Les voyageurs en Festival

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Les voyageurs en Festival

Le 25 Mai 2013
Denis Podalydès dans LA TRAGÉDIE DU ROI RICHARD II de William Shakespeare, mise en scène Jean-Baptiste Sastre, Festival d’Avignon 2010. Photo Christophe Raynaud de Lage.
Denis Podalydès dans LA TRAGÉDIE DU ROI RICHARD II de William Shakespeare, mise en scène Jean-Baptiste Sastre, Festival d’Avignon 2010. Photo Christophe Raynaud de Lage.
Denis Podalydès dans LA TRAGÉDIE DU ROI RICHARD II de William Shakespeare, mise en scène Jean-Baptiste Sastre, Festival d’Avignon 2010. Photo Christophe Raynaud de Lage.
Denis Podalydès dans LA TRAGÉDIE DU ROI RICHARD II de William Shakespeare, mise en scène Jean-Baptiste Sastre, Festival d’Avignon 2010. Photo Christophe Raynaud de Lage.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 117-118 - Utopies contemporaines
117 – 118

Qui sont-ils ?

ILS VIENNENT du Nord et du Midi, du Lev­ant et du Couchant pour un jour, un week-end, une semaine, tout juil­let. Des fidèles de tou­jours, des accros, mais aus­si ceux qui essayent, décou­vrent, passent par hasard. Des vieux sages et des jeunes fous et l’inverse. Ils vien­nent s’immerger : ce n’est ni le Gange, ni Lour­des, mais ça a quelque chose du fleuve sacré, du pèleri­nage, du ressource­ment, du car­a­van­sérail et de la fête foraine. Avi­gnon, le labyrinthe médié­val et religieux, la ville des pon­tif­es, des bâtis­seurs de ponts, de Bénezet à Vilar, des ponts de pierre et des ponts intérieurs, entre artistes et spec­ta­teurs, entre cul­tures et his­toires, dans le temps et dans l’espace.

Là, cha­cun est jeté, débar­que, accoste, dans le vent, le soleil, et même l’orage, avec son corps, ses yeux, ses oreilles comme unique bous­sole à la recherche de soi, des autres, d’un autre rivage que celui de la prison des con­traintes du Sys­tème. Dans cette Odyssée à tra­vers le Fes­ti­val, nul ne peut se dis­penser de se laiss­er déplac­er, boule­vers­er, trans­former, les uns par les autres. Les spec­ta­teurs-audi­teurs devi­en­nent acteurs parce que sans eux ce qui se joue, devant eux et pour eux, n’est rien. Et les comé­di­ens, met­teurs en scène et tech­ni­ciens se retrou­vent spec­ta­teurs et béné­fi­ci­aires de ces étrangers devenus parte­naires d’un moment, d’un soir, leur ren­dant au cen­tu­ple ce qu’ils don­nent.

On ne trou­ve pas ce qu’on cher­chait parce que par­ticiper à une représen­ta­tion c’est pren­dre le risque de se retrou­ver décalé, en chantier, en réin­ven­tion, « in progress » dis­ent les Anglais. On abor­de le fes­ti­val comme on s’engage dans une tra­ver­sée. Il faut s’y fray­er un chemin, accepter d’être dérouté, d’essuyer des grains de vent et de pluie, de sup­port­er des nuits suf­fo­cantes
et faire le pari des ren­con­tres. De toutes cul­tures, peu­ples, langues et nations : entre Babel et Jérusalem, le car­refour des spec­ta­teurs, des arti­sans en théâtre, des touristes, habi­tants et com­merçants est une véri­ta­ble fab­rique d’humanité.

Mais qu’est-ce qui est con­vo­qué, atteint, trans­for­mé de nous, spec­ta­teur d’un soir, adepte assidu ou vieux routi­er d’Avignon en fes­ti­val ?

Le corps, bien sûr et d’abord. On en prend plein les yeux, plein les oreilles. Et plus encore de la sur­face de la peau au fond des entrailles, on est sec­oué, retourné, brassé, par­fois même, transper­cé, naufragé et résiliant. Au long des jours, des nuits, de la sur­face de la pierre
à l’ombre rafraîchissante des arch­es, des porch­es et des arbres, dans le dédale des rues et des salles obscures – petites boîtes, garages relookés, théâtres ou opéra, un rythme des corps s’ébauche. Et à l’intérieur de cette orches­tra­tion de la ville et du temps qu’il y fait, se des­sine pour cha­cun et cha­cune le par­cours choré­graphique des évène­ments physiques, sen­soriels et émo­tion­nels qu’il / elle va y vivre. Objet d’un choix ? Pas tou­jours parce que l’imprévu s’y invite. On encaisse, on réag­it, on subit, on s’enfuit, on est rat­trapé.

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François Orsoni
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Frère Samuel
Samuel Rouvillois (frère Samuel) est titulaire d’un doctorat de philosophie à l’Université de la Sorbonne...Plus d'info
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