Brecht, aujourd’hui
Non classé

Brecht, aujourd’hui

Le 14 Jan 2006
Article publié pour le numéro
La scène polonaise-Couverture du Numéro 81 d'Alternatives ThéâtralesLa scène polonaise-Couverture du Numéro 81 d'Alternatives Théâtrales
81
Article fraîchement numérisée
Cet article rejoint tout juste nos archives. Notre équipe le relit actuellement pour vous offrir la même qualité que nos éditions papier. Pour soutenir ce travail minutieux, offrez-nous un café ☕

En cette péri­ode de l’his­toire qui con­duit sur les routes des réfugiés aux qua­tre coins du monde, les Dia­logues d’exilés trou­vent aujourd’hui une nou­velle actu­al­ité.

Après plus d’une cen­taine de représen­ta­tions de sa mise en scène de ce texte de Brecht, Her­bert Rol­land, directeur du Théâtre de la Vie, a invité à Brux­elles cri­tiques et prati­ciens du théâtre pour réfléchir à la place qu’occupe l’œuvre du dra­maturge alle­mand en ce début du XXIᵉ siè­cle.

Pour Philippe Iver­nel, quand il affirme qu’« il n’y a qu’une lim­ite aux doutes, c’est le désir d’agir », Brecht artic­ule les rap­ports de la pen­sée (cri­tique) et de l’action (poli­tique). Par­tant de sa vision de la récente expo­si­tion conçue à Paris par Paul Vir­ilio, Ce qui arrive, Philippe Iver­nel note que la prob­lé­ma­tique de l’accident « se révèle en quelque sorte con­sti­tu­tive du théâtre épique ». Dans celui-ci, le découpage de l’action « offre une prise à par­tir de laque­lle peut se men­er l’exploration du pos­si­ble et la con­struc­tion du nou­veau ». La prin­ci­pale ques­tion de notre temps devient alors, comme l’affirme Alain Badiou, celle « du courage affir­matif, de l’énergie locale ».

Yan­nic Man­cel rap­pelle que les dis­ci­ples de la pre­mière généra­tion (Besson, Strehler, Sobel, Plan­chon) ont attiré notre atten­tion sur « l’homme de plateau, le prati­cien, l’inventeur scénique qui, par ses trou­vailles et son génie con­cret, au quo­ti­di­en, nous a légué et trans­mis des principes rich­es d’enseignements… ». Effets de rup­ture dans la nar­ra­tion par la musique et le chant, change­ment de décor à vue, dialec­tique de l’acteur et du per­son­nage (mon­trez que vous mon­trez), faire théâtre de tout, con­vo­ca­tion des arts frères (ciné­ma, vidéo, graphisme) sont pour Yan­nic Man­cel autant d’exemples d’une dis­tan­ci­a­tion ludique et mali­cieuse qui provoque chez le spec­ta­teur un autre regard sur la réal­ité.

Chap­lin et Brecht ont, pour Adolphe Nysen­holc, bien des choses en com­mun. L’un et l’autre con­juguent avec vir­tu­osité les gen­res du trag­ique et du comique. Les thé­ma­tiques proches de Pun­ti­la et City Lights, du Dic­ta­teur et Grand-peur et mis­ère du IIIᵉ Reich ou Arturo Ui. Qui de l’un influ­ença plus l’autre ? Pour le dra­maturge comme pour le cinéaste, « la dis­tan­ci­a­tion n’est pas dans la mar­que ou la pos­ture, mais dans la mon­stra­tion ironique, dans le jeu qu’il y a entre l’acteur et le per­son­nage (…). Et c’est de cet espace libre que peut se dégager un amuse­ment, une ironie. »

Roumen Tchakarov, dans ce même ordre d’idées, rap­pelle que « pour Brecht, le per­son­nage que joue le comé­di­en n’est pas une per­son­ne réelle, un incon­nu qui sort de la vie quo­ti­di­enne, mais une fic­tion qui per­met au spec­ta­teur de se con­fron­ter, de façon ludique, avec les proces­sus dont l’auteur veut lui par­ler… ».

Rassem­blés par Françoise Nice, les témoignages d’acteurs et de met­teurs en scène qui clô­turent ce dossier mon­trent à quel point Brecht a, aujourd’hui, de nom­breux héri­tiers. Il intéresse autant qu’il irrite. Sa poésie est vivante, mêlant hédon­isme et engage­ment, réflex­ion et sen­su­al­ité.

Ben­no Besson aurait pu con­clure cette ren­con­tre, lui qui a écrit : « Quand je tra­vaille, je suis d’abord comme un enfant dans son activ­ité ludique ; ce n’est qu’ensuite que je suis un intel­lectuel dans son activ­ité cri­tique… »

Non classé
1
Partager
Bernard Debroux
Écrit par Bernard Debroux
Fon­da­teur et mem­bre du comité de rédac­tion d’Al­ter­na­tives théâ­trales (directeur de pub­li­ca­tion de 1979 à 2015).Plus d'info
Partagez vos réflexions...

Vous aimez nous lire ?

Aidez-nous à continuer l’aventure.

Votre soutien nous permet de poursuivre notre mission : financer nos auteur·ices, numériser nos archives, développer notre plateforme et maintenir notre indépendance éditoriale.
Chaque don compte pour faire vivre cette passion commune du théâtre.
Nous soutenir
Précédent
Suivant
Article publié
dans le numéro
La scène polonaise-Couverture du Numéro 81 d'Alternatives Théâtrales
#81
mai 2025

La scène polonaise

15 Jan 2006 — les légendes témoignent de ce que, entre deux êtres, .tout peut parfois se jouer lors de la première rencontre. Or,…

les légen­des témoignent de ce que, entre deux êtres, .tout peut par­fois se jouer lors de la pre­mière…

Par Joël Jouanneau
Précédent
14 Jan 2006 — Quand je pense à Riszard Cieslak, je pense à un acteur créatif. Il me semble qu’il était vraiment l’incarnation d’un…

Quand je pense à Riszard Cies­lak, je pense à un acteur créatif. Il me sem­ble qu’il était vrai­ment l’incarnation d’un acteur qui joue comme un poète écrit, ou comme Van Gogh peignait. On ne peut…

Par Jerzy Grotowski
La rédaction vous propose

Bonjour

Vous n'avez pas de compte?
Découvrez nos
formules d'abonnements

Mot de passe oublié ?
Mon panier
0
Ajouter un code promo
Sous-total