Suite à la lecture de la retranscription de son intervention Jean Lambert-wild a souhaité nous apporter un complément de réflexion que nous publions ici.
« IL Y À ce point
Dont le centre est un autre point
Qui contient le noyau
Qui m’a vu naître. »
En préambule à ma réponse à ce qui n’était pas une question.
En dehors des anecdotes, qui mises bout-à-bout font le tracé d’une vie, mon choix du théâtre comme lieu et moyen d’écriture est dicté par ce fait : le théâtre est une pratique, dont le corps est le plus sensible aux changements et aux perturbations du champ d’action de la sémantique occidentale.
Cette sensibilité dans la théâtralité occidentale contemporaine se traduit par : soit une régression, soit une répulsion, soit une stagnation, soit une agression.
Ces états réduisent l’orgueil confiant d’un théâtre occidental contemporain qui veut guérir une Maladie générale en lui appliquant le traitement de sa Maladie particulière ; tout en ne sachant pas très clairement, si le patient dont le « devoir » est de guérir est Malade ou en pleine santé.
S’il était Malade, cela n’aurait aucune incidence sur l’inefficacité du traitement. Deux Maladies ne s’annulent pas, au mieux elles relativisent leurs douleurs, au pire elles se camouflent l’une l’autre.
Beaucoup de médecine pour rien, mais c’est craindre une évidence que les femmes et les hommes de théâtre ne puissent s’empêcher d’être « des médecins malgré eux ».
Mon raisonnement n’est ici ni nihiliste ni moraliste, mais sans doute très complice et un peu contemplateur car c’est bien les Maladies (le terme de Maladie étant compris comme : une variation compulsive et rythmique d’une composition générale en déclin) du théâtre occidental contemporain qui m’intéressent.
Je suis plus particulièrement intéressé par la multitude des formes artistiques et parfois scientifiques qui trouvent dans cette pratique Malade le moyen d’exister, de se développer et de proliférer ; tout en ayant soin de tenir la pratique elle-même dans un état Maladif moyen. Ce qui en stratégie est la meilleure garantie de défense que l’on puisse espérer.
Une métamorphose est en cours. Et comme souvent, la métamorphose n’est pas le fait de « l’organe » lui-même.
J’observe donc cette métamorphose, en m’intéressant à l’évolution de toutes les formes qui y travaillent et j’ose espérer voir surgir une autre pratique théâtrale.
En première assertion à ma réponse à ce qui n’était pas uné question.
Tout ce qui est de l’ordre des réalités politiques et économiques constitue des contingences extérieures présentes mais jamais des priorités premières et absolues.
Ce statut peut bien sûr basculer si l’on cherche dans la pratique théâtrale les moyens d’enregistrement d’une volonté de pouvoir (pouvoir politique, religieux, économique ou social). Ce que j’admets. Mais ce basculement ne me concerne pas, car il ne correspond pas à la priorité de ma lutte.De plus je revendique un statut artistique de perpétuel exilé, désarmé.
Je remarque, au passage, que l’enregistrement du pouvoir par les artistes de théâtre crée souvent des utopies effrayantes et totalisantes qui possèdent en elles des forces de justification tout aussi effrayantes et totalisantes.
En deuxième assertion à ma réponse à ce qui n’était pas une question.
Je refuse d’envisager ma réponse à la façon d’un turfiste. Il n’y a ni ligne de départ, ni ligne d’arrivée dans ma lutte. La valeur d’une action ou d’un engagement artistique ne se mesure ni dans la difficulté d’une course compétitive, ni dans la longueur de foulée des participants, ni même dans la dureté des fers donc ils sont pourvus.
Je dirais : Là où il y a combat, il n’y a plus lutte !
Et il arrive parfois que la carne la plus puante er boiteuse porte son fardeau le plus loin.
En troisième assertion à ma réponse à ce qui n’était pas une question.
Le temps est un matériau périssable, instable mais continu. Mon travail s’inscrit dans cette continuité. Je ne peux donc le fractionner. Tout au plus, je peux dire, en quel point de la ligne je me trouve.
Aujourd’hui mon point est : l’ondulation aléatoire des Émotions, leurs influences sur le système cérébral, le niveau d’information et de communication que l’on peut alors en dégager.
Cela dit, voilà ma réponse à ce qui n’était pas une question je poursuis aujourd’hui ce que j’ai poursuivi hier et que je poursuivrai demain.
Là, est la priorité de ma lutte : Me poursuivre…