Comment trouver des nouvelles alternatives ?

Théâtre
Edito

Comment trouver des nouvelles alternatives ?

Le 23 Jan 2017
Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 128 - There are aslternatives!
128

Sous le titre There are alter­na­tives la nou­velle équipe de direc­tion a souhaité analyser la sit­u­a­tion actuelle. Com­ment les arts de la scène peu­vent-ils se pro­fil­er dans un monde aus­si changeant que celui nous vivons pour le moment ? Quelles sont les alter­na­tives pour le développe­ment  d’un art  minori­taire, accusé d´être trop éli­tiste, qui s’inscrit aus­si davan­tage dans une société néolibérale exigeant plus de créa­tiv­ité, de flex­i­bil­ité mais où la rentabil­ité est un fac­teur monop­o­lisant l´espace pub­lic. Avec pour résul­tat que beau­coup, dans les domaines de théâtre, danse, lit­téra­ture, musique et film, risquent de se trans­former en pure diver­tisse­ment pour rem­plir les salles et les caiss­es des pro­duc­teurs.

Mais comme sug­gère le titre de la pub­li­ca­tion, il existe des alter­na­tives. Cer­tains auteurs revendiquent un théâtre qui serait davan­tage mil­i­tant, d’autres plus poli­tique mais de façon détournée. Le prob­lème est de trou­ver un équili­bre entre le théâtre insti­tu­tion­nal­isé sub­sidié, le milieu asso­ci­atif et le théâtre-action où on expéri­mente et réin­vente beau­coup aujourd´hui (…). « Le théâtre gagne, comme le défend Jean-Marie Piemme, une lib­erté nou­velle, celle d´expérimenter sans con­traintes et sans lim­ites. »

Le con­cept d’oeuvre tend aujourd´hui à s’inscrire tout entier dans la présence, le moment et le fait même d´être ensem­ble ici et main­tenant impli­quant de moins en moins la préex­is­tence d’un texte écrit par un auteur. Mais comme Nan­cy Del­halle écrit dans son texte : « Réaf­firmer le théâtre comme espace et temps pub­lic. Pour une alter­na­tive démoc­ra­tique » :  « Or, aujourd´hui quel est l’état de l’institution sus­cep­ti­ble d’inscrire le théâtre dans le mail­lage social afin qu’il con­tribue à faire la cul­ture ? »

Les créa­tions in situ ne font qu’augmenter et ouvrent les pos­si­bil­ités d’autres publics. Les uni­ver­si­taires doivent arrêter de se calfeu­tr­er dans leurs univers et sor­tir pour soutenir la rue, pour créer des alter­na­tives con­crètes, revendique David Mur­gia. Col­ine Struyf prend l’exemple de quand elle a mon­té son spec­ta­cle L’Insurrection qui vient avec un col­lec­tif d´acteurs au Théâtre Nation­al en 2010, qui a fail­li tourné au désas­tre, à cause de l’éditeur qui pous­sait le texte à la destruc­tion des insti­tu­tions.

Com­ment peut-on mon­tr­er un geste poli­tique­ment per­tur­ba­teur aujourd’hui dans ce cadre ? Faut-il se con­tenter de s’en tenir au mou­ve­ment citoyen tel que par exem­ple Hart­boven­hard ou Toute autre chose.

Aujourd’hui, l’un et l’autre monde sont poussés à se rap­procher.

Les préjugés sont tou­jours présents car la logique insti­tu­tion­nelle reste tou­jours repliée sur elle-même. « Quelque chose me dérange dans le pou­voir qu’on attribue d’avance aux poli­tiques… La tem­po­ral­ité des poli­tiques n’est pas la nôtre : le temps de met­tre en place une logique de poli­tique cul­turelle, les artistes sont déjà ailleurs… » dit Mylène Lau­zon.

Dans le texte «  Citoyens et scènes … » on met en valeur des pro­duc­tions d’acteurs non-pro­fes­sion­nels. L’idée est de per­me­t­tre un dia­logue créatif entre le pub­lic et les acteurs. Ils vien­nent en quelque sorte de doc­u­menter leur pro­pre exis­tence. Mais ne s’agit-il pas de « faire du faux » avec du vrai, se demande Sel­ma Alaoui, l’auteure de l’article. Les exem­ples de ce genre de théâtre sont nom­breux partout en Europe.

Une forme d’action sociale qui per­met aux par­tic­i­pants non-pro­fes­sion­nels une nou­velle expéri­ence, certes, mais aus­si un genre de théâtre brut où le pub­lic est mobil­isé un peu comme au cirque où le corps prend tout son sens. Avec, en plus, un dis­cours spon­tané fondé sur les expéri­ences de cha­cun.

Le cas Ham­let de Yan Duyven­dak est un théâtre pseu­do-par­tic­i­patif car il mélange des comé­di­ens pro­fes­sion­nels avec des pro­fes­sion­nels de la loi. Une expéri­ence séduisante qui a tourné partout en Europe. Un espace d’hyper-réalité qui fait bas­culer le spec­ta­teur sur la ques­tion de la jus­tice et sa vérac­ité ( www.duyvendak.com ). Dans son dernier spec­ta­cle, Sound of Music, avec le choré­graphe Olivi­er Dubois, il s’est inspiré des arti­cles d’actualité col­lec­tion­nés dans des medias, le tout mélangé avec des mélodies pop­u­laires des années trente qui reflè­tent la cat­a­stro­phe poli­tique, écologique et sociale dans laque­lle nous sommes tou­jours embar­qués.

Dans son spec­ta­cle Les Damnés que Ivo Van Hove a mon­té au dernier fes­ti­val d’Avignon, on voit com­ment le monde de la finance agit sans aucune forme d’idéologie et com­ment le sys­tème poli­tique est tou­jours impliqué. Chez Joël Pom­mer­at, dans Ça ira (1) Fin de Louis, résonne aus­si la crise poli­tique et idéologique que nos sociétés tra­versent (voir le n°130 d’Alternatives théâ­trales). C´est une fic­tion poli­tique qui ressem­ble à un real­i­ty show prenant à part le pub­lic dans une ambiance presque inaudi­ble, inci­tant le pub­lic à s’ouvrir à la réflex­ion.

Jan Lauw­ers, qui tourne dans le monde entier, m’a dit un jour dans une inter­view que son théâtre n’est pas poli­tique dans le sens pre­mier du terme. Il souhaite attir­er l’attention sur ce qui se passe dans notre monde. Le tout rehaussé par un peu d’humour noir.

Une sit­u­a­tion peut être perçue et vécue sous plusieurs angles comme chez Pom­mer­at. Ça ira (1) Fin de Louis inter­roge directe­ment notre rap­port actuel à l’action poli­tique, nous invite à pren­dre part à une his­toire tou­jours en cours tan­dis que Jan Lauw­ers stim­ule le sens imag­i­naire par les jeux absur­des fausse­ment naïfs qui créent un choc tout en brisant nos pro­pres idées figées.

L’Amicale de pro­duc­tion est une coopéra­tive de pro­jets où les instal­la­tions, créa­tions in situ et autres per­for­mances théâ­trales s´inventent au fur et à mesure que des artistes mem­bres sig­nent un pro­jet accueil­li par l’Amicale. L‘équipe se com­pose aus­si d’une vaste équipe de respon­s­ables admin­is­trat­ifs et tech­niques qui dia­loguent en per­ma­nence avec leurs parte­naires et le pub­lic. Cette coopéra­tive créée par les artistes Antoine Defoort, Julien Four­net et Halo­ry Goerg­er est basée con­join­te­ment à Brux­elles et à Lille. Une façon de se libér­er d’une com­pag­nie tra­di­tion­nelle et qui per­met aux artistes de pilot­er leur pro­jet de recherche, de la pro­duc­tion à la dif­fu­sion.

Tout ce numéro est bien doc­u­men­té et con­tient plusieurs arti­cles qui non seule­ment font le point sur la sit­u­a­tion de la sin­istrose d’aujourd’hui mais mon­trent aus­si que la créa­tion reste tou­jours ouverte à des nou­velles formes de créa­tion, d’échanges et de réflex­ions.

Traduit par Ann Jon­s­son

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