L’écriture creuse intérieurement

L’écriture creuse intérieurement

Entretien avec Joël Jouanneau

Le 9 Oct 1995
Marc Berman dans LE CONDOR de Joël Jouanneau. Photo Frédéric Champy.
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Marc Berman dans LE CONDOR de Joël Jouanneau. Photo Frédéric Champy.
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Werner Schwab-Couverture du Numéro 49 d'Alternatives ThéâtralesWerner Schwab-Couverture du Numéro 49 d'Alternatives Théâtrales
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ANNA COLAO : Quel regard portez­ vous – en tant qu’au­teur et met­teur en scène – sur l’écri­t­ure théâ­trale con­tem­po­raine ?

Joël Jouan­neau : Je crois que l’écri­t­ure théâ­trale en France a con­nu une péri­ode que seule la France a con­nue au·lendemain de la guerre : elle a ren­con­tré le nou­veau roman, Après la guerre, en Alle­magne, la ques­tion du sens de (‘His­toire, de la cul­pa­bil­ité, de la respon­s­abil­ité, a poussé les auteurs alle­mands à faire de l’His­toire la matière même de l’écri­t­ure. Dans le même temps, en France, des gens comme Beck­ett, Pinget, Sar­raute, Ionesco, se sont inter­rogés sur l’ab­sur­dité de l’his­toire. Le trop-plein de l’his­toire ou l’his­toire comme « impos­si­ble », ce sont deux démarch­es qui se nour­ris­sent. Pour les gens de ma généra­tion, nous étions totale­ment fascinés par Beck­ett tout en nous posant la ques­tion de savoir com­ment « recon­stru­ire » le théâtre. Nous nous sommes trou­vés face à un mou­ve­ment – sur le plan Lit­téraire comme pro­pre­ment théâ­tral – qui a révo­lu­tion­né le théâtre, remet­tant en ques­tion le per­son­nage, la sit­u­a­tion, et posant ain­si la ques­tion de la pos­si­bil­ité et de la néces­sité de faire du théâtre.

Ce qui me sem­ble pas­sion­nant dans ce qui se pro­duit dep­tùs cinq ou six ans en France, c’est com­ment on repart avec à la fois Beck­ett dans la tête et la néces­sité de penser cet auteur avec des per­son­nages d’au­jour­d’hui tout en réin­vestis­sant le champ social.

Mais celui qui me donne la force de con­tin­uer à écrire, c’est Koltès. QUAI OUEST est une pièce qui per­met de revis­iter l’his­toire, le social et qui redonne toute sa place à l’écri­t­ure. Sans se pos­er aucune ques­tion autre que cel­Je du bien-fondé de l’écri­t­ure.

A. C.: Vous avez l’habi­tude d’abor­der dif­férents reg­istres, de la comédie au drame (NUIT D’ORAGE SUR GAZA). Cette diver­sité fait-elle par­tie de votre façon d’écrire ?

J. J.: Peut-être, mais il y a quelque chose qui se retrou­ve au fil de toutes mes pièces : des per­son­nages mobiles et des voix. Ce qui m’in­téresse, c’est l’o­ral­ité de la langue. Quand j’écris, j’en­tends des voix, je fais ça à l’or­eille. La rue, les gens, me don­nent des matéri­aux à par­tir desquels j’éla­bore des écri­t­ures. Après la dif­fi­culté des pre­mières pages, il y a une logique interne, autonome à une scène et à une pièce.

Lorsqu’un per­son­nage dif­fère des autres, j’es­saie tou­jours de faire en sorte qu’il ait sa pro­pre langue. Dans LE CONDOR, les cinq femmes sont un chœur à cinq voix. Elles ont cha­cune leur iden­tité, et en même temps, c’est la même voix. Par con­tre, l’homme, Léo Moran, est quelqu’un de sans arrêt cas­tré, il ne ter­mine jamais ses phras­es.

Sou­vent, ce n’est que lorsque j’ai une struc­ture très coerci­tive que je peux com­mencer à écrire. Il faut que je me sente presque dans un car­can de rigueur et de règles que je m’im­pose à moi-même pour que l’écri­t­ure se trou­ve. Cela vient du fait que je tra­vaille beau­coup la rela­tion avec la musique. Ma dernière pièce, ALLEGRIA OPUS 147  a été écrite en écoutant une sonate pour alto et piano de Chostakovitch. Dans LE BOURRICHON, tout était basé sur des reg­istres de march­es. J’aime trou­ver des con­stantes.

Marc Berman dans LE CONDOR de Joël Jouanneau. Photo Frédéric Champy.
Marc Berman dans LE CONDOR de Joël Jouan­neau. Pho­to Frédéric Champy.

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Joël Jouanneau
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