La nouvelle génération d’auteurs allemands

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La nouvelle génération d’auteurs allemands

Le 27 Juil 1999
Laurent Sauvage, Gaël Baron, Josée Schulla, Marc Bodnard, Julie Pouillar etJean-Jacques Simognian dans ESCALADE ORDINAIRE de Werner Schwab, mise en scène Stanislas Nordey.
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Article publié pour le numéro
Écrire le théâtre aujourd'hui-Couverture du Numéro 61 d'Alternatives ThéâtralesÉcrire le théâtre aujourd'hui-Couverture du Numéro 61 d'Alternatives Théâtrales
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EN ALLEMAGNE, si la jeune généra­tion d’au­teurs dra­ma­tiques — celle qui s’est mise à écrire des pièces après la chute du mur, en 1989 — est aus­si diver­si­fiée que l’écri­t­ure théâ­trale elle-même, elle partage néan­moins avec l’ensem­ble des jeunes gens des sociétés occi­den­tales mod­ernes une méfi­ance absolue envers les idéolo­gies. En cette fin des années 90, les pièces à mes­sages poli­tiques ont fait leur temps. Pourquoi ? D’abord, parce qu’on ne croit plus guère que les artistes puis­sent chang­er la société : si des auteurs tels que Franz-Xaver Kroetz, Rain­er Wern­er Fass­binder Botho Strauss ou, à l’est, Hein­er Müller ou Christoph Hein pou­vaient pren­dre à bras le corps les prob­lèmes de leur époque, c’est parce que le décalage entre leur aspi­ra­tion à la lib­erté et l’hypocrisie du monde dans lequel ils vivaient était fla­grant. À l’ouest, dans les années 70, on avait à régler ses comptes avec la généra­tion précé­dente, celle qui, pen­dant le nazisme, avait fait sem­blant de ne rien savoir et qui, à l’heure de la recon­struc­tion, vivait comme si rien ne s’é­tait passé, avalant routes les couleu­vres d’une améri­can­i­sa­tion à out­rance tout en per­pé­tu­ant les sché­mas d’une société extrême­ment con­ser­va­trice. À l’est, on avait à ruser pour déjouer les pièges de la cen­sure inspirée par une pen­sée unique, celle du par­ti dit com­mu­niste. Dans les deux cas, l’ad­ver­saire était incar­né, et le matéri­au des pièces s’im­po­sait de lui-même. Vingt ans plus tard, comme le fait juste­ment remar­quer Frank Cas­torf, le directeur de la Volks­bühne de Berlin, l’im­mense majorité des jeunes a rem­placé Marx et la bande à Baad­er par la love parade et les Ecstasies : le ter­ror­isme de la R.A.F. (Rote Armee Frac­tion) et dix-sept ans de pou­voir de Hel­mut Kohl étaient passés par là. la généra­tion des auteurs d’après 1989 est fille d’une autre pen­sée unique autrement plus dif­fi­cile à cern­er, et donc à com­bat­tre : celle du libéral­isme tri­om­phant, de la société du spec­ta­cle à l’échelle plané­taire, de la vir­tu­al­i­sa­tion du monde. Et si cer­tains vieux routiers comme Peter Zadek lui reprochent son manque d’en­gage­ment poli­tique (qui serait une des raisons de la faib­lesse des écri­t­ures con­tem­po­raines), elle réplique que le monde dont elle a hérité est imprégné des échecs de la généra­tion précé­dente, dont les com­pro­mis­sions avec le sys­tème ont débouché sur une ges­tion de la planète où tout, y com­pris la créa­tion artis­tique, y com­pris l’écri­t­ure, est régi par des impérat­ifs économiques. Mieux, la généra­tion des années 70 occupe aujour­d’hui des postes clé au sein d’in­sti­tu­tions que vingt ans aupar­a­vant, elle voulait abat­tre, ou au sein de struc­tures qu’elle a elle-même créées (la Schaubühne de Berlin est un exem­ple par­mi d’autres), et n’y laisse entr­er ses enfants qu’au compte-gouttes. Est-ce par manque de con­fi­ance en leur tal­ent ? Est-ce l’éter­nel recom­mence­ment du con­flit des généra­tions ? Pas seule­ment : c’est, beau­coup plus prosaïque­ment, la peur du risque, le souci de rem­plir les théâtres, de plaire au pub­lic et aux struc­tures qui finan­cent, Lan­der ou villes.

Dans ce tableau un peu som­bre, il existe heureuse­ment des excep­tions. Frank Cas­torf monte cette année TERRORDROM une pièce de Tim Staffel, un auteur de trente-trois ans, à la pres­tigieuse Volks­bühne. Dea Loher, née en 1964, lau­réate en 1998 du fes­ti­val de Mül­heim récom­pen­sant la meilleure pièce con­tem­po­raine de langue alle­mande, tra­vaille depuis cinq ans avec le Schaus­piel­haus de Hanovre, où ses pièces sont mis­es en scène par Andreas Kriegen­burg, étoile mon­tante de la mise en scène out­re-Rhin. la dernière pièce de Daniel Call ( né en 1967), IM ElNVERNEHMEN( EN ACCORD), a été mon­tée qua­torze fois au cours de la sai­son dernière. Mais le plus sou­vent, les jeunes auteurs sont relégués dans de petits théâtres, ou des struc­tures alter­na­tives, quand on ne les con­sole pas en organ­isant de sim­ples cycles de lec­tures de leurs pièces. Cer­tains d’en­tre eux voient ain­si leurs pièces lues jusqu’à vingt fois, sans la moin­dre per­spec­tive de mise en scène. On pour­ra répli­quer que les auteurs dra­ma­tiques ont ren­con­tré ce prob­lème à toutes les épo­ques. Certes, mais cer­taines épo­ques leur per­me­t­taient, au bout de cinq ou dix ans, de rejoin­dre les grandes scènes (qu’on songe aux mêmes Strauss, Kroetz ou Fass­binder). Aujour­d’hui, cer­tains jeunes auteurs incon­nus vieil­lis­sent en restant peu con­nus.

Ces dif­fi­cultés expliquent aus­si que les pièces des jeunes auteurs dépassent rarement sept à huit per­son­nages, quand elles ne sont pas des huis-clos à deux, trois ou max­i­mum quarre ; les auteurs sont sou­vent poussés par leurs édi­teurs (gui, en Alle­magne, jouent aus­si le rôle de con­seillers lit­téraires et d’a­gents) à créer ces formes légères, plus sus­cep­ti­bles d’être mon­tées à moin­dre frais dans les théâtres.

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