Qu’est-ce que vous faites ensemble ?
Des créations théâtrales : les spectacles s’écrivent à partir du travail de plateau. Voilà ce qui nous anime et notre principale activité. R.d.S. – N.R.V. est né de la fusion de deux collectifs. Rien de Spécial (R.d.S.) a créé deux spectacles tout public, trois « jeune public » et une série de performances et de formes courtes. Aucune de ces formes n’est partie d’un texte. Énervé (N.R.V.) a à son répertoire trois spectacles, et seul Desperado qui est né d’une collaboration avec la compagnie flamande Tristero, est parti d’un texte préexistant.
Comment vous êtes-vous trouvés ?
Nous sommes amis de longue date, tous plus ou moins sortis de nos écoles d’art dramatique en même temps au début de ce siècle… Après quelques années de pratique nous avons très vite eu envie de nous réunir pour monter nos propres créations, en plus du travail d’acteurs et actrices que nous continuons en parallèle.
Que refusez-vous ?
Qu’affirmez-vous ?
Nous refusons de commencer les répétitions avec une conception figée de notre mise en scène. Tous les créateurs (son, scéno, lumières) suivent l’évolution du travail de répétition et créent en dialogue avec le plateau. Nous sommes attentifs à la forme et envisageons chaque représentation comme un jeu avec le public et les codes de la représentation. Nous cherchons à ce que nos spectacles soient accessibles à tous les publics et revendiquons une liberté de ton. Nous pratiquons un humour souvent qualifié d’« acide », qui nous permet d’aborder des sujets graves ou sensibles avec un regard décalé.
Quels sont vos objectifs ?
Continuer à se questionner, à se surprendre et à renouveler nos pratiques.
Comment travaillez-vous ?
Nous consacrons beaucoup de temps à discuter en amont du travail de plateau, afin de cerner et enrichir notre sujet. Ensuite nous définissons des pistes d’improvisations, puis chacun arrive avec des propositions que nous testons sur scène. Nous nous filmons. Ensuite nous défrichons et définissons une trame à partir des propositions scéniques qui nous semblent intéressantes. Nous retournons « à la table », nous discutons et écrivons/retranscrivons le texte. À partir de ce moment nous sommes toujours en aller-retour entre le plateau et la table, l’écriture évoluant sans cesse. C’est de cette façon que nous avons fonctionné jusqu’à présent, mais notre processus évolue et pour le prochain projet nous pourrions procéder différemment.
Comment se prend une décision ?
De façon collective, en discussion. En général nous sommes d’accord…
Quelle est la vie organique du groupe ?
Qui entre, qui sort ?
(comment se vit la fidélité)
Il y a le noyau de groupe : 3 acteurs pour le collectif Rien de Spécial et 2 pour le collectif Énervé. Nous sommes souvent tous sur le plateau, mais parfois il arrive que l’un d’entre nous soit à la mise en scène ou en regard extérieur. Dernièrement nous avons eu envie de faire appel à d’autres acteurs et actrices qui rejoignent l’équipe pour des projets en particuliers. Nous travaillons toujours avec le même créateur son depuis la création de nos deux collectifs (Maxime Bodson). Pour nos premières créations nous avions nous même pris en charge la scénographie. Depuis nous avons collaboré avec Prunelle Rullens et Aline Breucker, qui ont toutes deux adhéré à la démarche de « work in Progress », leurs propositions scénographiques évoluant au fil des répétitions. C’est dans ce même esprit que Laurence Halloy a créé les lumières de nos derniers spectacle. Nous travaillons souvent avec les mêmes créateurs, il est important pour nous de nous entourer d’une équipe qui porte le projet dans son ensemble. Tous les créateurs, ainsi que le régisseur ou la régisseuse, donnent leurs avis pendant les répétitions, tant au niveau de la mise en scène que de la dramaturgie. Cette multiplicité des points de vues est enrichissante. Bien sûr il faut définir un axe et faire le tri parmi ces retours avant de retourner sur le plateau.
Nous collaborons également avec d’autre compagnies. Récemment, nous avons créé Desperado avec Tristero (qui est aussi un collectif).
En mai 2019, nous avons réuni toutes les forces vives des deux collectifs (Rien de Spécial et Énervé) sur un spectacle : Rater Mieux Rater Encore. Cela a été l’occasion de se fédérer au service d’un même projet.
Quelle est la durée de vie de cette association ?
La première création du collectif Énervé Petit-déjeuner orageux un soir de carnaval a eu lieu en février 2008. Celle du collectif Rien de Spécial In Vitrine en 2010. Déjà une décennie de travail en commun. Nous nous sommes mutualisé en une seule asbl en 2018. Les collectifs continuent à avoir des lignes artistiques distinctes, tout en collaborant au niveau logistique. Nous comptons travailler ensemble sur du long terme, mais personne ne sait ce que l’avenir nous réserve !
Quelle appellation/signature ?
collectif, bande, groupe, troupe, ensemble…
Collectifs !
Quelles sont vos influences (théâtrales et non théâtrales ?)
Nous nous sentons proches des collectifs Transquinquennal ou tg stan, en Belgique. Pour la France et l’étranger, citons : Les Chiens de Navarre, Forced Entertainment, 26000 Couverts, Grand Magasin.
Constatez-vous un retour du leader ?
Non. Dernièrement nous avons ressenti le besoin de mettre quelqu’un à la mise en scène, que ce soit l’un d’entre nous ou une personne extérieure. Mais notre conception du travail de mise en scène n’est pas dans le « leadership », nous créons tous ensemble.
Y a‑t-il une dimension politique à votre démarche collective,
un projet politique à affirmer et défendre ?
Cela dépend évidemment de ce que l’on entend par politique…
Avec Rien de Spécial, nous parlons de questions « de société », comme le culte du bonheur, l’angoisse écologique ou la question du genre. Nous tentons de dénoncer ce qui ne va pas, avec humour, autodérision et en nous remettant nous-même en question. Cependant nous refusons tout didactisme et ne cherchons pas à apporter de réponse, ou à revendiquer une idéologie précise.
Avec Énervé nous sommes à un niveau personnel. Nos créations parlent de rapports de pouvoir, de manipulation, d’angoisse existentielle. Des préoccupations a priori moins politiques. Quoique…
Y a‑t-il une menace à travailler ensemble ?
Sachant que 30 % des rencontres amoureuses se font sur les lieux de travail, il y a certainement un risque, oui…