Depuis leur rencontre en 1985, Nicole Mossoux et Patrick Bonté élaborent des spectacles aux frontières de la danse et du théâtre. La recherche qu’ils mènent, dans la diversité de leurs réalisations, tend un miroir à notre inquiétante étrangeté, à nos fantasmes obscurs et interroge les incohérences de notre rapport au monde. Dans le duo qu’ils forment, chacun prend tour à tour l’initiative d’un projet et l’autre l’accompagne pour le pousser dans ses derniers retranchements. Ils s’entourent aussi d’interprètes capables de proposer des matières gestuelles qui alimenteront l’écriture des spectacles, ainsi que de musiciens, scénographes, costumiers, dont l’apport se fond inextricablement dans la réalisation des œuvres. Les spectacles de la compagnie Mossoux-Bonté ont été présentés un peu partout dans le monde.
WT
Le travail d’écriture scénique de la cie Mossoux-Bonté se définit par un rapport spécifique à l’être-en- scène. Dans ton texte, tu abordes les enjeux du corps, de la chair, du temps et de l’espace. Est-ce que cette relation particulière à la scène a été influencée par ta formation philosophique ?
PB L’étude de la philosophie a été une étape importante dans ma formation, mais la philo- sophie n’a jamais, pour ma part, suscité la pre- mière intuition d’un spectacle. Bien que j’éprouve encore aujourd’hui beaucoup de plaisir à aborder des ouvrages de philosophie, je ne pense pas en ces termes au moment de la création. La matière discursive du texte philosophique ne rencontre pas la substance fantasmagorique que nous désirons, Nicole et moi, faire apparaître en scène. La scène a besoin de nos obsessions, de nos délires intimes, de nos fantasmes, je dirais de mettre les mains dans une « épaisseur de trouble ». La philosophie confirme parfois certaines idées et soulève de nouvelles questions, mais elle n’est pas à l’origine de nos spectacles.