Il faut apprendre à cheminer avec l’auteur

Il faut apprendre à cheminer avec l’auteur

Entretien avec Patrice Chéreau

Le 8 Sep 1995
Lambert Hamel, Thomas Holtzmann. DANS LA SOLITUDE DES CHAMPS DE COTON, mise en scène Alexander Lang, Münchner Kammerspielen, 1987.
Lambert Hamel, Thomas Holtzmann. DANS LA SOLITUDE DES CHAMPS DE COTON, mise en scène Alexander Lang, Münchner Kammerspielen, 1987.

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Lambert Hamel, Thomas Holtzmann. DANS LA SOLITUDE DES CHAMPS DE COTON, mise en scène Alexander Lang, Münchner Kammerspielen, 1987.
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Patrice Chéreau a don­né cet entre­tien à Didi­er Méreuze en octo­bre 1987.

Didi­er Méreuze : Votre pre­mière mise en scène d’un texte de Bernard-Marie Koltès — COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS — coïn­cide avec votre arrivée à la direc­tion du Théâtre des Amandiers de Nan­terre. C’est même ce spec­ta­cle qui a mar­qué son inau­gu­ra­tion. Ce n’est pas un hasard ?

Patrice Chéreau : C’est un hasard et pas. C’est grâce à Hubert Gig­noux, qui a tou­jours énor­mé­ment défendu Koltès, que j’ai décou­vert COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS. Koltès me l’avait envoyée par la poste et je n’y avais pas vrai­ment fait atten­tion — dans la mesure où les pièces qui vous arrivent par la poste sont rarement bonnes et qu’on ne les lit presque jamais. Et puis j’ai ren­con­tré Gig­noux qui savait qu’il s’agis­sait d’un grand auteur, d’une écri­t­ure. Je l’ai lue. Et même si, au départ, je n’y suis pas entré tout de suite, parce que ça par­lait d’his­toires de l’Afrique, d’un chantier — tout un monde avec lequel je n’avais pas d’atomes crochus -, j’ai com­pris, à la pre­mière ligne, qu’il s’agis­sait effec­tive­ment d’un véri­ta­ble auteur, mais un auteur comme il n’y en a pra­tique­ment pas en France, et qui ne se com­pare absol­u­ment pas à ce que l’on appelle com­muné­ment les « jeunes auteurs » du théâtre français, à l’écri­t­ure plus volon­tiers logo­machique.

Après, il a fal­lu faire abstrac­tion des gens qui se con­tentaient de dire « oui, c’est pas mal » avec une moue, par dis­trac­tion, et trou­ver l’oc­ca­sion de la mon­ter. J’ai même fail­li le faire au TNP. Et puis il y a eu PEER GYNT. En fait, ce n’est qu’au moment de mon arrivée à Nan­terre que le pro­jet a pu se réalis­er. C’é­tait très bien : cela cor­re­spondait, pour moi, à une volon­té de met­tre en avant les auteurs con­tem­po­rains — puisque, ensuite, j’ai mon­té LES PARAVENTS de Genet. Deux mis­es en scène d’au­teurs con­tem­po­rains — dont la pre­mière coïn­cidait avec l’in­au­gu­ra­tion de la sai­son -, ça me sem­blait un min­i­mum.

Tra­vailler sur une œuvre clas­sique et tra­vailler sur une pièce con­tem­po­raine, ça n’est pas la même chose. Mon­ter un « clas­sique » pose moins de prob­lèmes qu’un texte con­tem­po­rain. On y a des références. On peut se bat­tre secrète­ment con­tre une mise en scène que l’on a vue, une inter­pré­ta­tion que l’on juge con­testable. Et même si on se lance dans des propo­si­tions aber­rantes sur DOM JUAN, LE MISANTHROPE ou HAMLET, ça ne tire pas vrai­ment à con­séquence. Parce que cha­cun peut tou­jours lire ou relire ces pièces et que les autres inter­pré­ta­tions courent tou­jours.

Dès que l’on abor­de les textes con­tem­po­rains, on se place sur un ter­rain beau­coup plus déli­cat : il n’y a plus de mode d’emploi. On se retrou­ve en présence d’un objet non iden­ti­fié, totale­ment neuf — qu’il ait déjà été joué ou non -, qui ne répond à aucune norme habituelle. Et le fait d’avoir tra­vail­lé sur Shake­speare ou Tchekhov n’est d’au­cun sec­ours. L’ab­sence de références con­traint à chercher ailleurs. Il faut par­venir à faire enten­dre le plus exacte­ment et le plus sim­ple­ment pos­si­ble ce qui doit être enten­du, tout en don­nant à l’œu­vre présen­tée toutes les chances de survie. C’est aus­si une respon­s­abil­ité très lourde…

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