Georges Banu — L’Institut d’Etudes Théâtrales1 a organisé toute une série de débats avec des metteurs en scène, des auteurs autour de leur travail, de leurs recherches. Aujourd’hui nous avons invité·quatre scénographes, dont l’œuvre appartient à des esthétiques différentes, afin de parler de la dimension visuelle du théâtre et de l’apport du scénographe à la conception comme à la réalisation d’un spectacle. Je pense que la meilleure manière consiste à poser quelques questions sur la scénographie actuelle…
Jean-Paul Chambas — Je ne suis pas scénographe.
G.B. — Pourquoi, n’êtes-vous pas scénographe ?
J.P.C. — Parce que je ne sais pas le faire.
G.B. — Qu’est-ce que cela veut dire, faire une scénographie ? Si on commence par là, il y a de fortes chances qu’on parle des choses essentielles.
J.P.C. — Cela veut dire que je suisobligé d’employer quelqu’un pour la scénographie quand je fais un décor. Cela m’ennuie beaucoup parce que ça coûte cher… Ça s’arrête là.
Etudiante — La question se pose différemment pour lui car il est peintre avant d’être scénographe.
Yannis Kokkos — Personnellement je revendique le statut de scénographe, même si on peut débattre sur le contenu recouvert par la notion. Je crois qu’il existe un métier extrêmement particulier, celui de plasticien au théâtre. Il y a des gens qui viennent de l’architecture, de la peinture ou d’autres domaines, mais tous s’affrontent à une difficulté spécifique, propre au théâtre, à la scène. Il s’agit de s’affronter à un spectacle dans sa totalité, autant sur le plan du texte que sur celui de l’image à produire et de l’espace scénique, même si celui-ci se rattache non seulement au théâtre, mais aussi à la peinture ou à l’architecture.
G.B. — Comment se situe le scénographe entre les impératifs de construction d’un espace scénique et ceux concernant l’aménagement d’un lieu de jeu ?
Y.K. — La scénographie ne se résume pas simplement à la production d’un objet, d’un espace plastique visible sur scène. J’estime que le scénographe ne produit pas seulement l’image finale, mais il participe à l’intégralité du processus qui mèneversla conception qui régit une mise en scène. Je n’assure pas une sorte d’intendance plastique du spectacle, je m’intègre comme une sorte de co-auteur.
Claude Lemaire — C’est la seule manière de participer à un spectacle et il serait difficile d’aborder le travail différemment. Le scénographe assure la prise en charge globale du spectacle.