L’ange Platel

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L’ange Platel

Le 28 Avr 2014
Lisi Estaras, Bérengère Bodin, Ross McCormack et Elie Tass dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Platel. Photo Chris Van der Burght.
Lisi Estaras, Bérengère Bodin, Ross McCormack et Elie Tass dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Platel. Photo Chris Van der Burght.

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Lisi Estaras, Bérengère Bodin, Ross McCormack et Elie Tass dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Platel. Photo Chris Van der Burght.
Lisi Estaras, Bérengère Bodin, Ross McCormack et Elie Tass dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Platel. Photo Chris Van der Burght.
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 120 - Les théâtres de l'émotion
120
Romeu Runa et Lisi Estaras (devant), Elsie de Brauw, Ross McCormack,
Bérengère Bodin
et Elie Tass (derrière) dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Platel.
Photo Chris Van der Burght.
Romeu Runa et Lisi Estaras (devant), Elsie de Brauw, Ross McCor­ma­ck, Bérengère Bod­in et Elie Tass (der­rière) dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Pla­tel.
Pho­to Chris Van der Burght.

Face à une créa­tion d’Alain Pla­tel, on est envahi par le sen­ti­ment d’être entraîné vers des hori­zons où l’on n’est jamais allé. Com­ment va-t-il s’y pren­dre pour inven­ter de nou­velles formes et nous sur­pren­dre encore ? On pense, en voy­ant ses spec­ta­cles à cette phrase de Joyce qui s’applique si bien à sa démarche : 
« Je veux ser­rer dans mes bras la beauté qui n’est jamais encore parue au monde ».

D’une réal­i­sa­tion à l’autre, on retrou­ve chez Pla­tel cette manière par­ti­c­ulière de traiter le corps avec vio­lence et ten­dresse, avec une sorte d’énergie du dés­espoir où vont poindre des moments d’humanité boulever­sante.

Tauber­bach est né de la propo­si­tion d’une actrice néer­landaise, Elsie de Brauw, qui voulait unir danseurs et acteurs dans un pro­jet métis­sé, et de la vision du doc­u­men­taire de Mar­cos Pra­do, Estami­ra, l’histoire d’une femme atteinte de schiz­o­phrénie qui vit et tra­vaille sur la décharge de Jardim Gra­ma­cho à Rio de Janeiro. La vision de ce film et de cette his­toire ne pou­vait que touch­er pro­fondé­ment Alain Pla­tel dont la for­ma­tion ini­tiale en orthopéd­a­gogie l’a amené à tra­vailler avec des gens atteints d’handicaps physiques et men­taux. 

Ce fil rouge que l’on retrou­ve à tra­vers tous ses spec­ta­cles, le traite­ment de cette pro­fonde human­ité qui sur­git de la dif­férence, atteint ici des dimen­sions poignantes.

Vivre sur un dépo­toir au Brésil – dans le spec­ta­cle il sera fig­uré par un amon­celle­ment de vête­ments au rebus comme on peut en trou­ver sur des marchés aux nippes – c’est aus­si une métaphore du des­tin de tout être aban­don­né à lui-même et rejeté par le monde où il n’a pas trou­vé sa place et où il lutte dés­espéré­ment pour trou­ver un équili­bre. Ces vête­ments qui jonchent le plateau par­ticipent d’une esthé­tique du recy­clage très présente dans le tra­vail d’Alain Pla­tel.

Lisi Estaras (derrière),
Ross McCormack
enlève Elie Tass
dans TAUBERBACH, mise
en scène Alain Platel.
Photo Chris Van der Burght.
Lisi Estaras (der­rière), Ross McCor­ma­ck enlève Elie Tass dans TAUBERBACH, mise en scène Alain Pla­tel.
Pho­to Chris Van der Burght.

L’actrice qui fig­ure Estami­ra dans le spec­ta­cle récite à inter­valles réguliers des for­mules, dont cer­taines sont incom­préhen­si­bles car for­mulées dans un lan­gage inven­té qui n’appartient qu’à elle (Pla­tel dit qu’elle télé­phone à Dieu) mais d’où éma­nent par­fois des « slo­gans » de survie comme « stay in con­trol ! stay in con­trol !  » ou « I am ok in my life ». Dans un monde qu’on a (qui nous a) aban­don­né, il faut dire pour ne pas mourir, par­ler pour con­jur­er ses angoiss­es.

Out­re l’actrice/Estamira, il y a sur la scène deux autres femmes et trois hommes, tous acteurs danseurs, qu’on peut croire sur­gis de l’imagination, des sou­venirs ou des phan­tasmes du per­son­nage prin­ci­pal. S’ils veu­lent par­fois s’enfuir en s’accrochant aux por­tants qui s élèvent vers les cin­tres, ils seront inex­orable­ment ramenés vers le sol. Il n’y a pas d’échappées pos­si­bles, c’est sur la terre que nous devons nous mesur­er à notre sort.

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Bernard Debroux
Écrit par Bernard Debroux
Fon­da­teur et mem­bre du comité de rédac­tion d’Al­ter­na­tives théâ­trales (directeur de pub­li­ca­tion de 1979 à 2015).Plus d'info
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