La traduction est une forme. Pour la saisir comme telle, il faut revenir à l’original. Car c’est lui, par sa traductibilité, qui contient la loi de cette forme. La question de la traductibilité d’une œuvre est ambiguë. Elle peut signifier : parmi la totalité de ses lecteurs, cette œuvre trouvera-t-elle jamais son traducteur compétent ?
Walter Benjamin, LA TÂCHE DU TRADUCTEUR.
L’EXPÉRIENCE du paradoxe reste sans doute une des expériences les plus fondamentalement enrichissantes que puisse vivre un être humain. Il existe dans le paradoxe des vertus critiques insondables, puisque le sujet se prend souvent lui-même à partie, qu’il le veuille ou non. Pour mettre en crise, ne serait-ce que de manière bénigne, les valeurs de vérité et de mensonge, rien ne vaut la mise en scène du paradoxe du menteur, pour montrer à quel point il est difficile de sortir de soi-même, de se prendre pour objet et sujet de sa réflexion. Comme l’écrit Wittgenstein dans le TRACTATUS LOGICO-PHILOSOPHICUS, « pour pouvoir représenter la forme logique il faudrait que nous puissions nous situer avec la proposition en dehors de la logique, c’est-à-dire en dehors du monde. » Vaste programme.
De tous les paradoxes, celui du jeu demeure un des plus intéressants. Jouer est une activité libre, une des activités qu’on associe le plus naturellement à la liberté. Pourtant, pour atteindre à la plénitude du jeu, pour atteindre un plaisir maximal en s’y adonnant, il faut en connaître les règles le mieux possible. Ainsi, pour atteindre la liberté qu’il permet, il faut s’astreindre à la connaissance minutieuse de contraintes qui sont, par définition pourrait-on croire, l’envers de la liberté.