Territoires — Entre l’homme et l’animal

Territoires — Entre l’homme et l’animal

Le 15 Avr 2005
PARROTS & GUINEA PIGS de Jan Fabre, 2002. Photo Wonge Bergmann.
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Article publié pour le numéro
L'épreuve du risque-Couverture du Numéro 85-86 d'Alternatives ThéâtralesL'épreuve du risque-Couverture du Numéro 85-86 d'Alternatives Théâtrales
85 – 86
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« DANS LES TOUS PREMIERS TEMPS quand les hommes et les ani­maux vivaient ensem­ble sur la terre une per­son­ne pou­vait devenir un ani­mal si elle le souhaitait et un ani­mal pou­vait devenir un être humain…Tous par­laient le même lan­gage. »

Con­te Inu­it eski­mo

Jan Fab­re fut-il un Inu­it dans une autre vie ? On pour­ra tou­jours s’amuser à le croire à pro­pos de cet homme qui, dans toute son œuvre, a abor­dé la ques­tion de la vie et de la mort avec la cer­ti­tude que cette dernière n’était pas une fin mais le début d’autre chose. Mais même s’il ne le fut pas, on peut penser que cet extrait de con­te inu­it plairait assez à cet artiste qui s’est tou­jours intéressé à l’animal. Celui qui est en nous, celui que nous refoulons con­stam­ment mais aus­si celui qui vit, à l’état sauvage ou domes­tique sur cette planète qui est la nôtre. Hiboux, chats, chiens, lap­ins, lièvres, papil­lons, scarabées, araignées, per­ro­quets, grenouilles… les ani­maux sur­gis­sent dans toute l’œuvre de Jan Fab­re, qu’il s’agisse d’opéra, de théâtre, de danse, de films, de sculp­tures, de dessins ou de toute autre forme d’expression.

« Quand j’étais jeune », racon­te Jan Fab­re dans un doc­u­men­taire de la télévi­sion belge réal­isé en 2002 1, « je col­lec­tion­nais des araignées dans de petites boîtes. Et alors, je ten­tais des expéri­ences. Com­ment allait bouger une araignée avec une pat­te en moins ? Et puis une autre, avec deux pattes en moins. Et si j’ajoutais des ailes de mouche à un ver de terre ? Com­ment cela fonc­tion­nerait-il ? J’étais fasciné par la mécanique de la vie. J’étais une sorte de Franken­stein créant de nou­velles vies, des êtres nou­veaux. Et je fai­sais des dessins, j’écrivais. C’est tou­jours ce que je fais aujourd’hui. »

Dans tous ses spec­ta­cles, Jan Fab­re passe le monde au micro­scope pour en faire ressor­tir à la fois l’ordre et le chaos, les inhi­bi­tions et l’animalité. À tra­vers l’art, Fab­re nous plonge ain­si dans ces états que, le plus sou­vent, nous ne voulons ou ne pou­vons pas approcher. L’animalité est en effet quelque chose qui fait peur. Le « Petit Robert » lui oppose les ter­mes d’humanité et de spir­i­tu­al­ité. Quand au verbe « ani­malis­er », il le définit de la sorte : « Ravaler au rang de la bête ». Der­rière tous ces mots, le juge­ment de valeur est immé­di­at. L’homme est la plus par­faite des créa­tures et tous les ani­maux ne sont que de pau­vres choses dont nous avons dépassé depuis longtemps l’état et les capac­ités.

Et si nous nous trompi­ons ? Si, tout à la fas­ci­na­tion que nous avons pour nous-mêmes, capa­bles de raison­ner, de sen­tir, de nous émou­voir, de rire, de pleur­er mais aus­si de tor­tur­er, de tuer par plaisir, d’affamer sci­en­tifique­ment des pop­u­la­tions entières, de pro­duire les instru­ments de notre pro­pre destruc­tion, si tout à cette con­tem­pla­tion donc, nous avions petit à petit oublié cette part ani­male qui est en nous et qui, au-delà des clichés, fait que nous sommes en vie. Quoi de plus ani­mal que de respir­er, de boire, de manger, d’uriner, de défé­quer, de bouger, de courir, de dormir… Quoi de plus ani­mal que le sang, la salive, le sperme, la sueur, les odeurs, les goûts… Quoi de plus ani­mal et de plus essen­tiel au fonc­tion­nement de base du corps humain ? Ces aspects « ani­maux » que nous ne voulons plus voir, Jan Fab­re les explore tant et plus, non pas par un quel­conque besoin de nous heurter, de nous cho­quer mais pour ten­ter de trou­ver le juste équili­bre entre ani­mal­ité et human­ité.

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Jean-Marie Wynants
Jean-Marie Wynants est journaliste et critique au quotidien Le Soir. Ancien chef du service culturel...Plus d'info
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