Enquête au pays des morts

Enquête au pays des morts

Le 6 Nov 2008

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Article publié pour le numéro
Couverture du nUméro 99 - Expérience de l'extrême
99
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« Il mou­rut et rou­vrit aus­sitôt les yeux.
Mais il était mort et regar­dait comme un mort. »

Gogol

Chez Lucien de Samosate, les morts qui devi­saient aux Enfers étaient pour la plu­part illus­tres, revenus tout droit du con­ti­nent de l’Histoire ou des songes de la mytholo­gie. « Dans les formes ultérieures du genre, ce sont tou­jours des hommes (ou femmes) de renom qui dia­loguent, leur gloire fût-elle éphémère. »1 Chez Patrick Ker­mann, dra­maturge con­tem­po­rain aujourd’hui dis­paru, les Enfers grouil­lent de présences anonymes et de voix si faibles qu’on pour­rait ne pas les enten­dre. Dis­paru, Patrick Ker­mann le fut de son vivant, lui qui com­merça tou­jours avec les ombres et enten­dit leur chant plus qu’aucun autre.

Ce fut d’abord avec De quelques choses vues la nuit, drame de l’obscurité et des rêves pro­fonds où un guide, Vir­gile sans doute, présente à des curieux « les ruines d’un empire mon­trant des cadavres encore chauds, des palais effon­drés, des ves­tiges de gloire passée »2 d’où émer­gent des sur­vivants. « Ban­nis de la lumière, ils ont dans les yeux la pous­sière d’un monde qui s’est effrité »3. Mais pas de per­son­nage illus­tre dans ce monde d’après la cat­a­stro­phe, plus d’Histoire ni de réc­it. Seule­ment Siris, petite fille qui appelle sans cesse sa mère morte, ou C., « jeune homme de bonne famille, enfance heureuse, méti­er solide, per­son­nal­ité forte mais tou­jours en retrait », qui veut aujourd’hui témoign­er : avouer publique­ment le meurtre d’un auto-stoppeur après son viol, et dire qu’il ne regrette rien ; X et Y « pris en fla­grant délit de malver­sa­tion rhé­torique »4 à force de chercher les mots justes pour dire le désir ; un anonyme qui par­le du trou et du dégoût ; quelques anec­dotes racon­tant la vie de Dio­gène de Sinope ; Boj et ses deux amis qui devisent sur la fin du temps de la douleur et la révéla­tion du sens qui est l’absence de tout sens, sur la fin de l’illusion qu’était encore le doute : « Fini le temps de l’utopie, Boj, les mirages il n’y avait rien à chercher Boj, c’est l’évidence »5 ; et enfin deux enfants — ombres qui hantent ces lieux déserts, le garçon mort sur une auto-tam­pon­neuse, la fille encore pleine de mots d’amour. Tous sur­vivants dans la ville aux Sept Portes, Thèbes sans doute.

« Je con­nais des lieux où gisaient jadis la vie /
et les splen­deurs d’une civil­i­sa­tion à jamais dis­parue /
dont témoignent quelques ombres per­dues /
qui crois­eront notre prom­e­nade /
Je con­nais des fables enfouies au plus pro­fond de notre mémoire /
qui sur­gis­sent la nuit dans notre endormisse­ment », reprend le Guide qui par ces mots révèle « le triste spec­ta­cle des âmes aban­don­nées dans la ville morte »6.

De même pour La Mas­ti­ca­tion des morts, pièce qui s’attache à faire par­ler les cent soix­ante-qua­torze défunts enter­rés dans le cimetière de Moret-sur-Raguse, vil­lage de l’enfance aujourd’hui vidé de toute vie tan­dis que les « tombes appel­lent » au cimetière. Là, le nar­ra­teur s’endort sur le banc où il venait déjà s’asseoir quand son père et sa mère rendaient leur devoir de sou­venir à la par­en­té, comme s’il pas­sait ain­si de vie à tré­pas. Les morts par­lent-ils dans nos rêves ou bien ont-ils encore des rêves dans lesquels ils nous enfer­ment ? Dans les tombes de Moret-sur-Raguse cer­tains ont accep­té la mort et d’autres la refusent encore, comme s’ils n’avaient pas eu le temps de jouer la total­ité de leur par­ti­tion : ain­si en est-il d’Alphonse Richet, pris dans un som­meil éter­nel auquel il croit encore pos­si­ble d’échapper :

« Alphonse Richet 1945 – 1997
Faut que je me réveille, Faut que je me réveille,
Faut que je me réveille …
Il croit qu’il dort, vous avez enten­du ?
Faut que je me réveille, Faut que je me …
Ça va, on a com­pris.
Par­don.
Tu te répètes, mon gars, tu te répètes.
Oh oh, vous êtes où ? Oh, vous êtes com­bi­en là ?
Un cer­tain nom­bre, si tu veux le savoir.
Même un nom­bre cer­tain, hi hi !
Et plus nom­breux que les autres là-haut ! »7

Là encore, Patrick Ker­mann pro­pose une prom­e­nade-inven­taire dans le cimetière sous les aus­pices de Jean Genet qui souhaitait déjà qu’on érigeât le théâtre au milieu des tombes, de Hein­er Müller évo­quant le som­meil léger des morts, et de Michaël Ran­ft rap­pelant l’allusion, dans de nom­breux textes et réc­its, « à cette espèce de sons et de voix qu’on entend par­fois dans les mon­u­ments funéraires » car « les morts mâchent avec leurs dents, dans les tombeaux, avec un bruit aus­si puis­sant que celui des porcs »8, chaque sta­tion per­me­t­tant d’entendre une voix par­ti­c­ulière : il suf­fit de ten­dre l’oreille et d’accepter l’aventure pour percevoir le babille­ment étrange des « désor­mais enfouis », morts de tous âges et de toutes con­di­tions sociales, morts tran­quilles ou tou­jours emplis d’une inex­tin­guible colère qui, comme en un chant, racon­tent ce qu’ils crurent percevoir de l’existence de cet out­re-tombe où les des­tins sont enfin scel­lés. Depuis la sépul­ture, c’est bien la vie qui sem­ble une illu­sion.

Dans ces deux pièces, le com­merce avec les morts déter­mine un ren­verse­ment du point de vue. Plus vivants que nous sont ces morts encore han­tés par d’infimes désirs et pris de pas­sions, égrenant des lita­nies obses­sion­nelles et désor­mais illim­itées : ils ont à jamais une his­toire et le rêveur, pris dans un som­meil qui le plonge dans un espace inter­mé­di­aire proche des limbes ou du pur­ga­toire, peut relire à l’envers tous ces chemins de vie. Non pas les expli­quer ni les com­pren­dre puisqu’aucune pas­sion ne s’achève avec la mort, mais seule­ment les enten­dre et ressen­tir alors frayeur et pitié :

« Je déam­bu­lais entre les tombes, sans que le gravier main­tenant ne crissât ni que les arbustes effleurés retrou­vant leur pos­ture d’o­rig­ine n’émis­sent le moin­dre sif­fle­ment. De ce mys­tère, je ne me préoc­cu­pai guère, ayant encore tant de tombes à vis­iter, tant de voix à enten­dre et à récon­forter de leurs blessures incon­solables de vivants. »9

Et déjà s’an­nonce, dans La Mas­ti­ca­tion des morts, le désir d’un rit­uel pour mieux vis­iter les défunts : s’il est « deux façons de négoci­er avec le passé, c’est-à-dire avec les morts : la ten­ta­tive de ratio­nal­i­sa­tion que pro­duit le réc­it des his­to­riens ou le règle­ment de la dette qu’accomplissent les rit­uels com­mé­morat­ifs »10, le théâtre retrou­ve pour Ker­mann sa plus anci­enne fonc­tion : il est le the­atron grec, le lieu d’où l’on voit au-delà des sim­ples apparences. Sur les pas de Vir­gile ou dans le cimetière de Moret-sur-Raguse, on perd toute attache avec les fauss­es évi­dences pour plonger dans des Enfers réels. De même dans Leçons de ténèbres, dernière pièce écrite par Ker­mann où le mode de découpage est tout entier fondé sur un rit­uel juif et catholique11 : se présen­tant comme les nou­velles Lamen­ta­tions de Jérémie, cette parole chorale des vic­times de l’Holocauste s’égrène selon le rythme de vingt-deux séquences cor­re­spon­dant aux vingt-deux let­tres de l’alphabet hébreu, chaque stro­phe com­mençant par une des let­tres, lesquelles se suc­cè­dent dans l’ordre de leur séquence selon le rythme dis­symétrique de la Qîna, chant funèbre décrivant la grande douleur causée par le siège, la prise et la destruc­tion de Jérusalem par le roi de Baby­lone. Struc­ture rit­uelle donc, qui accueille ici le chœur des vic­times aus­si bien que le nar­ra­teur, offi­ciant d’une liturgie qui n’a de cesse de faire enten­dre l’incompréhension devant la per­ma­nence du monde et du mal.

Dans ces trois pièces où les morts appel­lent les vivants, le nar­ra­teur est obligé de se met­tre en scène pour faire pass­er leur parole — du moins ce qu’il en reste — dans l’espace du vivant. Le théâtre devenant dès lors une scène néces­saire où les ombres, habituées à la pénom­bre, trou­vent un lieu de prédilec­tion.

Alef « C’est nuit. C’est nuit main­tenant. Ou il fait som­bre, très. Il fait très som­bre. Ou je ne vois rien, mes yeux ne voient plus rien. Il fait nuit, nuit noire, et je ne vois rien, plus rien. Mes yeux sont ouverts et ne voient rien. Mes yeux sont ouverts sur la nuit, mes yeux sont ouverts sur la nuit, mes yeux sont ouverts et ne voient rien, mes yeux ne voient plus rien, mes yeux ouverts sur la nuit ne voient rien. Ou mes yeux sont fer­més ; ou il fait très noir, très, et mes yeux ne voient rien,
oh
oh tout juste
rien mes yeux ne voient rien il fait nuit […]
oh
mes yeux
mes yeux voient si
mes yeux voient
des
des ombres
dans la nuit som­bre
mes yeux voient mes yeux voient
fig­ures oui fig­ures juste entre­vues dans la nuit
venant marchant
fig­ures issues du tout là-bas de la nuit noire
fig­ures proches toutes proches
et bouch­es ouvertes
bouch­es grandes ouvertes
dis­ant par­lant
(oh leur haleine âpre oh leur souf­fle de mort)
et par­lant enfin
dis­ant enfin
de là-bas
de tout là-bas par­lant
de tout là-bas d’où venues. »12

Dans le cer­cle fer­mé des yeux ou dans le noir ini­tial de la scène théâ­trale, des fig­ures issues de « tout là-bas » peu­vent appa­raître, la voix étant le déclencheur de l’imagination. Voix anonymes, voix chorales d’où s’échappe un cri sin­guli­er, voix d’où procè­dent les visions : dans ces trois drames musi­caux13, ce sont des ombres sans corps qui habitent le plateau, revenant pour faire enten­dre le chant du sou­venir ou pour rap­pel­er le devoir de mémoire. Appari­tions qui brouil­lent toutes les fron­tières entre le mort et le vivant — « et quand allez-vous remourir de vos morts, quand allez-vous revivre de vos vies mortes ? », martèle la let­tre Tav qui clô­ture les Leçons de ténèbres —, la légèreté des ombres étant plus réelle que le poids des fauss­es évi­dences. C’est en effet dans un entre-deux que se jouent les drames de Patrick Ker­mann, dans la mise en scène obstinée du pas­sage entre vie et tré­pas, entre rêve et réal­ité :

« Je suis Ajax je ne dors plus sou­vent la nuit je ne dors plus sou­vent je marche je marche sans m’arrêter la nuit je marche sans dormir je ne dors plus sou­vent je marche je ne dors plus je ne peux plus dormir
CE SONT MES RÊVES QUI ME TUENT moi Ajax
Il se tue

Je suis Ajax une nuit une nuit comme celle-ci j’ai tiré mon glaive une nuit comme celle-ci comme les autres et toutes les nuits j’ai enfon­cé mon glaive dans les entrailles de mes cama­rades j’ai bu le sang de mes amis
Il se tue […]

Je suis Ajax je suis Ajax
Il se tue

Je suis Ajax »14

Enfer­mées dans des limbes opaques, les ombres ten­tent vaine­ment de clore la litanie de leurs plaintes et d’épuiser la scène qui con­duit à leur inévitable mort, la répéti­tion théâ­trale de l’instant cru­cial qui les mena de vie à tré­pas man­i­fes­tant le désir d’en rompre avec le cer­cle des obses­sions aus­si bien que de les faire puis­sam­ment enten­dre. Si la voix et le corps rit­u­al­isé se don­nent comme trace d’un passé lit­térale­ment inou­bli­able, il leur faut encore trou­ver une oreille com­patis­sante : dans tous ses textes, Patrick Ker­mann se met en scène car de ce mode dialogique il n’est pas seule­ment le des­ti­nataire mais aus­si le créa­teur : sans atten­tion préal­able à l’invitation de Vir­gile dans le monde des Enfers, à la mas­ti­ca­tion des morts dans le cimetière de Moret-sur-Raguse, aux ombres des vic­times de l’Holocauste et des revenants de la sphère mythologique, toutes ces fig­ures resteraient dans les enfers de l’oubli. L’engagement physique de l’auteur dans le drame se fait alors la con­di­tion pre­mière de sa théâ­tral­ité, la scène étant la résul­tante d’une écoute atten­tive qui donne de nou­veau aux ombres « droit de cité ». Parce qu’on s’applique à les percevoir, des frag­ments d’histoires se don­nent qu’il appar­tient désor­mais au lecteur-spec­ta­teur de com­pren­dre en croisant les fils, comme on mèn­erait une enquête.

Enquête au pays des morts : seule l’écoute peut un instant délivr­er les ombres de leurs éter­nels ressasse­ments, de la répéti­tion rit­u­al­isée du moment de la chute. À toutes ces fig­ures il faut alors redonner un nom, pour qu’elles sor­tent de la nuit et de l’oubli.

« Homme 9
Oh toi

Hommes
Oh toi

Homme 10
Et tou­jours tombant

Homme 8
Encore chutant au tout bord d’oubli

Homme 9
Ah son absence qui nous emplit de son vide / sa voix /
le mou­ve­ment de sa voix dans nos corps encore / de ci
sur­gi et de là / sur­gi et évanoui / sur­gi du tout bord
d’oubli / puis / puis chan­tant encore dans nos corps /
tombant à nou­veau au / au tout bord d’oubli / au tout
fond d’oubli aus­si / par­fois aus­si / aus­si som­brant au tout
fond d’oubli / puis / puis revenu / revenu aus­si de tout
tout fond / revenu puis chutant / et ain­si / ain­si de suite /
tou­jours / et ain­si de suite son nom enfoui dans nos corps
/ au tout fond de nos corps encore / ô toi

Hommes
Viens

Homme 1
Reviens

Homme 2
Que nous disions ton nom

Homme 3
Que vive encore ton nom »15

La parole des morts est un appel : « J’ai voulu con­vo­quer le réel, l’appeler par la voix, par la répéti­tion des mots, comme les der­vich­es répè­tent sans cesse le nom de Dieu parce qu’ils sont de plus en plus loin de lui », dit Valère Nova­ri­na16. De même, la pure nom­i­na­tion per­met l’action généra­tive d’où peut renaître la vie des ombres, dans le théâtre de Patrick Ker­mann. Les ombres appel­lent, et ce rite de per­pé­tu­ité est une façon « d’égrener le temps pour l’épuiser jusqu’à l’ivresse tour­nante »17 et de con­jur­er l’absence des fig­ures de la mémoire. Et si les ombres appel­lent, c’est qu’elles ne sont pas vrai­ment là.

Mais ce sont pour­tant ces voix qui créent l’espace théâ­tral ; ces voix qui devi­en­nent l’aune, l’instrument de mesure et d’appréhension de la scène obscure et vide ; ces voix qui font réson­ner l’illimité d’un monde troué et béant. Ces voix qui habitent le temps du théâtre.

Puisqu’elle se sait seule­ment à mesure qu’elle se profère, « la voix est la con­science »18, comme le sig­nale Der­ri­da. Les voix des ombres se sin­gu­larisent par leur excep­tion­nelle puis­sance d’ouverture : par elles, un autre monde s’entrouvre devant le spec­ta­teur, monde où le passé est tou­jours vif, où la blessure n’a pas été apaisée. Si le théâtre per­met de voir, c’est parce qu’il lim­ite la vue, lim­ite qui seule per­met de don­ner un espace à la langue. D’une cer­taine manière, le théâtre naît à l’instant où l’obscurité ini­tiale ouvre le champ à la parole dont la puis­sance cor­re­spond con­crète­ment à la dimen­sion fon­da­men­tale de la présence, éclair d’un chant incom­pa­ra­ble :

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Écrit par Sophie Lucet
Sophie Lucet est maître de conférences en Études Théâtrales à l’université de Caen. En avril 2003, elle pub­liera...Plus d'info
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