­ve là au plus épais des ténèbres qui régnèrent dans les camps, sin­istrement bap­tisés « l’anus du monde » par Les assas­sins de La SS. Quant à L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, il prend tout son relief sur ce fond de nuit noire. Com­ment aurait-il acquis sa répu­ta­tion s’il n’avait, à sa manière, vain­cu la mort de l’âme, tel un sur­vivant au sens le plus fort ? 

Colette Emmanuelle,
Maurice Sevenant,
François Bartels et Janine
Patrick dans L'HOMME
QUI AVAIT LE SOLEIL DANS
SA POCHE, mise en scène
Philippe Sireuil.
Photo Danièle Pierre.
Colette Emmanuelle, Mau­rice Sev­enant, François Bar­tels et Janine Patrick dans L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, mise en scène Philippe Sireuil. Pho­to Danièle Pierre.

Cela étant, la pièce de Jean Lou­vet a pour point de départ non pas la survie de Julien Lahaut dans les camps de la mort, mais son assas­si­nat ultérieur, en août 1950, dans une Bel­gique rev­enue à la nor­mal­ité, au sein de l’Europe libérée allant vers une prospérité gran­dis­sante. Julien Lahaut, « un député, un Wal­lon, un antifas­ciste, un résis­tant » fut donc abat­tu comme un chien, huit jours après avoir crié « Vive la République » lors de la presta­tion de ser­ment du roi Bau­douin. Il venait d’ou­vrir sa porte à deux incon­nus, « deux types en gabar­dine ». Soit une mort « déraisonnable », selon une réplique prêtée à l’épouse fidèle, Géral­dine Lahaut. Les raisons de ce déraisonnable ne font pas défaut, bien qu’elles ne soient pas avancées de manière explicite. D’abord, il appa­raît que le mil­i­tant, aux yeux de sa com­pagne, s’est tou­jours dépen­sé sans se préserv­er, en n’observant pas la pru­dence néces­saire. Ensuite, on peut ajouter qu’en tout état de cause sa mort va con­tre Le sens, à savoir con­tre le sens de la morale et con­tre le sens de l’histoire ici con­jugués. 

Mais il y a du déraisonnable dans un autre phénomène encore, et c’est celui-là que vise au pre­mier chef la pièce de Jean Lou­vet : le phénomène de l’ou­bli, en l’oc­cur­rence de cet oubli dans lequel a pu tomber l’inoubliable, l’homme qui avait le soleil dans sa poche et en don­nait un morceau à cha­cun. Plus déraisonnable que tout, il y a cette sec­onde mort, cette mort dans la mort. Elle con­cerne par­ti­c­ulière­ment le pub­lic auquel s’adresse l’auteur à l’heure où s’écrit la pièce, au début des années 80. Ain­si, pour Jean Lou­vet, le héros de con­te et de légende est d’abord un dis­paru. On dit ver­schollen en alle­mand pour car­ac­téris­er quelqu’un dont le nom ne résonne plus, a cessé de par­ler à quiconque, et Kaf­ka envis­ageait de don­ner ce titre, « DER VERSCHOLLENE », le dis­paru, à son roman bap­tisé L’AMÉRIQUE, où les traces du jeune Karl Ross­man se per­dent dans le Nou­veau Monde (celui de l’économie déchaînée). 

Aus­si bien, note Jean Lou­vet dans un numéro d’Alter­na­tives théâ­trales (févri­er 1980, p. 41), « écrire sur Lahaut, ce n’est pas comme écrire sur Lénine, Lahaut est un com­mu­niste oublié, un mar­tyr incon­nu. Le spec­ta­cle, ce n’est pas faire con­naître Lahaut, c’est mon­tr­er des gens qui ne con­nais­sent pas Lahaut. Ça a l’air sim­ple, mais ça pose des prob­lèmes d’écri­t­ure ». Dans la pièce, une métaphore exprime superbe­ment le proces­sus de la dis­pari­tion, la con­di­tion de l’oublié : c’est la métaphore du « chien de la nuit », qui dou­ble et ren­verse la précé­dente, celle de L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE. Léonce, déjà nom­mé, l’u­tilise à deux repris­es. Scène 3, en réponse à Gabrielle qui con­state que le ciel est vide ou presque, deux étoiles à peine, il demande :

« Le chien, Gabrielle
Le chien de la nuit ?
Il n’est pas revenu. »

Scène 9, le même Léonce, qui a partagé Les com­bats de Julien Lahaut, procède à l’oraison funèbre de l’animal lunaire : une brève évo­ca­tion, où chaque détail compte : 

« Léonce. — Le chien de la nuit, Gabrielle, le chien de la nuit est mort. Un chien, ça marche, ça te suit partout. On fait un bout de chemin ensem­ble. Il t’en­voie un peu d’odeur de terre. Les chiens, ça fait encore sor­tir un peu les hommes le soir. Des chiens avec des noms de vieille dame anglaise. 

Gabrielle. — Tu l’as tenu ? 

Léonce. — Oui, je l’ai tenu. Ça a duré deux bonnes heures. On ne croise pas les pattes du chien qui meurt. Il a bu un peu d’eau. Et j’ai net­toyé ses dents pour qu’il n’ait pas mau­vaise haleine. Il m’a appelé deux fois. Puis, j’ai eu très froid. » 

La métaphore du chien dans la nuit — pen­dant négatif, sem­ble-t-il, de l’homme qui avait le soleil dans sa poche, puisque, au héros solaire, elle oppose l’animal obscur — est sans doute plus com­plexe qu’elle ne paraît à pre­mière vue, détachée des con­textes qui la nour­ris­sent. Scène 3, elle était asso­ciée aux rares étoiles sub­sis­tant sur un fond de ténèbres. Scène 9, elle sig­nale une exis­tence humil­iée, mais d’une inquié­tante étrangeté ou, aus­si bien, d’une inquié­tante famil­iar­ité : exis­tence à la fois ensauvagée et domes­tiquée, en marge, à maints égard refoulée, mais qui dans le refoule­ment ne cesse de faire retour, comme le ça de l’in­con­scient col­lec­tif, de l’in­con­scient his­torique. Ça marche, ça te suit partout, ça fait encore un peu sor­tir les hommes le soir, et même à l’agonie, ça ne croise pas les pattes. Il y a, dans ce chien de la nuit, une part d’irréductible, d’indestructible, et à ce titre de revig­o­rant. Le chien de la nuit, c’est la forme que prend le héros solaire men­acé d’oubli. Aus­si la mort du chien de la nuit peut-elle pass­er pour la pire de toutes, car elle équiv­aut à l’oubli de l’ou­bli. Mais le chien de la nuit peut-il mourir ? Le théâtre, en tout cas, se donne la tâche de recueil­lir ses cen­dres, pour ten­ter de lui redonner son feu : le feu du mil­i­tant Julien Lahaut et de ses sem­blables, et plus encore, du mou­ve­ment social et révo­lu­tion­naire dans son ensem­ble. Mais il ne saurait s’agir d’une opéra­tion de sim­ple magie. Loin de tout illu­sion­nisme, ce théâtre-là néces­site plus que tout autre une écri­t­ure de type cri­tique. Le tra­vail de remé­mora­tion qu’il com­mande accentue la ten­sion entre le présent et le passé plutôt qu’il ne la sup­prime. Il n’aboutit nulle­ment à une célébra­tion. 

Évo­quant de manière dis­con­tin­ue, éclatée, sug­ges­tive, par éclairages directs ou indi­rects, la con­di­tion ouvrière depuis 1914, le mou­ve­ment social et révo­lu­tion­naire des années 20 aux années 80, l’ex­ode, la col­lab­o­ra­tion, la résis­tance, la dépor­ta­tion sous la chape de plomb nazie, la ques­tion royale, la ques­tion nationale, l’é­man­ci­pa­tion fémi­nine, le malaise de la jeunesse dans les dernières décen­nies, etc., L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE relève sans équiv­oque de la caté­gorie du théâtre poli­tique. Mais cette caté­gorie, en elle-même, n’a rien d’univoque, et se prête à bien des mod­u­la­tions. À lire le seul Pis­ca­tor, inven­teur de la for­mule qu’il dévelop­pa dans un ouvrage de 1929, pré­cisé­ment inti­t­ulé LE THÉÂTRE POLITIQUE, il appa­raît déjà que celle-ci ouvre sur une plu­ral­ité d’op­tions stratégiques (pro­lé­tari­enne révo­lu­tion­naire, ou révo­lu­tion­naire tout court, ou plus mod­este­ment antifas­ciste) et artis­tiques (selon que domine l’élément dra­ma­tique, ou l’élément épique, ou l’élé­ment doc­u­men­taire, le plus sou­vent com­binés ou fusion­nés). De retour en Alle­magne, au tour­nant des années 60, Pis­ca­tor ne cherche plus à met­tre en scène le pro­lé­tari­at en lutte dans sa marche en avant, il s’en tient à un théâtre de la con­science civique. Brecht, pour sa part, utilise La notion de théâtre épique (ou dialec­tique) dans une optique anti-trag­ique, anti-aris­totéli­ci­enne et au fond assez peu pis­ca­to­ri­enne ; son effet de dis­tan­ci­a­tion brise l’unité des actions représen­tées pour les décom­pos­er en gestes min­i­maux, analysables et recon­vert­ibles : il s’agit de bat­tre en brèche l’aliénation dans la société d’ex­ploita­tion. Peter Weiss, de son côté, se réclame d’un théâtre doc­u­men­taire, dont il a posé les fonde­ments dans des « Notes » par­ti­c­ulière­ment rigoureuses, visant à démys­ti­fi­er l’absurdisme engen­dré par l’horreur d’une bar­barie fort con­tem­po­raine : « Plus le doc­u­ment est insouten­able, et plus il est indis­pens­able de par­venir à une vue d’ensem­ble, à une syn­thèse. Le théâtre doc­u­men­taire affirme que la réal­ité, quelle que soit l’absurdité dont elle se masque elle-même, peut être expliquée dans le moin­dre détail. » 

Il y a tou­jours un moment, bien enten­du, où telle ten­dance du théâtre poli­tique en recoupe une autre, mais Jean Lou­vet, quant à lui, n’entend pas revendi­quer de grands par­rainages. Au con­traire, il accuserait volon­tiers de paresse une pen­sée qui rabat­trait sa recherche sur des mod­èles préétab­lis, for­cé­ment venus d’ailleurs. Ne serait-ce que pour une seule rai­son : tout théâtre poli­tique est de quelque façon un théâtre en sit­u­a­tion, un théâtre de cir­con­stance (bien enten­du dans la meilleure accep­tion du terme). L’au­teur de L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE, non sans con­séquence, tient à par­ler depuis son lieu de vie et de tra­vail, comme l’écrivain au pays qu’il a choisi d’être. Sauf qu’il est per­mis de se deman­der avec un per­son­nage de la pièce, l’épouse de Julien Lahaut, si ce pays d’oubli a une his­toire. C’est dans cette faille que l’auteur fait son chemin. Provo­quer la mémoire belge en col­lec­tant les traces d’un passé enfoui, tel est ici Le pro­jet de Jean Lou­vet : un pro­jet éminem­ment poli­tique, tran­si­tant par une démarche d’or­dre archéologique en vue de réac­tiv­er des forces anesthésiées. 

Cela étant posé, il est lois­i­ble de détecter là un peu du Pis­ca­tor des années 20, dans l’attention portée au drame de la con­di­tion pro­lé­tari­enne et à l’épopée des luttes ouvrières ; un peu de Brecht, dans la mesure où les proces­sus d’i­den­ti­fi­ca­tion nais­sant d’une telle atten­tion s’ac­com­pa­g­nent de proces­sus inverse de dis­tan­ci­a­tion ;et un peu de Peter Weiss, dont la con­cep­tion doc­u­men­taire, vigoureuse­ment polémique, s’en prend à toutes les formes de dis­sim­u­la­tion, de fal­si­fi­ca­tion ou de relé­ga­tion, dans lesquelles l’ou­bli a sa part. À l’ap­pui de ce dernier rap­proche­ment, on fera observ­er que LA PERSÉCUTION ET L’ASSASSINAT DE JEAN-PAUL MARAT représen­té par Le groupe théâ­tral de l’‘Hospice de Char­en­ton sous la direc­tion de Mon­sieur de Sade fut inspiré à Peter Weiss, d’après ses indi­ca­tions, par le peu de place ou de crédit accordés à Marat dans les manuels sco­laires et dans l’his­to­ri­ogra­phie dom­i­nante, alors qu’il incar­ne dans la pièce un principe col­lec­tiviste auquel s’op­pose, en Sade, le principe indi­vid­u­al­iste. Mais un autre point de com­para­i­son mérite aus­si d’être relevé. Cette pièce de Peter Weiss ne com­porte pas d’autre action que le meurtre de Marat, trois fois répété. Autrement dit, elle se développe moins en une suc­ces­sion d’événe­ments qu’elle ne représente un seul et même état du monde, où chaque moment est simul­tané avec tous les autres, une simul­tanéité d’au­tant plus frap­pante qu’elle chevauche plusieurs épo­ques his­toriques : la Révo­lu­tion, l’Em­pire, et l’ac­tu­al­ité que désigne l’année 1964 où elle voit le jour. L’HOMME QUI AVAIT LE SOLEIL DANS SA POCHE ne com­porte pas non plus d’autre action que l’as­sas­si­nat de Jules Lahaut, sig­nalé par deux fois par deux séries de coups de feu. Et la pièce se déploie dès lors selon un jeu de repris­es et de vari­a­tions fait pour opér­er, lui aus­si, sur un cer­tain état du monde, dans une cir­cu­la­tion inin­ter­rompue entre le présent et Le passé : le passé du pro­lé­tari­at depuis 1914 — séisme ouvrant la crise de la moder­nité en Europe — et le présent du mou­ve­ment social et révo­lu­tion­naire en cette année 1980 qui date explicite­ment la pre­mière réplique, la déc­la­ra­tion d’Alexan­dre, le mil­i­tant fatigué aspi­rant tôt — dès le milieu de la vie — à la retraite : « Nous sommes le 26 sep­tem­bre 1980, ça suf­fit. Naître, croître et mourir, crois-moi, on ne sort pas de là. » Au demeu­rant, cette déc­la­ra­tion fixe d’emblée ce qui con­stitue l’enjeu humain (pour ne pas dire méta­physique) de ce théâtre poli­tique : l’ar­tic­u­la­tion, pos­si­ble ou non, entre le temps biologique de la nature et le temps his­torique de l’action humaine, si ce n’est le temps mes­sian­ique du salut. Nous ne sommes pas loin, on le voit, de pré­sup­posés ben­jaminiens, aux­quels se réfère Jean-Marie Piemme en épigraphe à 1953 : « Artic­uler his­torique­ment le passé ne sig­ni­fie pas le con­naître « tel qu’il a été effec­tive­ment », mais plutôt devenir maître d’un sou­venir tel qu’il brille à l’in­stant d’un péril. » 

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Écrit par Philippe Ivernel
Philippe Iver­nel (1933 – 2016) était un chercheur, tra­duc­teur et uni­ver­si­taire français, spé­cial­iste recon­nu du théâtre alle­mand con­tem­po­rain. Pro­fesseur hon­o­raire...Plus d'info
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