Voix / voies d’acteurs

Musique
Théâtre
Parole d’artiste

Voix / voies d’acteurs

Le 4 Juil 2012
Article publié pour le numéro
Couverture numéro 113_113 - Le théâtre à l’opéra, la voix au théâtre
113 – 114

DANS NOTRE ATELIER, nous vivons comme une richesse d’aborder les ques­tions du théâtre par une pluridis­ci­pli­nar­ité d’outils de recherche. Le chemin que nous pro­pose Mar­tine Ven­turel­li, qui dirige cet ate­lier, est pour cha­cun d’entre nous une aven­ture sin­gulière, un chemin qui petit à petit nous fait appréci­er et partager des « soucis » com­muns.
En ce qui con­cerne la voix, par l’approche pro­posée de tra­vailler dans un pre­mier temps le sig­nifi­ant de la langue d’un auteur, nous avons décou­vert com­bi­en pou­vaient être nuancées les réso­nances induites par la struc­ture du texte, sa ponc­tu­a­tion, ses allitéra­tions. Cela con­sti­tu­ant les prémiss­es de l’essence d’un rap­port musi­cal, pour des auteurs comme Tchekhov, Beck­ett1.
L’écoute d’abord. Par le corps. L’écoute des voix intérieures, des voix des autres, du dessin et de la matière de la musique. L’écoute ne se réduit pas à l’oreille, ni la voix aux cordes vocales. Le tra­vail de l’acteur nous sem­ble tou­jours en réso­nance avec l’auditeur que l’on est, le spec­ta­teur que l’on est. Com­ment soupçon­ner ce dont on n’est pas encore capa­ble ?

Un tra­vail au pied du texte : « le texte est d’abord dans les pieds » (MV), pour dire que c’est par la danse que le sig­nifi­ant de la langue est tra­vail­lé, don­né à enten­dre et à voir, pour dire que c’est par la choré­gra­phie que la struc­ture musi­cale du texte sera ren­due sen­si­ble, pour nous acteurs, et pour les spec­ta­teurs. Nous ne dan­sons pas sur la musique, c’est dans la musique que notre corps, par ses gestes, ses mou­ve­ments et ses déplace­ments dans l’espace, mémorise et restitue la musique du texte.
Avec ce type d’implication et de mémoire, cha­cun peut dévelop­per et dessin­er des dans­es per­son­nelles, qui nous per­me­t­tent d’investir autrement la musique du texte ; une autre sorte de par­ti­tion arrive, qui se décolle du texte pro­posé. En effet celui-ci se des­sine, vit et s’inscrit dans nos corps et sur la scène, de manière per­son­nelle et col­lec­tive. Com­mence l’accord et la corps-et-gra­phie.

Dans la dernière mise en scène où nous sommes ryth­mique­ment plongés dans la nuit2, pour tra­vailler ces voix cha­cun apprend à cul­tiv­er des per­cep­tions cor­porelles sub­tiles pour se retrou­ver dans l’espace acous­ma­tique. Cha­cun fait le voy­age de la genèse de sa voix, jusqu’à ce que la scène devi­enne un grand corps, dont le souf­fle et les res­pi­ra­tions, avant même le sens, envahissent l’oreille du spec­ta­teur.
Chercher aus­si plusieurs types de voix en soi (voix de l’enfance, voix féminines, mas­cu­lines, voix stéréo­typées…)3 – ces voix, nous les avons comme retrou­vées, à par­tir d’un tra­vail cor­porel et non dans une image à attein­dre. Le souci est qu’elles son­nent juste, pas seule­ment au sens musi­cal, mais juste d’une har­monie entre corps, voix et nature de texte.

Un dia­logue se tisse, à la fois sonore et silen­cieux, un accord vibrant pro­gres­sif sur ce que l’on joue, sur ce qui se joue entre ce que le met­teur en scène et les acteurs ne reti­en­nent pas, effacent, aidant à artic­uler autrement la par­ti­tion : par­ti­tion sonore tis­sée dans son fonde­ment avec la par­ti­tion choré­graphique et la par­ti­tion des lumières.
Ce tra­vail sur l’invisible est en lien avec les propo­si­tions des voix poly­sémiques du met­teur en scène, qui for­ment presque un chant, et dont nous avons appris à écouter les silences.

  1. Ou Shake­speare, Gabi­ly, Joyce, Rabelais… Ou des textes poé­tiques pro­posés (Tsve­taie­va, Rit­sos, Michaux, Dick­in­son, Tardieu, Ver­heggen…), comme autant de sous textes. MV a aus­si mis en scène PAUL LES OISEAUX, du poète con­tem­po­rain Erwann Rougé, nous per­me­t­tant de vivre la poésie autrement que par la lec­ture soli­taire et silen­cieuse. ↩︎
  2. CELUI QUI NE CONNAÎT PAS L’OISEAU LE MANGE, texte-par­ti­tion et mise en scène Mar­tine Ven­turel­li, avec six comé­di­ens et une chanteuse lyrique. Étapes de la recherche présen­tées à Berlin (Acud Théâtre — Lycée Français — Insti­tut Français), Sibiu (Fes­ti­val Inter­na­tion­al), Mat­era-Pis­tic­ci (Luca­nia Film Fes­ti­val). ↩︎
  3. Pre­mière for­mal­i­sa­tion de ces ques­tions dans ALICE (Lewis Car­oll-Dario Fo), solo poly­phonique. Per­for­mance pro­posée par Mar­tine Ven­turel­li pour une actrice Riwana Mer. Anniver­saire Lewis Car­oll, Palais-Roy­al, Paris. ↩︎
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