DIRECTEUR du centre chorégraphique d’Orléans, Josef Nadj sera l’artiste associé du festival d’Avignon 2006. S’il a dès ses débuts rejeté les étiquettes des genres, Josef Nadj continue de brouiller les frontières entre danse, théâtre, musique et arts plastiques – moins concerné par la nouveauté formelle qu’animé du désir de mettre en mouvement la pensée. Pièce après pièce, il développe et laisse mûrir son propre langage, non pas un style ni une esthétique, mais une poétique.
Je sors juste de deux confrontations très fortes, après Artaud avec IL N’Y A PLUS DE FIRMAMENT, il y a eu Roussel avec POUSSIÈRE DE SOLEILS. Il faut revenir à ces quelques figures qui ont laissé des traces, ce sont des empreintes qui crient de temps à autre. On ne doit pas les contourner, il faut penser à elles continuellement, se recharger de leur énergie. Ce sont elles qui me donnent la force de continuer. POUSSIÈRE DE SOLEILS est un geste de retour à Roussel, aux risques qu’il prenait dans ses créations théâtrales et son écriture littéraire. Le XXe siècle a fait le tour de toutes sortes d’ouvertures et de remises en question des formes artistiques. On sent que la boucle est bouclée… Mais notre milieu, et les moyens que nous avons, nous permettent d’aborder avec plus de sérénité la question du renouvellement. Nous avons un autre défi qui va davantage dans le sens d’un approfondissement, un travail plus vertical qu’horizontal.
Tout moment de création est une prise de risque. Dès qu’on aborde une œuvre, le risque est là : est-ce qu’on réussira à parcourir le chemin prévu et imaginé, va-t-on atteindre la qualité qu’on souhaite lui donner ? Je différencierais ici le sens du risque de celui de la révolte : la révolte est l’habit, le manteau du risque. Toute forme poétique est un refus par rapport à la vie. On est en permanence en révolte, mais on oscille entre un isolement total, un sentiment d’impuissance face à la vie, et un sentiment de ras-le-bol, qui provoque le geste de révolte. La révolte s’impose d’abord comme réaction face à la vie, à l’abrutissement général et la masse du bruit qui nous entoure. Il y a des moments où on est plus réceptif, on intègre alors ce vécu-là dans l’acte artistique, on sort de nos sentiers, de notre bulle, et on produit quelque chose qui est en réaction.