SOTIGUI KOUYATÉ : Les commencements sont toujours difficiles. Vous me voyez embarrassé, et je me demande par quel bout commencer. Je pense que le plus simple est de commencer par le début du commencement.
Il est d’usage chez moi que je m’adresse d’abord à vous pour vous dire merci d’avoir consacré une partie de votre temps — combien précieux ! — pour venir m’écouter. M’écouter, accepter de me rencontrer. C’est une rencontre, et je crois à la rencontre des hommes. Quelque part, cela correspond à une ancienne vérité africaine, qui est qu’au Mali, en Guinée, au Burkina et même au Sénégal, l’étranger est sacré. On appelle l’étranger : l’homme riche. C’est la personne qui vient nous apporter ce qu’on ne sait pas. On doit apprendre de lui. C’est une voie de l’enseignement. On s’instruit, on s’éduque à travers les autres.
En français je peux dire « tiens, voilà une personne » (excusez moi, ce monsieur qui est à ma droite est mon deuxième fils, Hassan. Il est informaticien, et comédien conteur — je l’ai éduqué à cela). On dit une personne mais dans ma langue africaine qui est le Bambara, qui peut être une autre langue qui est le Malinké, qui peut être une autre langue, le Kassonké, qui peut être une autre langue, le Dioula, dans ces quatre langues on dit « Môgô » pour dire « la personne ». Mais cela ne s’arrête pas là. Quand on dit la personne, après « la personne », qui est « Môgô », il y a « Môgôya ». « Môgôya », cela veut dire « les personnes de la personne ». Ce qui veut dire que chaque être humain n’est pas simple, ni double, mais multiple. Et que l’apprentissage, l’instruction, l’enseignement dans la vie c’est chaque jour aller à la rencontre d’une de ces personnes afin de se connaître mieux pour accéder au bien suprême qui est d’aller vers le meilleur de soi-même. On pense qu’on est cette personne, « Môgô », mais à l’intérieur de ce Môgô il y a des multitudes de Môgôs que je dois chercher chaque jour dans ma démarche, c’est-à-dire dans ma rencontre avec les gens.
En cherchant bien, je peux trouver une partie de moi dans certaines personnes. Certaines personnes ont une partie de moi en elles : ça, c’est la tradition africaine, les différences ne sont pas des obstacles, les différences permettent la complémentarité. C’est parce qu’on est différent qu’on peut se compléter. Et c’est parce qu’il est fait d’une diversité de couleurs qu’un tapis est beau. C’est dans le même sens qu’on dit : « Quand tu regardes une personne, au lieu de te perdre dans le regard de l’autre, reconnais-toi dans son regard, et, si tu regardes bien, tu pourras même te voir ». Et cela, c’est vrai. Cela veut dire qu’en réalité ce qui rapproche les êtres humains est beaucoup plus que ce qui les sépare.
Mais il y a une chose qu’on appelle la peur. La peur de l’autre, mais qui est en fait la peur de soi-même. Quand on a peur de l’autre, cela veut dire qu’on a peur de soi-même, parce que l’autre n’est qu’une partie de soi, ou une autre personne de soi. Et pour continuer sur ce sujet — parce que le thème me plaît beaucoup, « les penseurs de l’enseignement » … En Afrique le maître qui se promène avec son disciple, quand il rencontre du monde, présente son disciple en disant : « Je vous présente mon maître ». Ce n’est pas une simple phrase ; si on réfléchit bien, cela veut dire beaucoup. Parce qu’en fait le maître qui peut grimper au sommet d’une montagne parce qu’il en a la capacité, s’il dit simplement au disciple « Grimpe me rejoindre au sommet de la montagne », Celui-ci ne pourra jamais le faire. S’il veut réellement l’amener au sommet de la montagne, il faut qu’il vienne à lui, il faut qu’il trouve une voie pour venir à lui. Donc c’est l’élève, il redevient l’élève de son élève — c’est un des sens de cette phrase, mais il y en a plusieurs.
L’enseignement, en Afrique, est global. L’enseignement moyen, l’enseignement supérieur, l’enseignement élémentaire se donnent tous en même temps et quand l’opportunité se présente. On saisit chaque occasion, exactement comme le griot se sert d’un baptême, d’un mariage et même de funérailles pour transmettre toujours un message. Et un griot peut transmettre un message à l’occasion d’une chanson que les gens aiment chanter (un chant, ce qui veut dire que le jeu n’empêche pas le sérieux et que le sérieux n’empêche pas le jeu). Chaque occasion est propice pour donner un enseignement.
Un exemple : un serpent jaillit d’un buisson ; cela peut être une occasion pour le maître de donner tout de suite une leçon sur le serpent, mais cela dépend : si son auditoire est composé d’adultes, il va parler des légendes du serpent, il va parler des remèdes qui peuvent guérir la morsure. Mais si son auditoire est composé d’enfants, il va changer de discours : il parlera plutôt des méfaits du serpent. Il trouvera des choses qui feront qu’ils s’en souviennent et qu’ils s’en méfieront.
De même quand ils verront une caravane de fourmis qui trimballent une sauterelle. C’est une occasion pour le maître ou pour l’initiateur de donner tout de suite plusieurs leçons : une leçon sur la sauterelle, une leçon sur la fourmi, et encore une leçon sur l’union des petites forces. Donc chaque occasion est un enseignement, toute la vie est un enseignement. C’est ce qu’on appelle la grande école de la vie.
Je saisis cette occasion pour rendre hommage au regretté Hampâté Bâ, grand sage et noble défenseur de l’oralité et des valeurs culturelles africaines.
Et je suis griot — je ne vais pas vous donner toutes les définitions du griot. Griot généalogiste, historien ou conteur, devenu comédien par la force des choses sans passer par aucune école de théâtre, ni de cinéma. De même mon fils, il a fait une école d’informatique, mais pas de comédien, ni de conteur, mais il est resté à côté de papa par la transmission.
Mais la transmission a mille voies. C’est comme un arbre. Plusieurs branches partent de l’arbre, partent dans des directions différentes, alors qu’elles sont nourries par les mêmes racines et par la même sève.
Donc, pour ce qui est de l’enseignement, en Afrique, tout le monde est élève et tout le monde est maître. L’enfant (comme le dit d’ailleurs le regretté Hampâté Bâ dans certains de ses ouvrages), d’un an à sept ans, est à l’école de sa mère : même si son père lui dit quelque chose, il va trouver sa mère : « Maman, papa a dit ça, est-ce que c’est vrai ? ». Puis, entre sept et quatorze ans — ce sont toujours des périodes de sept ans — il est dans deux écoles : l’école de la rue et celle de sa mère (il a quand même toujours besoin de vérifier les choses auprès de sa mère). De quatorze à vingt-et-un ans, il passe à l’école des adultes. Et tout ce qu’il approfondira pendant vingt-et-un ans encore, c’est ce qu’il aura appris de quatorze à vingt-et-un ans : de vingt-et-un ans à quarante-deux ans, il doit approfondir ce qu’il a appris. Et à partir de quarante-deux ans (puisque quand on est à côté de personnes âgées, quand on parle on te demande ton âge, et quand tu dis « quarante et un ans » on te répond « Tais-toi, attend tes quarante-deux ans »), et à ce moment-là seulement, il est homme, et il peut parler quand on lui donne la parole — il ne peut pas la prendre. Mais à quarante-trois ans on est maître, aussi, et on peut prendre la parole.
Tout le monde est élève et tout le monde est maître. À partir de ce moment, on a l’obligation, le devoir, de rembourser la dette qu’on a contractée. L’enseignement que l’on a reçu, on doit le donner, et cela pendant vingt et un ans. Pendant vingt-et-un ans, obligatoirement, tu es enseignant, tu dois dispenser. Et à soixante-trois ans on considère que tu t’es acquitté de ta dette. À partir de ce moment, tu n’es plus obligé d’enseigner — tu peux le faire, mais il n’y a plus aucune obligation.
Je crois qu’il y a dans l’enseignement ce qu’on montre aux enfants, ce qu’on leur dit et ce qu’on leur laisse entrevoir par nos actions. L’éducation, ce n’est donc pas simplement dire à quelqu’un « Fais ceci, fais cela » pendant que soi-même on fait le contraire. Vous voyez …
Tout est enseignement. Même aller chercher de l’eau, c’est une école. Quand je dis cela, ce n’est pas par complexe, et je n’ai rien contre les écoles — au contraire, je les adore. Peut-être que je regrette de n’être pas passé par là, mais quand je dis que je ne suis passé par aucune école, c’est vrai, et aucun de mes fils non plus, d’ailleurs. (Mon premier fils devait me rejoindre ici, il n’a pas pu venir sinon, s’il était dans la salle, il serait venu quand même, il ne va pas se cacher !)
Et j’ai créé une compagnie de théâtre, qui s’appelait la troupe de la Volta, en 1966. Ensuite, j’ai créé le premier ballet africain de mon pays, en 1973. Comment j’ai été membre de la SACEM en tant qu’auteur, compositeur, chanteur et guitariste depuis 1965, alors que je n’ai jamais suivi le moindre apprentissage de guitare, ni de chant, ni de son, je ne sais pas. Tout est possible, il suffit de chercher et les voies sont nombreuses.
Ce qui est mauvais, c’est de penser qu’on est seul à posséder la vérité. Parce que — ça, c’est une anecdote indienne — un jour on a mis dix aveugles dans une maison avec un animal, et on leur a demandé de dire ce qu’ils voyaient. Un a répondu « une patte », un autre « une oreille », un autre « un oeil », un autre encore « une trompe » … Bon, c’était un éléphant. Finalement, aucun ne s’était trompé, vous voyez.
(Rires et applaudissements).
Hassane Kassi joue du tama.
Il récite Le corbeau et le renard
Sotigui, son père, l’arrête.
Sotigui : Ce n’est pas ça.
Hassane : Comment, ce n’est pas ça ? C’est comme cela que je l’ai appris à l’école.
Sotigui : Oui, mais ça n’a pas de vie. Regarde. Nous ne sommes pas seuls : nos amis sont là. On s’adresse à eux.
« Le Corbeau et le renard »
(Réaction du public)
Hassane : Ah oui, je vois : ça marche bien !
Sotigui : « Maître corbeau … » Où est-ce qu’il est ? Cherchons le. Ah ! il est là, tu vois ? « … sur un arbre perché, tenait en son bec un fromage. Maître Renard, par l’odeur alléché, lui tint à peu près ce langage ».
Laissons passer le renard.
« Eh, bonjour Monsieur du Corbeau, que vous êtes joli, que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage se rapporte à votre plumage, vous êtes le phénix des hôtes de ces bois …
(Sotigui et Hassane s’adressent directement au public)
À ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie, et pour montrer sa belle voix, il ouvre un large bec et laisse tomber sa proie. Le Renard s’en saisit et dit : « Reculons, l’arbre est très haut ».
« Mon bon monsieur, apprenez que tout flatteur vit aux dépends de celui qui l’écoute. Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute ».
Hassane : Mais je connais la suite !
Sotigui : Attend, je regarde l’heure.
Hassane : Attend !
Sotigui : Attend quoi ?
Hassane : J’en connais une autre.
(Hassane montre le sommet de l’arbre imaginaire)
Sotigui : Qu’est-ce que tu cherches là-haut ?
Hassane : Je cherche le héron !
Sotigui : Mais c’était le corbeau qui était sur l’arbre ! Qu’est-ce que le héron irait faire sur un arbre ? Le héron de Jean de la Fontaine n’est pas sur un arbre, mais au bord d’un lac ! (applaudissements)
Sotigui : Merci, merci. On n’applaudit jamais un Griot, sinon il ne peut pas continuer. C’est à moi de vous dire merci. Je vais vous raconter des histoires.
La première : un monsieur (où es-tu ?) , qui s’était mal réveillé, qui n’était pas de bonne humeur, se promenait dans la forêt, et il rencontra quelque chose qui ressemblait à un homme et qui lui dit : « Je suis un génie, alors fais un voeu et ton voeu sera exaucé ». Il était tellement surpris qu’il en a perdu la langue. Alors le prétendu génie, qui en était en effet un vrai, lui dit : « Mais tu n’as pas d’idée, tu ne veux rien ? », et là il se réveille et dit : « Ah si si si ! ». « Qu’est-ce que tu veux ? ». « Je veux être intelligent ». Et le génie lui dit : « C’est tout ? », et il est devenu intelligent. « Alors, ça va ? », demanda le génie. « Ah oui, ça va, merci, je suis intelligent, c’est mieux. Mais si j’étais dix fois plus intelligent, ça serait encore mieux ». Le Génie a claqué des doigts, et il est devenu dix fois plus intelligent. « Alors, ça va, maintenant ? », demanda encore le génie. « Si je disais que ça ne va pas, je serais un menteur. Mais si je suis cent fois plus intelligent, je ne demanderai plus rien ». « Bien, répondit le génie, tu l’auras voulu » : il claqua des doigts de nouveau, l’homme s’endormit, et il se réveilla femme.
(rires)
La dernière histoire : Quarante africains, tous noirs comme moi, se promenaient — ce n’était pas dans une forêt, c’était en Afrique, et c’était la brousse. Alors ils ont ramassé une vieille lampe, et en la nettoyant un génie est apparu — pourquoi ? allez savoir … Et le génie leur dit : « Vous avez chacun droit à un seul voeu, alors décidez-vous ». Chacun voulait être premier. Le génie s’est impatienté et a dit : « Eh bien, si vous ne voulez rien, je m’en vais ! ». Finalement, ils se sont entendus, et ils se sont mis en colonne à la façon des militaires. Alors le premier : « Toi, qu’est-ce que tu veux devenir ? ». « Moi je veux être un blanc » — et il est devenu blanc. Le deuxième : « Et toi ? »; « Moi aussi, blanc » : alors deux blancs. « Et toi ? ». Le troisième : « Blanc aussi ». Alors il y a eu dix, vingt, trente, et finalement trente-neuf blancs. Alors le quarantième, le dernier. Le génie se frottait les mains pour sa liberté, et il dit : « Alors, toi aussi tu veux devenir un blanc ? ». Et le dernier vient avec un petit sourire narquois : « Eh bien moi je souhaite que tout le monde redevienne noir ».
(rires)
Je vais laisser Hassane vous raconter quelque chose. Sinon il m’en voudra. C’est le maître qui se met au niveau de son élève.
Hassane : C’est l’histoire d’un jeune homme qui trouvait qu’il n’avait pas de chance. Il s’est dit que, pour trouver sa chance, il n’avait qu’à aller voir Dieu lui-même et lui demander où était sa chance et qu’ainsi il était sûr de ne pas se tromper. Mais le problème était de savoir où Dieu habite, ou de rencontrer quelqu’un qui était parti chez Dieu, qui en était revenu et qui avait eu la présence d’esprit de faire le plan de la route. Il a choisi la seconde solution, il a marché longtemps, et il a rencontré quelqu’un qui était parti, qui avait vu Dieu, qui était revenu et qui avait eu la présence d’esprit de faire le plan de la route. Et comme il avait vu Dieu, il était généreux, et lui a donc donné le plan. Le jeune homme a alors entrepris d’aller voir Dieu. Il marche très longtemps et il arrive dans une forêt. Arrivé dans la forêt, qu’est-ce qu’il voit ? Il voit un lion, et il prend peur. Le lion lui dit « N’aie pas peur, je ne te mangerai pas, je t’assure, je ne te mangerai pas. Regarde-moi, cela fait six mois que Je ne mange pas ».
Il a regardé le lion et, effectivement, le lion était très maigre, mais il s’est rappelé quelques proverbes. Il y en a un qui dit, par exemple, que « quand tu attaches la chèvre à l’herbe ou quand tu attaches l’herbe à la chèvre, c’est l’herbe qui est toujours mangée ». Un homme a beau être fort, il est petit devant un lion.
– Le lion lui disait : « Mais je t’assure que je ne te mangerai pas … »
Il finit par dire au lion : « Ah bon, vous, les lions, vous avez des problèmes alors ? ».
Le lion lui répond : « Tout ce qui vit à des problèmes. Et comme les animaux vivent, les animaux aussi ont des problèmes ».
– Alors le jeune homme dit : « Ça tombe bien, parce que je vais voir Dieu pour lui demander où est ma chance, je peux demander à Dieu ce que tu dois faire pour retrouver ton appétit ».
– Le lion : « Tu ferais ça pour moi ? »
– Lui : « Bien sûr, je ferai ça pour toi, parce que, comme je serai chez Dieu, cela ne me coûtera rien ».
Le lion lui dit : « Je t’attendrai ici ». Le lion s’est assis et le jeune homme a continué sa route.
Comme il était fatigué, il voit un arbre. Il s’assoit à l’ombre de l’arbre, s’adosse contre lui. À peine s’est-il adossé que l’arbre lui dit :
– « Hé, oh ! ne t’adosse pas à moi comme ça, tu vas me faire tomber ! » Le jeune homme regarde l’arbre et lui répond :
– « Mais tu es un arbre tellement solide ! »
– Mais l’arbre dit : « J’ai l’air solide. Vous, les êtres humains, l’apparence vous trompe tellement. Regarde bien mes feuilles. Si tu avais regardé, tu aurais vu que je suis malade ».
Il regarde les feuilles de l’arbre, et il dit : « Ah bon, vous aussi, les plantes, vous avez des problèmes alors ».
– L’arbre lui dit : « Tout ce qui vit à des problèmes, et comme les plantes vivent, les plantes aussi ont des problèmes ».
– « Ça tombe bien, répond le jeune homme, je vais voir Dieu pour lui demander où se trouve ma chance, je peux demander à Dieu ce que tu dois faire pour guérir ».
– L’arbre : « Tu ferais ça pour moi ? »
– « Bien sûr que je ferai ça pour toi, puisque cela ne me coûtera rien ».
– L’arbre lui dit : « Je t’attendrai ici, de toutes les manières je n’ai pas le choix ».
Le jeune homme a continué sa route. Il arrive près d’une grotte. Il entend des sanglots dans la grotte, et là il voit une femme très jolie, extrêmement jolie.
Il lui dit : « Mais comment une aussi jolie femme peut être aussi triste que tu es ? » Elle répond : « Je suis jolie mais je suis seule. » « Ah bon, tu es seule et triste ? » Elle : « La preuve. » Lui : « Ça tombe bien, je vais voir Dieu pour lui demander où se trouve ma chance : je peux demander à Dieu ce que tu dois faire pour être heureuse ».
La femme : « Tu ferais ça pour moi ? » Lui : « Bien sûr que je ferai ça pour toi, puisque je serai chez Dieu, ça ne me coûtera rien ».
Il poursuit son chemin, et comme prévu il arrive chez Dieu.
Arrivé chez Dieu, il frappe à la porte. Dieu dormait (rires). Oui, vous riez, mais quand on voit ce qui se passe sur la terre, des fois, on se dit qu’il dort même d’un sommeil profond. Et Dieu se réveille enfin : « Qu’est-ce que tu veux ? »
– « Je suis venu pour chercher ma chance, mais sur la route j’ai rencontré un lion qui n’avait pas d’appétit, et ensuite j’ai vu un arbre qui était malade, et ensuite j’ai vu une femme qui était seule et triste ».
– Dieu répond : « On va commencer par la femme. Tu diras à la femme que pour qu’elle soit heureuse, elle n’a qu’à se marier avec le premier homme qu’elle rencontrera : elle sera très, très heureuse, et l’homme sera très, très heureux. Et tu diras à l’arbre que c’est que quelqu’un a enterré une caisse pleine d’or en dessous de ses racines, et que c’est cette caisse d’or qui l’empêche de se nourrir : si on enlève la caisse, il se nourrira et il guérira. Et tu diras au lion que pour qu’il retrouve l’appétit il n’a qu’à manger le premier idiot qu’il rencontrera : alors il retrouvera son appétit ».
Alors le jeune homme demande à Dieu : « Mais, et moi alors, qu’est-ce que vous me dites ? »
Dieu : « Mais pour toi, c’est encore plus simple : cours, ta chance est devant toi ».
Alors il se met à courir : « Ma chance est devant moi, ma chance est devant moi, ma chance devant moi ! »
Il arrive auprès de la femme. La femme lui dit : « Alors, tu as vu Dieu ? » Il lui répond : « Tu n’as qu’à te marier avec le premier homme que tu rencontreras, tu seras très heureuse et l’homme sera très heureux ». La femme : « Tu es le premier homme que je rencontre, on n’a qu’à se marier tous les deux ». Mais lui : « Non, ma chance est devant moi … »
« Ma chance est devant moi, ma chance est devant moi ! » Il court, et il arrive auprès de l’arbre.
L’arbre lui dit “Alors, tu as rencontré Dieu ?
– Oui. C’est quelqu’un qui a enterré une caisse pleine d’or dans tes racines, cette caisse d’or t’empêche de te nourrir, il suffit qu’on enlève la caisse et tu te nourriras et tu guériras ».
L’arbre lui dit : « Mais enlève la caisse et garde la avec son contenu.
– Tu crois que je suis fou ? Alors que ma chance est devant moi ? Je n’ai pas de temps à perdre ! »
« Ma chance est devant moi ! Ma chance est devant moi ! Ma chance est devant moi ! Ma chance est devant moi ! » Et il arrive auprès du lion.
Le lion lui dit : « Alors tu as vu Dieu ?
– Oui, j’ai vu Dieu, mais pour toi ça va être plus compliqué ».
Le lion : « Pour moi ça va être compliqué ? Pourquoi cela va être compliqué ?
– Dieu a dit que, toi, tu n’as qu’à manger le premier idiot que tu rencontreras et tu retrouveras ton appétit, mais cet idiot, où vas-tu le rencontrer ? … »
Et le lion a retrouvé son appétit en le mangeant.
(rires et applaudissements)
Sotigui : Aujourd’hui, l’avidité nous perd de plus en plus. De même, l’ignorance de nos limites.
« N’agis pas de manière à ce que ta raison devienne ton tort ».