Yannic Mancel : Vous avez en 1991 donné une version théâtrale de La Maman et la putain de Jean Eustache. Or de tout ce que j’ai lu de vos déclarations d’intention ou notes d’accompagnement, ce qui me surprend le plus est que vous n’aviez jamais vu le film avec Jean-Pierre Léaud, Françoise Lebrun et Bernadette Lafont.
Jean-Louis Martinelli : C’est vrai, et je ne l’ai toujours pas vu aujourd’hui, trente-huit ans après sa parution et dix-huit ans après la mise en scène.
Y M : Comment donc le scénario et les dialogues sont-ils parvenus dans vos mains ?
J.-L. M : De la manière la plus simple qui soit. Les Cahiers du cinéma avaient édité le scénario. J’ai acheté le livre en librairie, je l’ai lu et j’ai tout de suite eu envie de le monter au théâtre. Françoise Lebrun m’a d’ailleurs confirmé pas la suite que d’autres éditeurs, et notamment Gallimard, s’étaient également intéressés à la publication du scénario. Je suis pour ma part convaincu que Jean Eustache était aussi et peut-être avant tout un homme de littérature : il pouvait réciter presque par cœur des nouvelles entières de Tchekhov, il citait Céline comme il respirait…
Y. M. : J’en reviens au film. Quand on monte un spectacle dans un Centre Dramatique comme celui de Toulouse, ce qui fut le cas, on a les moyens, par la Cinémathèque ou tout autre système de prêt, de se faire projeter une copie du film. Pourquoi avoir obstinément refusé de le voir ?