Intervenir. Une présentation du Cifas

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Intervenir. Une présentation du Cifas

Le 26 Fév 2023
Compostela de Open Akker/Futurefarmers (BE/US), création 2023 à Dilbeek. Photo Bea Borgers.
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Article publié pour le numéro
Couverture du numéro 148 - Arts vivants. Cirque marionnette espace public - Alternatives Théâtrales
148

Rien ne l’arrête. Il est tout-ter­rain. L’art vivant dans l’espace pub­lic peut être une croisière ou un karaoké. Il peut être un Domi­no Cas­cade géant ou une dérive. Il peut être une con­ver­sa­tion.

Son sujet, sa rai­son de vivre : ques­tion­ner, bous­culer, décon­stru­ire, zigouiller, bricol­er nos cadres de vie (ter­res, sols, habi­tats, géo­gra­phie, villes, chemins, com­merces).

L’art vivant dans l’espace pub­lic est cousin des arts de la rue et branche de la grande famille du spec­ta­cle vivant. L’art vivant dans l’espace pub­lic est aus­si branche de la grande famille des arts plas­tiques et visuels. Il est héri­ti­er de Fluxus, du dadaïsme et du sit­u­a­tion­nisme, des fêtes et célébra­tions pop­u­laires, de l’urbanisme utopique auto­ges­tion­naire.

L’art dans l’espace pub­lic, c’est Joseph Beuys plan­tant 7 000 chênes à Kas­sel en 1982, c’est Isabelle Jon­ni­aux et ses créa­tions en forme de jeux de piste avec J’aime beau­coup ici à Mons ou Ath en 2022. C’est qu’il prend tour à tour la forme de spec­ta­cles, de per­for­mances, d’installations, de dis­posi­tifs de ren­con­tres, d’expérimentations démoc­ra­tiques, de march­es, prom­e­nades, jeux de rôle grandeur nature, hap­pen­ings ou inter­ven­tions. Il n’est donc pas lié à une forme d’art en par­ti­c­uli­er mais au choix de faire de l’espace pub­lic le lieu et sou­vent le sujet de la ren­con­tre avec les spectateurs.ices, participants.es. L’art vivant dans l’espace pub­lic a une portée poé­tique et cri­tique à la fois. Voilà pour les coor­don­nées GPS. À Brux­elles, le Cifas, lieu d’apprentissage et d’expérimentation pour les arts vivants dans la ville et ses lisières, a fait de l’art dans l’espace pub­lic sa spé­cial­ité, sa rai­son de vivre, son fils/fille sa bataille.

Il vient juste­ment de chang­er de direc­tion. Est arrivée Marine Thévenet, pro­duc­trice chevron­née à la car­rure inter­na­tionale, un pied à L’Amicale en Hauts-de France et à Brux­elles, un pied en Bre­tagne au fes­ti­val des Tombées de la nuit, un troisième pied en Grande-Bre­tagne après dix années passées à pro­duire et accom­pa­g­n­er des artistes tra­vail­lant à la con­flu­ence de la per­for­mance et de l’art dans l’espace pub­lic à Lon­dres au sein d’Artsadmin. Elle con­nais­sait déjà bien la struc­ture, via les réseaux pro­fes­sion­nels européens comme In Situ. C’était aus­si une famil­ière de la Pro­duc­ers’ Acad­e­my, que le Cifas pro­pose au moment du Kun­sten­fes­ti­valde­sarts depuis quelques années. Avec Benoît Vreux et Antoine Pick­els, ses prédécesseurs, elle partage une vision poli­tique qui va de pair avec un engage­ment auprès des artistes et des formes mutantes et inso­lites que génère l’art dans l’espace pub­lic, par essence atten­tif à son con­texte de présen­ta­tion et aux per­son­nes. Elle dit donc volon­tiers que sa vision est un pro­longe­ment, peut-être une « rad­i­cal­i­sa­tion » au sens botanique et mil­i­tant du terme. Époque oblige. Tour­nant.

Marine « Qu’est-ce qui a changé dans nos mon­des et qu’est-ce qui a guidé ma can­di­da­ture ? Je vois trois phénomènes qui touchent les arts et la société en général. Le pre­mier, c’est la place de l’action dans les pro­jets artis­tiques comme dans la mil­i­tance, voire dans les vies quo­ti­di­ennes. L’action, le pas­sage à l’action, est devenu quelque chose de brûlant, de néces­saire et vital. Le sec­ond, c’est l’expérimentation de nou­veaux com­porte­ments, la fab­rique de bulles sociales dif­férentes et la réin­ven­tion de la coopéra­tion. Et le troisième, c’est une nou­velle rela­tion au ter­ri­toire, une rela­tion plus holis­tique, plus ani­male, plus hum­ble. L’urgence de l’action, le goût pour le faire. Cha­cune des dernières saisons du Cifas l’a en effet mon­tré : les artistes, comme nous tous, sont de plus en plus soucieux du réel, au point d’inviter de plus en plus l’action sociale ou écologique dans l’espace même de l’œuvre. Il ne s’agit plus de représen­ter, d’évoquer mais de faire. Un cran a été franchi, comme l’écrivait Bernard Stiegler dans la pré­face du livre de Paul Ardenne dédié à l’art écologique : “L’art dans l’espace pub­lic gagne du ter­rain car la réforme de nos sen­si­bil­ités, modes de vie et appren­tis­sages doit s’opérer sans atten­dre.” »

Le Cifas entend donc œuvr­er pour un espace pub­lic com­mun, pluriel, sol­idaire et résilient. Il s’agit de pren­dre sa petite part dans les opéra­tions de destruc­tion du cap­i­tal­isme en appor­tant de la diver­gence. Il ne s’agit pas d’égayer un cadre de vie, mais de le décon­stru­ire et d’accompagner sa mue. Pour ce faire, le pro­jet que Marine Thévenet met en œuvre, avec la petite équipe com­posée aujourd’hui de Char­lotte David, pili­er opéra­tionnel à l’ancrage brux­el­lois solide, de Mathilde Flor­i­ca, égale­ment pro­duc­trice atten­tion­née et inspirée et des collaborateur·rice·s régulier.ère.s et affûté·e·s comme Open Source Pub­lish­ing, se décline en trois axes :

Axe 1. Appren­tis­sage : l’éducation per­ma­nente et le coap­pren­tis­sage via divers for­mats orig­in­aux de ren­con­tres, for­ma­tions et mas­ter class­es dédiées à l’art vivant dans l’espace pub­lic qui visent à pul­véris­er les habi­tudes de con­cur­rence entre artistes au prof­it de la sol­i­dar­ité et de l’intelligence col­lec­tive.

Axe 2. Fer­al : une pro­gram­ma­tion artis­tique d’interventions dans la ville et un fes­ti­val dédié à la remise en ques­tion et à la remise en jeu de l’espace pub­lic par les artistes, théoriciens et usagers. Ouvert à tou·te·s.

Axe 3. How to share : la col­lecte et la cir­cu­la­tion de ressources dans le domaine. Pour tou·te·s égale­ment.

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