« La spécialisation est plus une maladie qu’une solution. »

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« La spécialisation est plus une maladie qu’une solution. »

Un portrait 
de François Sarhan

Le 24 Nov 2013
Extrait du film The Suitcase de François Sarhan, 2017.

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Extrait du film The Suitcase de François Sarhan, 2017.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 136 - Théâtre Musique
136

« Les scènes de l’art ne pour­ront plus se délim­iter les unes par rap­port aux autres, elles s’ouvrent, s’effrangent avec le monde virtuel, elles renon­cent aux espaces pro­tégés et her­mé­tiques des cul­tures légitimes. »1

La lec­ture récente du philosophe Har­ry Lehmann est venue traduire les intu­itions que François Sarhan (né en 1972), comme plusieurs col­lègues com­pos­i­teurs de sa généra­tion (on pour­rait citer Lau­rent Durupt ou Jonathan Pon­tier), s’est attaché à con­cré­tis­er depuis sa sor­tie du Con­ser­va­toire de Paris, à l’orée du mil­lé­naire. Bardé de tous les prix néces­saires à la légitim­ité insti­tu­tion­nelle d’un « com­pos­i­teur con­tem­po­rain » en France, mais méfi­ant vis-à-vis de « cette con­cep­tion finale­ment sclérosante de l’excellence à la française, dans laque­lle les gens sont telle­ment bien éduqués à obtenir un niveau élevé dans un champ très délim­ité », il a préféré très vite aller voir ailleurs. Géo­graphique­ment, du côté de Prague, des pays scan­di­naves ou de Berlin où il vit aujourd’hui, comme esthé­tique­ment, en s’éloignant très vite des car­cans canon­iques : « Je cher­chais en quoi la musique pou­vait faire sens pour moi quand je la fai­sais, et je voy­ais bien que ce n’était pas dans les formes clas­siques con­cer­tantes. Il y avait de toute évi­dence la ques­tion du matéri­au : le sen­ti­ment que cette quête per­pétuelle du tra­vail du matéri­au ne por­tait plus le sens et l’identité con­tes­tataires qu’elle pou­vait avoir dans les années 1960 – 70, dis­ons de Boulez à Fer­ney­hough, quand il y avait encore de la terre à retourn­er. Com­ment faire de la musique qui fasse sens, tout sim­ple­ment, sans revenir à une sorte de postro­man­tisme pré­colo­nial qui me dégoûte ni con­tin­uer sur une lancée qui peut être fasci­nante intel­lectuelle­ment, mais qui finit par tourn­er au byzan­ti­nisme ? Car cette musique-là n’intéresse plus per­son­ne : ni les musi­ciens ni le monde… »

Toutes les œuvres de François Sarhan ont ain­si une dimen­sion extra musi­cale. Au-delà du « genre » théâtre musi­cal – ce genre « un peu méprisé : les gens de la musique trou­vent que c’est de la mau­vaise musique, et les gens de théâtre ne s’y intéressent guère (et il est vrai que c’est sou­vent déce­vant par rap­port à ce que l’on peut voir sur les scènes théâ­trales) » –, il s’agit surtout d’inventer « des formes autres que ces pièces frontales d’une heure avec un petit ensem­ble qui par­le et qui bouge, dont finale­ment les grandes fig­ures du ‘théâtre musi­cal’, Kagel, Berio, Aperghis, Goebbels, ne sont pas vrai­ment sor­ties. Des formes déam­bu­la­toires, qui utilisent les nou­veaux médias, qui font appel à des non-musi­ciens, bref, qui entre­ti­en­nent un rap­port dif­férent à la fois à la scène et à la musique. C’est pourquoi je fais tou­jours des pièces qui ont une théâ­tral­ité. Mais qu’est-ce que la théâ­tral­ité ? C’est juste­ment la dis­so­lu­tion et la flex­i­bil­ité dans les médias, que ce soit l’usage du texte, le rap­port du musi­cien à la scène ou le rap­port au temps. Ce peut être un moment musi­cal entouré de films, ou des événe­ments musi­caux qui se pro­duisent dans la salle ou ailleurs. Le théâtre musi­cal, aujourd’hui, est sans doute là, dans cette espèce d’explosion du médi­um. » Les 22 et 23 sep­tem­bre dernier, au BAM, fes­ti­val de « théâtre musi­cal actuel » à Berlin, était créé Gestern und Mor­gen : sous-titrée « La Vérité sur la Vil­la Elis­a­beth », une longue et loufoque déam­bu­la­tion à tra­vers le dédale de cette anci­enne salle parois­siale du début du XXe siè­cle jux­ta­posant ou super­posant un ensem­ble de « sit­u­a­tions » (moments musi­caux, inter­mèdes « per­for­més », pro­jec­tions vidéo…).

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